19 février 2010

L’effet papillon industriel

Le paradigme de la fiabilité et de la qualité s’appelait Toyota. Cette entreprise s’est construit sur plusieurs décennies une image prestigieuse ancrée sur le zéro-défaut de ses produits. Toyota est ainsi devenu le symbole japonais de la réussite construite sur l’excellence. Son image est tellement forte que le nationalisme japonais s’en nourrit. Cette entreprise mondialisée est devenue le premier constructeur automobile mondial. Cela signifie une extraordinaire complexité de son organisation. Une organisation qui a fonctionné à merveille jusqu’à ce que Toyota soit obligé d’opérer soudainement un rappel de 8 millions de véhicules à travers le monde. La complexité d’un système augmente factoriellement en fonction du nombre de ses composants. Or, l’automobile est devenue un produit extrêmement complexe par la multiplicité de ses composants et de leurs interactions électroniques et informatiques. À cette complexité intrinsèque du produit s’ajoute celle de l’organisation industrielle, le propriétaire de la marque devenant un simple assembleur de composants en provenance de multiples sous-traitants, répartis dans le monde. La complexité résultante de cette superposition est difficile, sinon impossible, à estimer, mais il est certain qu’elle est extrêmement élevée. Il est alors concevable qu’un petit dysfonctionnement d’un seul composant, qu’il soit industriel ou organisationnel, ait un effet considérable sur le produit fini. On peut même se poser la question de savoir si, au-delà d’un certain niveau de complexité, le système n’adopte pas un comportement chaotique, c’est-à-dire imprévisible. C’est vraisemblablement ce qui s’est passé chez Toyota qui doit, soudainement, faire face à une multitude de dysfonctionnements de ses produits sans qu’il ait été possible d’anticiper le phénomène. Tous les constructeurs automobiles sont soumis à ce risque. Il est alors logique de se demander si l’automobile ne devient pas un produit de plus en plus dangereux au fur et à mesure que les constructeurs multiplient les systèmes intégrés de contrôle et de rétroaction automatiques. Il est déjà symptomatique que les garagistes ne savent plus réparer une automobile, se contentant, dans la majorité des cas, de remplacer les composants. La multiplication des assistants à la conduite permet de pallier les défaillances des conducteurs qui se permettent ainsi des imprudences qu’ils n’auraient sans doute pas commises sans ces composants. De même qu’un nombre de plus en plus important d’élèves ne savent plus exécuter un calcul mental à force d’utilisation de calculettes électroniques, un nombre de plus en plus grand de mauvais conducteurs ne savent plus conduire correctement et se sentent protégés par ces assistants. Ainsi le dysfonctionnement de l’un d’entre eux a nécessairement des conséquences graves car il ne protège plus d’une imprudence de conduite. Au bout du compte, une puissante berline de luxe peut être potentiellement plus dangereuse qu’une vieille 2CV !!

2 commentaires:

Unknown a dit…

Le problème de la dangerosité des grosses berlines modernes ultra-complexes ne vient pas tant de leur haute technicité que des personnes qui les conduisent. Cela me pousse à penser que l'être humain est obligé d'évoluer en même temps que la technologie qu'il crée, s'il ne veut pas finir s'autodétruire.

champs-louis a dit…

De Champs-Louis:
Michel,attention à l'orthographe! Les travaux de "Lorentz" en 1961 et
63 m'ont fait sursauter. Evidemment
c'était Lorenz, et la révision des clssiques s'est imposée.
Remarque de pure forme.C'est sur le fond de ton économie politique qu'il faudra discuter. A bientôt!