Qui peut prétendre aujourd’hui que les connaissances acquises à un moment de la vie seront suffisantes pour le reste du parcours ? Qui peut prétendre qu’il n’aura pas besoin d’apprendre ou de réapprendre au cours de son existence pour pouvoir garder sa place au sein de la société ? Qui peut prétendre que le savoir possédé ne deviendra pas un jour obsolète et sans utilité ? Qui peut prétendre que ses connaissances seront suffisantes pour le restant de sa vie professionnelle ? Qui peut croire qu’il n’aura pas à changer de métier au cours de sa vie ?
Personne, bien sûr. Le « progrès » est une caractéristique de la société des hommes. J’entends par progrès cette curiosité insatiable de l’homme à chercher à comprendre le monde et les lois de la nature. Cette quête permanente a des répercussions sur la vie des hommes. Et c’est peut-être là que le mot « progrès » n’est pas adapté, en tout cas pas pour tous. Car les répercussions dont je parle ne sont pas positives pour tout le monde, c’est une évidence. Mais, dans une société qui se donne des règles humanistes, il appartient à la politique de gérer ces répercussions pour que l’équité (et non l’égalité) soit sauvegardée. Et l’équité impose, condition nécessaire mais non suffisante, que les hommes soient toujours en possession des connaissances indispensables pour pouvoir jouer le jeu de la vie dans des conditions acceptables. L’organisation de la société doit prendre en compte cette nécessité.
L’homme qui travaille est soit salarié soit indépendant. L’employeur devrait être pleinement responsable de la mise à niveau permanente des connaissances de ses salariés. L’objectif de cette mise à niveau est de préserver l’employabilité du salarié, c’est-à-dire de mettre en adéquation les compétences avec les exigences du monde du travail. Deux grands types de mise à niveau se distinguent : les compétences nécessaires à l’employeur qui voit son métier évoluer dans un environnement changeant, les compétences souhaitées par le salarié qui devra changer d’employeur, donc de métier. Le premier type de mise à niveau est de la responsabilité pleine et entière de l’employeur qui doit la concevoir, l’organiser, la mettre en œuvre, la maintenir. L’employeur doit fixer des objectifs de formation qui se déclinent à tous les niveaux hiérarchiques afin de motiver tous les managers à la formation de leurs collaborateurs. Il n’est alors plus nécessaire de séparer (ce qui se fait encore partout) le temps passé par le salarié en formation du temps opérationnel ; il suffit de s’assurer que les objectifs sont atteints dans les deux domaines. Un objectif de formation non atteint devrait entraîner, non seulement une pénalité pour le salarié, mais également une sanction pour le manager.
L’égoïsme naturel de toute organisation humaine fait que le second type de mise à niveau ne peut relever de la responsabilité unique de l’employeur. Il faut donc : 1°) qu’il soit organisé par les pouvoirs publics. 2°) qu’une partie du temps du salarié puisse être consacré au suivi de cette mise à niveau. C’est le seul temps de formation qui doit relever d’une contrainte réglementaire. La responsabilité du salarié est de savoir choisir la formation qui lui convient (à condition qu’il soit informé). La responsabilité des Pouvoirs Publics est de veiller à ce qu’il existe des propositions de formation crédibles et sérieuses tant dans leur contenu que dans les moyens mis en œuvre.
Le travailleur indépendant doit prendre en charge lui-même ces deux types de mise à niveau. Il doit constamment maintenir ses connaissances métier au meilleur niveau possible. Il doit aussi se préparer à un changement d’orientation de ses activités lorsque le marché sur lequel il se situe l’impose. Il doit donc organiser sa propre veille technologique et marketing pour pouvoir trouver une réponse aux deux questions suivantes :
- quelles seront les connaissances dont j’aurai besoin pour suivre les évolutions de mon métier ?
- l’évolution de mon marché imposera-t-elle un changement de métier et lequel ?
Pour lui également, il est vital de trouver des formations efficaces répondant à ses besoins. L’évaluation de la qualité et de l’efficacité de ces formations doit relever des Pouvoirs Publics. Il est de leur reponsabilité d’empêcher que les utilisateurs de ces formations perdent leur temps et leur argent au profit d’organismes peu scrupuleux.
Quoi qu’il en soit, les temps sont finis où l’on pouvait espérer passer toute sa vie dans le même emploi, sans remise en question de ses savoirs. Et il ne sert à rien de le nier.
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