25 septembre 2011

La seconde mort d’Einstein ?

Une expérience de physique (Opéra) sur la plus étrange des particules élémentaires, le neutrino, semble avoir mis en évidence des particules de ce type se déplaçant (un peu) plus vite que la lumière. A peine les premiers résultats de cette expérience étaient-ils dévoilés qu’aussitôt les médias étaient saturés de scoop annonçant la mort de la théorie de la relativité générale !! Comme souvent, on s’aperçoit que les journalistes sont plus attirés par le sensationnel que par la vérité, pressés qu’ils sont d’être les premiers à annoncer un fait surprenant ou scandaleux. Tout d’abord, la vitesse limite est un concept de la Relativité Restreinte et non de la Relativité Générale. Elle attribue à la lumière (aux photons) la propriété de se déplacer avec une vitesse limite, mesurée aujourd’hui jusqu’à la douzième décimale. Elle énonce, de plus, l’équivalence entre la masse et l’énergie (E = mc2). La théorie de la Relativité Générale explique comment la matière agit sur la géométrie de l’espace-temps, cette géométrie agissant en retour sur le comportement cinétique de la matière. Dans les commentaires sur cette expérience, les physiciens sont beaucoup plus prudents (on les comprend) que les journalistes. Car l’expérience est extrêmement complexe et les résultats extrêmement surprenants. En effet, les neutrinos n’interagissent pas avec la matière d’où la difficulté de faire des expériences mettant en jeu ces particules. L’écart extrêmement faible mesuré (60 nanosecondes sur une distance de 730 km) se trouve peut-être dans la marge d’erreur de l’expérience, bien que les premières vérifications semblent indiquer le contraire. Si le résultat de l’expérience se confirmait, les explications possibles pourraient être les suivantes : 1 - on s’est trompé sur la vitesse limite qui n’est pas celle du photon. La relativité restreinte parle de vitesse limite attribuée aux photons, c’est-à-dire à la lumière, parce que ces particules sont les seules à ne pas avoir de masse. Ce qui n’est pas le cas des neutrinos puisque le neutrino électronique le plus « léger » a une masse de l’ordre de 10 eV, valeur très faible mais non nulle (en comparaison, le proton a une masse de 938 MeV). L’existence d’une vitesse limite n’est pas remise en cause. Ce qui pourrait l’être, c’est de l’attribuer à la lumière. Elle serait alors celle d’une autre particule que le photon, mais laquelle ? 2 - les neutrinos ont trouvé des raccourcis dans des dimensions supplémentaires. La théorie des supercordes, qui tente de rendre compatible la relativité générale et la physique quantique en unifiant les quatre forces fondamentales de la physique (nucléaires faible et forte, électromagnétique, gravitation), fait en effet intervenir des dimensions d’espace supplémentaires aux trois que nous connaissons parce que nous les percevons. Ces dimensions supplémentaires seraient enroulées sur elles-mêmes et seraient invisibles car le rayon de l’enroulement serait de dimension de l’ordre de la distance de Planck (10-35 m). Ces neutrinos étranges pourraient « emprunter » ces dimensions supplémentaires pour y trouver des « raccourcis ». Ainsi, ce serait le premier indice de l’existence d’une théorie globale unifiant relativité et physique quantique, c’est-à-dire les comportements des mondes macroscopique et subatomique. 3 - le concept de vitesse limite n’est pas correct, ce qui serait la plus grave remise en cause de la Relativité Restreinte. Quoi qu’il en soit, cette expérience peut être le début d’un renouveau dans la physique théorique. Est-on en attente d’un second big-bang ?

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