Le pape, intellectuel et théologien brillant, homme de la parole mais non de l’image, vient de faire une déclaration qui se veut une démonstration de l’incompatibilité entre religion et violence. Pour les besoins de sa démonstration, comme s’il se trouvait en chaire universitaire, il a utilisé un texte médiéval faisant référence à la « guerre sainte » de l’Islam pour montrer que la religion qui s’arme de violence se fourvoie. La démonstration était sérieuse et argumentée mais l’exemple mal choisi. Comment se peut-il que, dans les temps que nous vivons, traversés par des tensions politiques où la religion est instrumentalisée (que se soit par les « born again » d’outre-atlantique ou par les islamistes radicaux), le chef suprême de l’Eglise catholique n’ait pas perçu le danger que contenait tout rapprochement entre l’Islam et la violence ? Il n’était que de se remémorer l’ampleur des manifestations à la suite de la publication des caricatures de Mahomet ! Ceci démontre que l’on peut être un brillant expert en théologie et un piètre politique. Emporté par son expertise et sa dialectique, le pape a oublié l’œcuménisme et l’état du monde. Dans son habit de professeur de théologie au sein de l’Université de Ratisbonne, il a oublié que, où qu’il soit, il portait la parole de l’Eglise catholique et s’adressait, par la force de son titre, bien au-delà des murs universitaires, au monde entier.
Cependant, la contradiction et l’aveuglement dans lesquels vivent les islamistes radicaux sont consternants. À peine le pape avait-il prononcé son discours que les pays musulmans s’enflammaient en hurlant « à la provocation » en ne retenant du discours du pape que ce qui servait leur ire. Et la riposte des plus radicaux ne s’est pas faite attendre.Des églises catholiques ont été brûlées, une religieuse a été assassinée, les appels à la guerre sainte se sont multipliés, le pape traité de suppôt du président américain. C’est-à-dire que, pour protester contre le rapprochement abusif entre Islam et violence, ils ont recours à cette même violence, justifiant de ce fait le lien qu’ils condamnent. Constatons ce fait, sans oublier que la religion catholique a, elle aussi, connu ses heures sombres et sa période ténébreuse, avec les croisades des XIème, XIIème et XIIIème siècles et l’inquisition qui perdura du XIIIème au XVIIIème siècle, périodes pendant lesquelles les exactions et les horreurs ont été innombrables et commises au nom de Dieu. La religion servait également, en ces temps-là, comme l’Islam aujourd’hui, de prétexte à la recherche du pouvoir et de la domination. Dans les deux cas, ce dévoiement injustifiable de la religion provient de l’intrication du pouvoir politique et du pouvoir religieux. Et l’on peut craindre qu’il ne faille encore beaucoup de temps pour, qu’au sein de l’Islam et de l’administration américaine, la séparation entre le spirituel et le temporel soit totale et irréversible.
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