19 février 2007

Le temps des cerises

Les deux seuls candidats crédibles de la campagne électorale présidentielle ont publié, l’un comme l’autre, leur catalogue de mesures puisque cela est devenu le passage obligé de toute campagne électorale où l’économie cède le pas au politique, la tactique à la stratégie. Ces mesures, pour l’un comme pour l’autre, ont un coût qui s’établit autour de 35 milliards d’Euros. Les chevau-légers de chaque parti vont s’efforcer de démontrer l’exorbitance et la sous-évaluation des dépenses de « l’autre » tout en affirmant la solidité de leurs propres estimations économiques. Mais, finalement, l’ordre de grandeur est aujourd’hui connu et s’établit pratiquement au même niveau pour les deux parties. La réelle différence tient dans le fait que, pour le candidat de gauche, ce coût provient d’une augmentation des dépenses ; pour le candidat de droite, il provient d’une diminution des impôts.
Par contre, pour trouver les recettes correspondantes, ils se retrouvent tous les deux sur la même recette magique : l’augmentation du pouvoir d’achat entraînera une relance de la consommation et donc un redémarrage de la croissance ; celle-ci génèrera alors les recettes fiscales permettant de financer le programme des promesses. Il y a là une sorte de pétition de principe qui consiste à faire croire qu’en dépensant davantage, chaque citoyen s’enrichit et peut donc dépenser. Ce cercle « vertueux-virtuel » n’est qu’une illusion. Cela veut dire que nous allons assister à une augmentation de la dette publique, déjà exorbitante, et qu’une grande partie des promesses ne sera pas tenue car le principe de réalité va nécessairement s’imposer puisqu’il est incontournable.

13 février 2007

La démocratie participative

TF1 organise une émission où 100 citoyens, censés être un panel représentatif de la société française, posent des questions pendant deux heures à un candidat à l’élection présidentielle. La première émission a eu lieu en présence de N. Sarkozy. Les premières questions ont porté sur l’interdiction de fumer et sur les radars. Au cours des deux heures d’émission, aucune question n’a été posée sur l’Europe, la dette publique, la Chine et les délocalisations. Rien n’a été dit sur la Défense ou l’Education Nationales, sur la politique française en Afrique ou au Moyen-Orient. Chaque intervenant a posé une question en rapport direct avec ses problèmes personnels : le chômeur sur le fonctionnement de l’ANPE, le viticulteur sur les difficultés de la filière, l’homosexuel sur le mariage gay, le chef de PME sur l’ampleur des taxes, etc, … Aucun des participants n’a été capable d’aborder un problème d’intérêt général. Il n’y a rien là de surprenant, un tel comportement étant parfaitement naturel. Pour la très grande majorité, ce qui touche à l’individuel est beaucoup plus important que le général et le collectif. Dans une émission du type de celle de TF1, chaque intervenant ne peut poser qu’une seule question. Il est alors naturel que, dans ses priorités personnelles, l’intervenant choisisse ce qui le touche au plus près. Et à regarder de près, le lointain reste flou. Ségolène Royal insiste, au cours de sa campagne, sur la création de jurys populaires pour évaluer l’action des élus. Sur quels critères ces jurys vont-ils baser leurs « jugements » ? Il n’y a aucune raison pour qu’ils ne fonctionnent pas avec les mêmes réflexes que les citoyens des panels des émissions de TF1, c’est-à-dire en prenant en compte uniquement la satisfaction par la représentation nationale de leurs intérêts personnels ou corporatifs. La démocratie représentative a été « inventée » pour permettre de donner la priorité à l’intérêt collectif sur l’intérêt particulier. Soumettre la représentation nationale au jugement des jurys populaires revient à subordonner l’intérêt collectif aux intérêts particuliers. N’oublions pas que la première loi de la systémique est que l’addition des solutions particulières ne fait jamais une solution collective. Enfin, si le peuple est un acteur prestigieux, n’oublions pas non plus que la foule est stupide et dangereuse.

08 février 2007

La réalité dépasse la fiction

José Bové, candidat à la Présidence de la République, vient de voir confirmée sa condamnation à 4 mois de prison pour fauchage illégal d’OGM. Comme la mise en application de cette peine demande une décision du juge d’application des peines, José Bové n’entrera pas en prison, faisons-en le pari, avant la fin de la campagne électorale. Il est donc parti aussitôt animer son premier meeting électoral… à Aubagne !! Ça ne s’invente pas !!

