07 mai 2014

Mauvaise conscience

N’avez-vous jamais été interpellé par quelqu’un, entre la poire et le fromage ou entre l’église et le bistrot, éructant du haut d’une indignation apparente : « Comment osez-vous vous plaindre du prix du pain alors que des enfants syriens meurent torturés et gazés » ? Un sentiment de gène, voire de honte, vous saisit alors à la conscience. Que représente, en effet, le prix d’une baguette en face d’un enfant, mort sous l’effet du gaz asphyxiant ou à qui un tortionnaire arrache les ongles ? Vous culpabilisez alors de la petitesse, de la médiocrité, de l’égoïsme de vos préoccupations. Au lieu de battre votre coulpe, demandez-vous de quel point de vue vous invective votre interlocuteur. Soit, dans la plupart des cas, il est lui-même complètement extérieur au problème de la Syrie, ou du problème auquel il fait allusion, et prend l’attitude facile du contempteur, bien à l’abri des horreurs dont il vous parle et qu’il pense être, sans aucune preuve et avec un à-priori suspect, absentes de vos préoccupations. Soit, dans des cas rares, il est partie prenante et impliqué dans les problèmes dont il vous parle. Dans ce cas, son implication même lui pose des œillères sur les préoccupations d’autrui, lui cache le monde extérieur et l’empêche de comprendre que le prix du pain peut être une question vitale pour celui qui vit dans la rue. Cela n’empêche nullement les nantis de trouver quelques motifs de se plaindre ou de simuler l’indignation à bon compte et sans aucune pudeur. Mais il y a peu de chance que ce soit votre cas.

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