• Parler correctement, en respectant les règles de la langue, me paraît être la moindre des politesses lorsque l’on intervient sur les médias. Et pourtant, il n’est pas un jour sans que l’on soit agressé par des fautes grossières qui sont autant de marques de mépris pour ceux qui écoutent. En voici quelques exemples récents :
- un Président de la République: les réformes mises-t-en route
- tout le monde : ils veulavoir, ils peuvêtre
- un scientifique : les astronautes sont entraînés à l’isolation (au lieu de l’isolement)
- un député : mille neuf cent soixante-quatre z’insultes …
- un parlementaire : je ne vais pas m’alourdir (au lieu de m’appesantir)
- des ministres : cet audit va-t-être … , des mandats internationals …
- un ancien premier ministre : les fonctions qu’elle postule
- un politique : ces affrontements sont normal du dictatorisme (sic)
- un membre du gouvernement : ils sont instrumentés (re-sic)
- un porte-parole du gouvernement : je tiens-t-à dire …
- une candidate célèbre : la bravitude, il faut que les français savent …
- un journaliste (de la 5) : qu’on ne soit pas caricaturaux
- un sociologue et professeur (sic !) : éraser (au lieu de éradiquer)
- un autre journaliste : le réjouissement
- un animateur de télévision : le canalisateur (au lieu du catalyseur).
Décidément, l’inculture est largement partagée.
• Dans l’art du langage, l’utilisation d’expressions toutes faites et reprises par tout le monde, comme un phénomène de mode, est également très énervant. Qui n’a pas entendu :
- la nuit de tous les dangers, l’année de tous les risques,
- la montée d’adrénaline
- la bourse fait du yoyo
- le système de santé le plus performant
- le silence assourdissant (du président, de la majorité, de l’opposition)
- il faut mettre de la transparence
- le mari de Carla, le président du pouvoir d’achat
- une société de la performance
- le vieux lion est mort
- le président bling-bling
• Avez-vous assisté à quelques séances de questions au gouvernement sans remarquer le jeu théâtral et systématique auquel on assiste impuissant ? Souligné par des vociférations, l’opposition utilise un discours manichéen dont les éléments constitutifs sont toujours les mêmes : « politique ultra-libérale, cadeau aux plus riches, sacrifice de la fonction publique, échec de votre politique, vos renoncements,… alors ma question sera très simple : quand allez-vous retirer votre projet de loi ? »
La majorité n’est pas en reste, qui utilise abondamment les litotes et les formules obséquieuses : « avec courage, la lucidité du gouvernement, les résultats prometteurs, le président s’est engagé, etc … »
Invariablement, le gouvernement réponds : « Vous avez raison, … »
On garde l’impression d’une pièce de théâtre, répétée à l’envi et dont on peut donner les répliques avant de les entendre.
• Pour convaincre le chaland télévisuel, les professionnels du marketing utilisent toutes les ficelles possibles, même les plus grosses. Donner une apparence faussement scientifique aux messages publicitaires est devenu la nouvelle arme de ces bonimenteurs grâce à l’utilisation abusive de pourcentages qui n’ont absolument aucune signification. On peut se demander l’intérêt de l’information consistant à annoncer que la biscotte machin-chouette contient 99% de blé ! Du coup, on se demande de quelles saloperies est fait le 1% qui manque !! Imaginez comment vous allez vous y prendre pour vérifier que votre nouvelle crème miracle a permis effectivement une diminution de 77% de vos rides ! Ou bien que cette même crème de perlimpinpin a remodelé l’ovale du visage à 67 % ! Les publicités s’ornent des mots magiques « scientifiquement prouvé » sans qu’il soit précisé ce qui est scientifique ni ce qui est prouvé. On voit également fleurir des labels inventés de toutes pièces (élue voiture « citoyenne » de l’année, élu saveur de l’année !!) qui cherchent à faire croire au consommateur naïf qu’il ne tient qu’à lui de faire partie d’une grande famille de gens éclairés et informés s’il ne veut pas passer pour un imbécile. Enfin, si l’on parle des arnaques publicitaires, on ne peut passer sous silence l’intrusion abusive, pour ne pas dire scandaleuse, des arguments touchant à la santé pour vendre des produits alimentaires. Avec les margarines qui éliminent le cholestérol, les produits de petits déjeuner qui facilitent le transit intestinal (bon appétit !), les boissons qui font maigrir (en contenant 99% d’eau comme toute boisson), les concentrés miracle qui contiennent tout un monde d’omégas à numéros variés qui prétendent soigner le cœur, l’estomac, et que sais-je encore, les yaourts qui « mettent de l’ordre à l’intérieur », les supermarchés se transforment en pharmacie, les publicitaires en Diafoirus, les consommateurs en gogos manipulés. Je m’abstiendrai de m’énerver sur le portrait absolument désolant que la publicité donne de la femme, idiote, inculte, ne trouvant d’intérêt à la vie que dans la tranche de jambon et l’odeur de ses sanitaires, etc… car, comme disait Chateaubriand : « Il faut être économe de son mépris, il y a tellement de nécessiteux »..
• La télévision et la radio sont envahies par des émissions dont le seul objet est la congratulation réciproque des participants et la promotion publicitaire éhontée de produits audio-visuels médiocres voire sans intérêt aucun (disques, livres, films, …) dont la notoriété ne durera que le temps nécessaire pour rentabiliser l’investissement de la production. Ces émissions sont construites sur la base de faux interviews qui se ressemblent tellement que l’on se demande s’il ne s’agit pas d’un enregistrement type (« à la page truc, vous avez écrit que … », « si vous trouvez de quoi il s’agit, vous gagnerez un exemplaire du CD de machin »,…). Toutes ces émissions secrètent une auto-congratulation et une auto-satisfaction absolument indécentes. On a les journalistes qu’on mérite. Et je passe sous silence toutes ces émissions de télé-réalité qui mettent en scène des débiles mentaux, l’invasion des écrans par ces séries américaines de polars qui se ressemblent tellement qu’il n’y a que le titre qui change !
• Jusqu’au milieu du XXème siècle, le rôle de l’édition était la diffusion de la littérature. Aujourd’hui, le rôle de l’édition est de faire de l’argent au moyen de coups marketing et en noyant le marché du livre d’un monceau d’ouvrages dont les auteurs sans imagination ni talent ne savent rien faire d’autre que de raconter leur vie et d’exposer publiquement leur intimité. Tous ces livres qui encombrent les rayons des librairies n’ont comme destinée que de disparaître dans les greniers ou au pilon après avoir berné quelques milliers de naïfs. On a les écrivaillons qu’on mérite.
Bien évidemment, cette liste d’énervements est très très loin d’être exhaustive.
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