07 septembre 2012

La morale laïque

A peine le ministre de l’Education Nationale a-t-il évoqué l’introduction de cours de morale dans l’enseignement que le monde des intellectuels de tous bords et le monde des enseignants s’agitent « de façon brouillonne dans le filet des concepts admis ». Les uns ratiocinent sur le sens des mots, les autres se braquent – comme ils en ont l’habitude – contre tout changement de l’enseignement. A ce concert de critiques s’ajoute celui des syndicats de parents d’élèves qui s’insurgent que le ministre ne leur ait pas demandé leur autorisation préalable avant de faire cette annonce. Certes, les parents ont un rôle majeur dans l’enseignement de la morale qui passe, en priorité, par leur propre comportement. Il n’appartient pas au ministre de l’Education Nationale de dicter aux parents le rôle qu’ils doivent avoir auprès de leurs enfants dans ce domaine. Les critiques mélangent sans précaution les concepts de morale, d’éthique, de civisme, de discipline et tentent de nous faire croire que nous assistons à une révolution. On oublie que, déjà dans les années 50, existait en classes terminales un cours de philosophie qui comportait deux grandes parties : la logique et la morale dont le caractère laïque ne faisait aucun doute. Il existe déjà, disent certains, des cours d’instruction civique, confondant l’enseignement du fonctionnement des institutions et l’enseignement des comportements en société. La violence à l’école (et ailleurs) est, pourtant, le signe évident qu’il devient urgent de faire comprendre aux enfants qu’il existe des comportements inadmissibles lorsqu’on appartient à une communauté. Et si cette violence existe, c’est aussi le signe qu’il y a défection des parents dans ce domaine. Et l’on touche du doigt un problème que les cours de morale ne sauront résoudre : celui de la continuité entre la morale à l’école et dans la famille. Dès que l’on évoque les enfants violents ou délinquants, on entend dire qu’il ne s’agit que d’une très grande minorité qui ne justifie pas que l’on traite tous les enfants de la même façon. C’est oublier qu’il suffit de quelques uns pour détériorer la vie de la majorité. Mille voyous suffisent à rendre insupportable la vie des vingt mille habitants des quartiers sensibles de Marseille ou d’Amiens. L’école est une micro-société où les enfants se socialisent. Il est donc naturel que l’école apprenne à ces enfants les règles du comportement en société. Laïque cette morale ? Mille fois oui. Il ne s’agit pas, en effet, d’inculquer aux enfants une morale qui explique la conduite à suivre pour gagner un quelconque et hypothétique paradis, peuplé ou non de vierges, en respectant des préceptes inscrits dans le Livre, mais de leur expliquer les règles d’un comportement civil en société. Il s’agit d’un complément logique à l’instruction civique. Cette dernière décrit les droits du citoyen dans le cadre d’institutions, la morale laïque doit expliquer les devoirs du même citoyen dans le cadre d’une vie en société. Mais aujourd’hui l’école fait trop de choses. Les cours sur le code de la route ou de cuisine par exemple n’ont rien à faire dans cette école. Faisons de la place pour l’apprentissage de la morale, autrement important. Et formons les enseignants pour assurer le succès d’une transmission effective de la morale laïque entre l’enseignant et l’élève.

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