26 avril 2007

Cuisine, cuisine …

Le premier tour des élections présidentielles s’est articulé sur l’idée de rupture avec les errements politiques du passé, que se soit à gauche, à droite ou au centre (rappelez-vous la rupture, l’ordre juste). Tous les candidats ont dit avoir jeter aux orties les combines politiques des années passées, ont juré sans vergogne qu’ils étaient porteurs d’une nouvelle virginité politique et d’une morale incorruptible en la matière. Sûrement, ces discours ont emporté l’adhésion d’un nombre important d’électeurs, circonspects sur la sincérité des hommes politiques actuels, espérant un nouvel état d’esprit emprunt de transparence.
Mais, voilà !! Le premier tour des élections présidentielles est à peine terminé que l’on assiste au démarchage éhonté des deux candidats restant en lice vers les électeurs ayant porté leur préférence sur le candidat « centriste » ainsi que vers leurs extrêmes réciproques. L’un multiplie les références à tous les grands esprits politiques de l’histoire, faisant fi de leur appartenance, et marchande les futurs postes de députés, l’autre promet des portefeuilles ministériels conditionnés par la soumission et le ralliement. Ils utilisent tous les deux abondamment le mot de « rénovation » en lieu et place de celui de « racolage » sans que cela ne trompe personne. Chassez le naturel, il revient au galop !! La classe politique française n’est décidément pas prête au changement (et pourtant, les candidats ont usé et abusé de ce mot durant leur campagne !) et les discours restent des outils purement marketing et publicitaires. Heureusement, pour nous consoler, le leader du parti centriste se lance dans une grande entreprise : il remplace le parti « Union pour la Démocratie Française » par un tout nouveau parti « le Parti démocrate » ! Quel bouleversement !!

24 avril 2007

Finalement ….

L’écheveau des problèmes de la France est tellement complexe qu’il semble indémêlable ; le chômage, le pouvoir d’achat, le déficit des comptes de la Sécurité Sociale, la dette publique, le financement des retraites, les délocalisations industrielles, l’hôpital public, l’enseignement supérieur, le dialogue avec les partenaires sociaux, l’énergie, la compétitivité industrielle, la place de la France en Europe, la politique agricole, la pollution environnementale, le fonctionnement des institutions, le train de vie de l’Etat, la recherche fondamentale et appliquée, l’état des prisons, le fonctionnement de la justice, le niveau de l’investissement productif, le rapport Euro/Dollar, les services publics, la représentativité syndicale, etc, etc …Devant des problèmes à résoudre aussi nombreux, me revient en mémoire la réflexion de Charles De Gaulle : je vais au-devant d’une situation compliquée avec des idées simples. Simplifions donc !
De même que l’épicier du coin ne peut pas s’enrichir en achetant ses propres produits, pour qu’un pays s’enrichisse globalement il n’y a pas d’alternative au fait de gagner des parts de marché dans le monde. Or, actuellement, la France recule dans tous les domaines par rapport à ses compétiteurs internationaux. Cela a une conséquence immédiate c’est que la France s’appauvrit ce qui se traduit par l’augmentation de la dette et une augmentation du chômage. Cela a une cause, c’est que l’offre française est inadaptée, insuffisante et trop coûteuse. Inadaptée, car la recherche et l’investissement ne sont pas à la hauteur du nécessaire, ce qui entraîne une offre beaucoup moins attractive et performante que celle des concurrents. Insuffisante, parce que la France ne travaille pas assez du fait d’un chômage élevé et d’un temps consacré au travail trop limité (les 35 heures, l’âge de la retraite, l’utilisation abusive de la retraite anticipée) et parce que les incitations à l’investissement productif sont pratiquement inexistantes. Trop coûteuse car le coût du travail est trop élevé, les charges pesant sur les entreprises sur lesquelles repose la compétitivité internationale étant trop importantes. Améliorer la position de la France dans le monde lui permettrait en outre de retrouver la place qu’elle a perdue en Europe. Finalement, le diagnostic est assez simple, ce qui ne veut pas dire que le remède soit aisé à mettre en œuvre car il demandera beaucoup de courage et de sacrifices. Voilà ce qui devrait, normalement, être au centre du second tour de l’élection présidentielle. Est-ce si sûr ?

