La parallaxe est une différence de vision qui se crée lorsque l’on regarde depuis deux points de vue différents. Un point de vue unique fait courir le risque d’une appréciation partielle relevant du politiquement correct. En portant un regard différent, on peut alors percevoir des aspects cachés du monde. Regarder, écouter, et chercher un point de vue décalé peut parfois faire mieux comprendre le monde et le jeu des hommes.
30 mai 2006
La duperie de l’Europe sociale
Être de droite ou de gauche est une palinodie lorsqu’on est dans la pauvreté. Il ne saurait y avoir de social si l’on ne se préoccupe d’abord de l’économie. Répartir équitablement les revenus n’a aucun sens lorsqu’il n’y a rien à redistribuer. Les tenants du non au projet constitutionnel européen justifient leur choix en condamnant la tendance libérale du traité au détriment des aspects sociaux. Et, dans leur discours actuel, ces mêmes « nonistes » prônent la relance de la dynamique européenne, dont il faut bien dire qu’elle est moribonde, par la construction d’une Europe sociale débarrassée de toute tendance libérale, faute d’avoir le courage de parler de protectionnisme. Il y a, dans ce discours, un contresens majeur. En effet, pour « faire » du social, il faut d’abord trouver les moyens de relancer l’économie européenne qui sombre globalement sous le poids de ses déficits et de son chômage. Pour indemniser les chômeurs, encore faut-il que l’économie engendre des richesses susceptibles d’être redistribuées. Or, sur ce sujet, les thuriféraires et illusionnistes du non restent étrangement silencieux. La première obligation d’une construction économique européenne est que l’Europe fonctionne sans contrainte économique interne, sans barrière entre les pays s’appliquant aux activités productrices de richesses. Imagine-t-on que la France puisse fonctionner avec des octrois entre ses régions ? Peut-on imaginer la France sans la liberté de circulation des personnes, des services, des industries sur son territoire ? Cette libre circulation entre les régions n’est rien d’autre qu’un libre-échange à la dimension nationale ! Le projet de Constitution Européenne ne prévoyait rien d’autre entre les pays européens. La liberté de circulation n’a rien à voir avoir le libéralisme tel que le décrivent les « nonistes » si ce n’est la notion de liberté. Certes, la liberté n’est pas sans contrainte et la libre circulation intra-européenne doit s’accompagner de règles qui permettent, à la fois, d’avancer vers la construction de principes communs à tous tout en évitant les distorsions criantes entre les pays (ce qui, normalement, aurait dû conduire à davantage de précautions dans l’admission des nouveaux entrants pour ne pas créer des difficultés énormes dans l’harmonisation sociale et fiscale). Mais, pour cela, encore faut-il partir d’un cadre général commun. C’est ce que proposait le projet de Constitution. Dans ce traité, des améliorations sociales étaient apportées, notamment dans ses sections de la partie et les sections 1 et 2 du chapitre 3 de la partie 3, qui n’existent pas dans le traité de Nice, celui-ci restant en vigueur du fait du rejet du projet de traité. Aujourd’hui, l’Europe est maltraitée par des conflits minables et égoïstes entre des intérêts purement nationaux au détriment de l’intérêt général. C’est là le plan B des « nonistes » ! L’Europe est en panne pour une décennie. Ne soyez pas dupes du discours que ne manqueront pas de tenir les candidats « nonistes » à la fonction présidentielle, qui tenteront de vous faire croire qu’ils seront capables de relancer la dynamique européenne. Ils ont affaibli pour longtemps la place de la France en Europe et celle de l’Europe dans le Monde. Et leur discours tentant de « faire porter le chapeau » à un chef d’Etat qui n’aurait pas compris le message du 29 Mai 2005 n’est que l’expression de leur mauvaise conscience devant le fiasco dont ils sont responsables. Ceux qui se sont reconstruit une visibilité politique pour avoir une perspective présidentielle au détriment de l’Europe portent une responsabilité écrasante devant les générations à venir. Espérons que ces générations sauront les juger.
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