16 avril 2009

La crise était inéluctable

La crise actuelle est une démonstration de l’incomplétude de la théorie économique. La pierre angulaire de cette dernière est la fameuse loi de l’offre et de la demande. Cette loi stipule que ces deux variables économiques sont indépendantes l’une de l’autre et que leurs variations en fonction du prix varient en sens inverse, jusqu’à un prix d’équilibre. C’est ce qui s’appelle la loi du marché ou la main invisible : le marché s’autorégule. Tous les marchés sont censés suivre cette loi immuable, le marché des produites et services et le marché de la main-d’œuvre notamment. Or qu’en est-il du marché financier, c’est-à-dire des actifs boursiers en particulier ? Par anticipation et espoir d’enrichissement rapide, la demande d’actifs croit entraînant une demande croissante de crédits. Les banques, hypnotisées par l’accroissement des valeurs boursières, augmentent leur offre de crédit au risque de diminuer drastiquement leur capital de réserve et d’augmenter leur propre endettement. Ainsi, l’offre et la demande de crédits, non seulement ne sont plus indépendantes, mais surtout sont toutes deux des fonctions croissantes de la valeur des actifs. Il n’y a donc plus de point d’équilibre ! La demande d’actifs, soutenue par l’offre de crédit, entraîne la valeur des actifs à la hausse et le cercle vicieux s’enclenche de façon dramatique. Au sein des (grandes) entreprises, l’augmentation de la valeur de l’action cesse d’être le résultat d’une bonne santé économique, mais devient une stratégie qui dévoie l’investissement vers des opérations boursières afin de satisfaire les exigences de l’actionnaire. Phénomène aggravant, l’ingénierie financière, dans laquelle les traders français sont devenus des experts, constatant l’augmentation du risque pris par les banques, a « inventé » des produits dérivés sophistiqués (les CDS) qui permettent aux banques et aux organismes financiers de revendre leur risque en créant un marché de la demande et de l’offre du risque financier. Ce nouveau marché a alors joué le rôle d’un anesthésiant auprès des banques et des organismes prêteurs qui ont perdu la conscience du risque encouru. Ils ont alors accordé des prêts dans des conditions absolument aberrantes à des emprunteurs qui, n’ayant pas la capacité de rembourser, ont gagé leurs biens immobiliers pour garantir leur emprunt. Un tel mécanisme ne peut que conduire à la rupture brutale du fonctionnement de ce cycle pervers. Il faut bien constater qu’aucun économiste n’a tiré le signal d’alarme, ni aucun des organismes internationaux que sont l’OCDE, le FMI, la Banque Mondiale, restés accrochés au Consensus de Washington par l’aveuglement de leurs bureaucrates.
La stratégie de plus-value des actifs financiers a entraîné la financiarisation des entreprises qui, privilégiant l’actionnaire, ont provoqué une déflation salariale. Celle-ci entraîne nécessairement une perte de pouvoir d’achat qui se voit compensée par un endettement des individus et une demande de crédit qui deviennent excessifs. La boucle est bouclée… et la crise est devenue tellement profonde qu’il faudra longtemps pour que l’économie sorte enfin de cette phase de désordre pour retrouver une phase de redressement après une consolidation et des remises en question douloureuses. La crise sociale, fille de la crise économique, en est à ses débuts. Viendront ensuite les effets de l’invraisemblable inflation de la quantité monétaire créée par les États.

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