18 mai 2011

Mise à mort

Nous venons d’assister, en direct de New-York, au type de justice que Nicolas Sarkozy veut instaurer en France en supprimant le juge d’instruction. Espérons que le scandale médiatique qui nous a été livré nous préserve à jamais de cette calamité. À quoi avons-nous, en effet, assisté ? Quelles que soient les charges qui pèsent sur DSK, celui-ci est présumé innocent jusqu’à preuve du contraire. Or, la sortie médiatiquement organisée par la justice américaine de DSK du commissariat de New-York est une mise à mort médiatique qui a transformé immédiatement le présumé innocent en présumé obligatoirement coupable. La présomption d’innocence a un sens très précis. Elle consiste à imposer au procureur, qui instruit uniquement à charge, d’apporter les preuves de la culpabilité avant de traiter un homme en présumé coupable. Dire que la justice américaine a la grandeur de traiter les puissants comme les plus démunis pour justifier ce à quoi nous avons assisté est une hypocrisie. Justement, la plaignante n’a pas été traitée de la même façon. De grandes précautions ont été prises par la police pour sauvegarder, à juste titre, son anonymat et la préserver des medias. En face, DSK est publiquement humilié et conduit menotté et sous l’œil des caméras dans la pire des prisons américaines avant même que quiconque n’ait entendu le moindre mot d’explication de ce dernier, sauf qu’il plaide une relation consentie. Quel sentiment a pu guider la juge américaine qui a refusé la mise en liberté sous caution avant le procès ? N’oublions pas que ces juges sont élus et qu’il est bon pour leur notoriété personnelle, d’accrocher à leur tableau de chasse un des hommes les plus important de la planète ! L’indignation de Bernard Henry-Lévy et de Robert Badinter est symptomatique du fait que la justice américaine n’est pas sans reproche. Espérons que notre pays soit préservé d’une telle justice. Une justice où l’inculpé ne peut avoir une défense sans beaucoup d’argent, une justice où le procureur n’est pas tenu de prendre en compte des indices d’innocence s’il en découvre au cours de son enquête. Tout cela étant dit, on ne peut cependant s’empêcher de penser que, si la culpabilité de DSK est prouvée un jour, la France sera passée à côté d’un véritable danger en portant à la charge suprême un personnage capable du pire.

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