22 avril 2007

Petits intérêts particuliers

Tous les candidats à l’élection présidentielle mettent, dans leurs priorités (ou dans leur catalogue de ventes), le développement de la recherche. Voilà ce qui devrait gagner l’unanimité de la population et des partis politiques. Il n’y a pas d’autre issue pour les pays occidentaux que de rechercher leur différenciation par rapport aux pays EPD (en plein développement) comme la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Brésil, etc…, dans le développement d’activités à très haute valeur ajoutée. C’est-à-dire que la recherche fondamentale et appliquée devient une obligation. L’Etat, conscient de ce fait, a le projet de développer le plateau scientifique et universitaire de Saclay pour y favoriser la création de 100.000 emplois dédiés à la recherche. On aurait pu espérer un consensus populaire sur ce projet. Il n’en est rien. Immédiatement, les associations locales et leurs élus ainsi que le parti des Verts s’opposent à ce projet au prétexte de préserver leur tranquillité. Certes, 100.000 emplois demandent de créer des infrastructures, des logements, des accès. La crainte des occupants locaux est compréhensible, en tout cas pardonnable à défaut d’être légitime. Mais cela démontre à l’évidence, l’inanité du concept de démocratie participative. L’intérêt particulier peut, comme dans cet exemple, être absolument contraire à l’intérêt général. Le rôle majeur (essentiel) du politique est de savoir, dans tous les cas, donner la priorité à l’intérêt général sur l’intérêt particulier et corporatiste. Encore faut-il que le politique ait une idée précise de l’intérêt général et qu’il ne le confonde pas avec son intérêt électoral.

16 avril 2007

Le supermarché électoral

À huit jours à peine des élections présidentielles, environ la moitié du corps électoral hésite encore sur le choix d’un candidat. Situation tout à fait particulière et nouvelle dont on peut se demander ce qu’elle signifie. Une raison pourrait être que, en dehors des « petits candidats », les « programmes » des candidats significatifs se différencient si peu que les électeurs perçoivent difficilement les différences et n’arrivent pas à fixer leur choix. Une deuxième raison peut être la suivante : les programmes des candidats ont sombré dans le détail
des actions opérationnelles en promettant une détaxe ici, un contrat particulier là, une aide spécifique ici et là, oubliant le fait qu’un projet présidentiel n’est pas un programme de gouvernement. Or, les actions de gouvernement n’ont jamais provoqué le rêve des électeurs car il n’y a pas de place à l’attente et l’espoir dans une décision gouvernementale dont l’application est immédiate. Par contre, un projet présidentiel devrait créer les conditions du rêve et de l’espérance en construisant et proposant une vision de l’avenir qui suscite l’intérêt et l’impatience de la majorité du peuple. Ce n’est pas le cas de la campagne actuelle. Le concept de « démocratie participative », dont tous les candidats se sont plus ou moins inspirés en accédant à toutes les demandes corporatistes, a entraîné ceux-ci dans les profondeurs de la démagogie. Or la démagogie ne fait que caresser le peuple dans le sens « du poil » en lui promettant de satisfaire ses besoins individuels et égoïstes. Ce qui explique que la campagne n’a abordé aucun des thèmes suivants : l’international (l’Iran, la Corée du Nord, l’Irak, l’Afghanistan, le Vénézuéla, le Darfour et l’Afrique, les relations atlantiques), l’Europe (quelle Europe pour demain ?), les orientations de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’avenir de la Sécurité Sociale, l’avenir énergétique. Vraisemblablement conscients de cette dérive, peut-être même initiateurs réfléchis du discours démagogique, les candidats tentent, de façon dérisoire, de trouver de temps en temps des thèmes de campagne qui surprennent les électeurs. Alors ils parlent du drapeau, du gène de la pédophilie ou de la suppression de l’ENA ! Quel décalage avec le choix de l’énergie nucléaire civile et militaire par Charles De Gaulle ou la suppression de la peine de mort par François Mitterrand ! Ce mauvais positionnement du discours des candidats (de tous les candidats) est le signe de la disparition des hommes (ou des femmes) politiques d’envergure. La société se banalise en s’uniformisant et, à force de vouloir tout transformer en marchandise, il ne reste plus que des camelots.