07 février 2007

Le terrain a bon dos !

Tous les principaux candidats à la Présidence de la République se font une obligation impérative et exigeante d’aller « sur le terrain », « au contact du vrai peuple », « à la rencontre des vrais gens », « à l’écoute des Français ». Or, tous, sont élus depuis très longtemps, ayant fait de la politique leur « job » à vie. Doit-on en conclure qu’ils sont tous devenus sourds dès qu’ils sont devenus parlementaires ? Peut-on penser, ce qui serait plus grave, qu’une fois élus, ils se sont éperdument moqués des problèmes des Français ? Faire de l’écoute du peuple le centre d’une campagne électorale ne peut que signifier que le candidat n’a aucune idée des attentes de celui-là ! Chercher ses idées « auprès du peuple » ne suffit pas aux candidats. La justification de leurs choix se trouve, non pas dans une conviction personnelle construite sur une réflexion et une expérience personnelle, mais sur ce qui se passe dans les pays voisins. C’est à celui qui va chercher ses références dans les pays scandinaves, en Espagne, aux Pays-Bas, au Royaume Uni, aux USA, en Irlande, etc, etc …
Grave, non ?

03 février 2007

Relancer la croissance ou gérer la décroissance ?

L’émergence de nouveaux géants économiques sur une terre aux ressources limitées entraîne obligatoirement une redistribution des richesses : ces derniers s’enrichissent au détriment des pays occidentaux qui s’appauvrissent. Cet appauvrissement est plus ou moins visible selon les pays. Il est beaucoup plus manifeste en France qu’aux USA. Le chômage massif est le signe le plus visible de l’appauvrissement. Il faut y ajouter le nombre croissant de travailleurs pauvres, de SDF, de mal-logés, la désindustrialisation, l’endettement croissant. Malgré des différences transitoires, tous les pays occidentaux vont devoir accepter qu’une part de plus en plus grande de la richesse mondiale soit accaparée par des pays qui réclament leur juste part, avec, d’ailleurs, la complicité non avouée ces mêmes pays occidentaux. En effet, à la recherche de nouveaux marchés et entraînés dans leur propre concurrence, ces pays ont offert les transferts de technologies dans de nombreux domaines comme argument de vente. Aujourd’hui, les pays en développement utilisent ces technologies, obtenues pratiquement sans frais et sans investissements, avec des coûts sociaux moindres, ce qui leur procure un avantage concurrentiel considérable qui perdurera jusqu’au moment où leur développement sociétal sera analogue à celui de l’occident. Il y a là une explication partielle du fait que l’Afrique ne semble pas participer à ce mouvement de développement que l’on peut constater en Chine, aux Indes ou en Amérique du Sud. L’Afrique sub-saharienne a toujours été considérée comme un grenier de matières premières (et même de personnes physiques) et non pas comme un marché solvable. Les transferts technologiques n’ont pas eu lieu. Mais le mouvement est irréversible et il lui faudra plusieurs décennies pour déboucher sur un nouvel état d’équilibre. La question qui se pose est alors celle-ci : quel équilibre ?
Le monde occidental en général, et la France en particulier, est confronté au problème suivant : la société comportant un grand nombre de défavorisés, faut-il chercher à relancer la croissance économique à tout prix (c’est-à-dire avec tous les moyens possibles) pour faire reculer les niches de pauvreté ou faut-il anticiper l’avenir en orientant le processus économique vers un état d’équilibre moins ambitieux mais plus équitable ? En d’autres termes, faut-il relancer coûte que coûte la croissance ou faut-il gérer une décroissance ? Plutôt que d’évoquer une décroissance qui fait immédiatement penser à un recul par rapport à la situation existante, il est plus juste d’évoquer un ralentissement progressif de la croissance jusqu’à l’obtention d’un équilibre à croissance nulle ou presque. Il faudra abandonner le toujours plus pour le suffisant, remplacer le plus vite par le juste-à-temps, le plus puissant par le juste-utile,le jetable par le recyclable et le réutilisable, le maximum par l’optimum, autant de remises en cause qui touchent à notre façon de vivre et de concevoir le monde. Et ceci d’autant plus rapidement que l’environnement est en danger.