16 février 2009

L’argent de l’indécence

La société Total vient de publier son bénéfice pour l’exercice 2008, qui s’élève à 14 milliards d’Euros, un record pour l’ensemble de l’économie française. Dans l’état de crise où se trouve la nation, il est légitime de se poser la question de l’utilisation de cette somme colossale. Il est bon de savoir que l’entreprise prévoit de n’en reverser que 2% aux salariés, les 98% restants se partageant à peu près moitié-moitié entre l’investissement et le versement de dividendes aux actionnaires. Soit à peu près 6 milliards d’Euros aux actionnaires et à peine 300 millions d’Euros aux salariés. Vive la spéculation sur le prix du baril ! La règle du tiers, énoncée par le Président de la République, est à l’évidence encore un rêve lointain, voire une utopie. Sachant que 40% du pétrole est consommé par le transport, pourquoi Total ne participerait-il pas au soutien de l’industrie automobile en lieu et place du contribuable qui paie déjà pour le sauvetage des banques (qui ne jouent manifestement toujours pas le jeu) dont Total a besoin ? Ou pourquoi ne participerait-il pas au financement des grands travaux prévus par le gouvernement ? Cela crédibiliserait les mesures de relance envisagées dont on peut légitimement se demander pourquoi l’État, qui ne pouvait les financer avant la crise, se déclare soudain capable de le faire ? La réflexion peut même avancer un pas de plus, ce que font un certain nombre d’économistes. En effet, l’énergie peut être considérée comme un bien commun, donc public. De plus, Total est un monopole de fait. Ceci pousse certains à se poser la question de la nationalisation du pétrolier. Mais la nationalisation n’est sûrement pas une solution-miracle. Il y a toutes les chances pour que l’État soit un plus mauvais manager que le secteur privé. Riche de 6 milliards d’investissements, ne vaudrait-il pas mieux, par contre, que Total investisse dans les nouvelles énergies plutôt que dans l’extraction du pétrole bitumineux canadien qui met gravement en péril l’environnement ? Sauvegarder sa rente est, semble-t-il, plus important pour Total que d’investir pour un avenir inéluctable, c’est-à-dire un monde sans pétrole. Total n’aurait-il pas dû être le moteur d’une recherche dans le secteur automobile (c’est le cas de le dire !) pour investir dans le véhicule du futur (proche) ? L’industrie automobile française a pris un retard important dans la recherche et le développement de véhicules propres à énergie alternative. Il faudra des investissements extrêmement importants pour rattraper son retard dans ce domaine. Et surtout, il faudra du temps. Or le futur proche est menaçant et incertain.

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