07 avril 2007

2025 n’est pas si loin

Je me lève sans allumer la lumière et me dirige grâce à la faible lueur de la rue qui entre chez moi. L’électricité est devenue beaucoup trop chère pour ne pas chercher tous les moyens de s’en passer. Je passe au cabinet de toilette où j’ai, depuis longtemps, remplacé mon rasoir électrique par un rasoir mécanique, pour la même raison. Je n’utilise plus de lotions et mon savon est un gros cube de savon de Marseille qui me sert également pour me laver les dents. Le goût est repoussant, mais il n’y a pas le choix car les dentifrices synthétiques sont interdits.
Pour déjeuner, un jus de fruit et un café en poudre avec de l’eau chauffée au gaz. En avalant mon café, j’écoute les informations. Les conflits, nés de la raréfaction de l’eau en Afrique, au Moyen-Orient, dans les Balkans, en Amérique du Sud, s’amplifient et accentuent les mouvements de population. Le prix du pétrole atteint un nouveau sommet à 250 € le baril de brent. Une manifestation monstre, rassemblant 300.000 personnes excédées, a eu lieu à Toulouse pour la défense des retraites et des salaires et qui s’est terminée par des heurts violents avec la police ; on dénombre 6 morts et plusieurs dizaines de blessés. En Indonésie, un ouragan a dévasté l’île de Java en faisant 5.000 morts. Le dernier ours blanc est mort. La sécheresse, qui sévit dans le midi de la France, s’accentue et décime le bétail. On envisage de créer des élevages de dromadaires pour en faire des animaux de bât et, pourquoi pas, des animaux de boucherie. Je ne peux m’empêcher de faire la grimace. Heureusement que j’ai déménagé, il y a 10 ans maintenant, pour m’installer à Boulogne-sur-mer à cause de la montée du niveau de la mer sur les rivages du Sud-Ouest ! Les prix du logement ont tellement augmenté que je ne pourrais plus le faire aujourd’hui. Bref, les nouvelles ne sont pas plus mauvaises aujourd’hui qu’hier.
Je quitte mon domicile, où les ascenseurs ne fonctionnent plus pour cause d’économies d’énergie et où les appartements du rez-de-chaussée sont réservés par la loi aux handicapés, et je me rends à l’arrêt du bus. Je n’attends pas trop longtemps, car les bus, fonctionnant au biocarburant, ont été multipliés pour compenser l’interdiction de l’utilisation des véhicules particuliers. Mais ils sont toujours bondés et l’inconfort du transport est pénible mais sans alternative. Nous sommes en Février. La température est clémente, mais le vent est violent. Espérons que cela ne va pas se transformer en tempête comme la semaine dernière. Les dégâts ont été importants et de nombreux palmiers des Champs-Élysées ont été déracinés.
En arrivant au bureau, je décline mon identité comme d’habitude par une reconnaissance d’empreintes digitales. L’insécurité ayant fortement progressé, des mesures ont été prises dans tous les établissements et les bureaux pour éviter l’intrusion d’inconnus. Je m’installe à la table qui m’a été réservée pour aujourd’hui et je branche mon ordinateur afin d’accéder à mes dossiers, le papier étant devenu une denrée rare à cause de la raréfaction des forêts. Depuis deux ans, la climatisation a été arrêtée, sauf pour le local des ordinateurs, pour être remplacée par une simple ventilation. Lorsque la température extérieure est importante, cette ventilation crée plus de désagrément que de confort. Je passe une grande partie de la matinée à envoyer des relances de paiement à des clients qui tardent à honorer leurs dettes, situation courante dans une économie qui s’essouffle. Je me connecte par Internet au siège social de la société qui est délocalisé depuis cinq ans maintenant à Shanghai. Je télécharge les éléments de formation continue que je dois acquérir pendant la semaine. La société à laquelle j’appartiens conçoit et vend des contrats d’assurance. Aujourd’hui tout le monde s’assure sur tout ce qu’il veut : chômage, santé, retraite, durabilité et dysfonctionnement des équipements, vieillesse, voyages, loisirs, vol, incendie, don d’organes, etc…Les compagnies d’assurances sont devenues des entreprises multinationales parmi les plus importantes. La formation que je dois assimiler consiste à comprendre le contenu et les processus de vente des nouveaux contrats d’assurance fréquemment proposés sur le marché. À midi, je déjeune au restaurant d’entreprise. Le choix est limité. Un certain nombre de plats ont disparu : le poisson, trop rare et trop cher, les frites qui consomment trop d’énergie pour leur cuisson, certains fruits comme les fruits rouges qui supportent mal les dérèglements climatiques, les fromages de pâte cuite, les préparations à base de maïs parce que trop consommateur d’eau, etc … Je me contente d’un plat de purée avec jambon. L’après-midi, je dois passer une visite médicale du travail, car l’Etat surveille de près l’extension de maladies anciennes qui ont fait leur réapparition depuis une dizaine d’années, comme la malaria et le paludisme. Le travail s’arrête à 17 heures en hiver et à 20 heures en été pour éviter d’avoir à utiliser la lumière électrique dans les immeubles de bureaux et les usines. Ce soir, je pars donc de bonne heure et je reprends un autobus bondé pour retourner chez moi. En arrivant, il faut que je fasse ma déclaration d’impôts. L’impôt sur le revenu a fortement diminué, non seulement parce que je gagne moins qu’il y a quelques années, mais surtout parce que l’impôt lui-même a globalement diminué. Par contre les taxes sur l’eau, l’électricité, l’enlèvement des ordures, le gaz, les carburants, ont augmenté considérablement, tellement que le total de mes impôts ne cesse d’augmenter, même si mes revenus stagnent. Je suis obligé d’économiser sur les loisirs et les vacances pour m’en sortir. Les prélèvements sociaux ont également augmenté pour faire face à la recrudescence des maladies dites « tropicales » apportées par des insectes qui se multiplient à cause du réchauffement du climat sur toute la planète et à cause du vieillissement important de la population.