À huit jours à peine des élections présidentielles, environ la moitié du corps électoral hésite encore sur le choix d’un candidat. Situation tout à fait particulière et nouvelle dont on peut se demander ce qu’elle signifie. Une raison pourrait être que, en dehors des « petits candidats », les « programmes » des candidats significatifs se différencient si peu que les électeurs perçoivent difficilement les différences et n’arrivent pas à fixer leur choix. Une deuxième raison peut être la suivante : les programmes des candidats ont sombré dans le détail
des actions opérationnelles en promettant une détaxe ici, un contrat particulier là, une aide spécifique ici et là, oubliant le fait qu’un projet présidentiel n’est pas un programme de gouvernement. Or, les actions de gouvernement n’ont jamais provoqué le rêve des électeurs car il n’y a pas de place à l’attente et l’espoir dans une décision gouvernementale dont l’application est immédiate. Par contre, un projet présidentiel devrait créer les conditions du rêve et de l’espérance en construisant et proposant une vision de l’avenir qui suscite l’intérêt et l’impatience de la majorité du peuple. Ce n’est pas le cas de la campagne actuelle. Le concept de « démocratie participative », dont tous les candidats se sont plus ou moins inspirés en accédant à toutes les demandes corporatistes, a entraîné ceux-ci dans les profondeurs de la démagogie. Or la démagogie ne fait que caresser le peuple dans le sens « du poil » en lui promettant de satisfaire ses besoins individuels et égoïstes. Ce qui explique que la campagne n’a abordé aucun des thèmes suivants : l’international (l’Iran, la Corée du Nord, l’Irak, l’Afghanistan, le Vénézuéla, le Darfour et l’Afrique, les relations atlantiques), l’Europe (quelle Europe pour demain ?), les orientations de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’avenir de la Sécurité Sociale, l’avenir énergétique. Vraisemblablement conscients de cette dérive, peut-être même initiateurs réfléchis du discours démagogique, les candidats tentent, de façon dérisoire, de trouver de temps en temps des thèmes de campagne qui surprennent les électeurs. Alors ils parlent du drapeau, du gène de la pédophilie ou de la suppression de l’ENA ! Quel décalage avec le choix de l’énergie nucléaire civile et militaire par Charles De Gaulle ou la suppression de la peine de mort par François Mitterrand ! Ce mauvais positionnement du discours des candidats (de tous les candidats) est le signe de la disparition des hommes (ou des femmes) politiques d’envergure. La société se banalise en s’uniformisant et, à force de vouloir tout transformer en marchandise, il ne reste plus que des camelots.
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