03 décembre 2012

Florange ou l’impasse

Le ministre du Redressement productif et les syndicats se débattent furieusement pour « sauver » les hauts fourneaux de Florange. Si l’attitude des syndicats se comprend et se justifie par la défense de l’emploi, l’attitude du représentant de l’Etat est incompréhensible tant sur le plan économique que sur le plan de la méthode. En effet, depuis plus de deux ans, les deux hauts fourneaux de Florange ne fonctionnent plus sans que, pour autant, la demande d’acier n’en ait souffert. Il s’agit donc bien là d’une surcapacité. Il n’y a là rien d’étonnant, compte tenu de la récession de l’industrie automobile européenne (de l’ordre de 20% en 5 ans), mise à part l’industrie allemande centrée sur les voitures de luxe. De plus, ces hauts fourneaux ont été implantés dans la proximité historique du charbon et du minerai de fer lorrains lorsque ces derniers étaient une source énergétique et de matières premières importantes. Or, aujourd’hui, l’exploitation du charbon et du minerai de fer en France n’existe plus, ces derniers étant importés et transitant par les ports. L’emplacement de ces hauts fourneaux, loin de tout port, est devenu inadéquat. Les derniers hauts fourneaux français sont situés à Fos-sur-Mer et à Dunkerque. Ainsi, l’Etat menace de nationaliser une usine qui ne sert plus à rien. C’est vraisemblablement la véritable raison qui a fait reculer le gouvernement, quitte à créer une palinodie supplémentaire en son sein. Le ministre du Redressement productif, après quelques discours populistes auprès des syndicats et injurieux envers un des plus gros sidérurgistes employant 20.000 personnes en France (dont Dunkerque et Fos-sur Mer), a été obligé d’avaler la couleuvre du renoncement. On peut se demander pourquoi le Premier Ministre a laissé son Ministre du Redressement productif s’enliser dans une situation dont il connaissait l’impasse et se lancer dans des annonces tonitruantes et sans réel fondement, exactement la méthode employée par N. Sarkozy (Gandrange). Que n’aurait-on dit si un gouvernement étranger s’était permis de déclarer : « On ne veut plus de Renault dans notre pays » ! Il n’était d’ailleurs pas dit que Bruxelles eut accepté ce rachat qui risquait d’apparaitre comme une subvention à la sidérurgie française. Faire de la nationalisation une arme de dissuasion est un contresens inadmissible de la part d’un ministre du gouvernement. Une nationalisation relève d’une stratégie économique ou politique, mais n’est jamais une intervention ponctuelle menaçante faite pour régler un problème purement local. L’éventuelle nationalisation de Florange était une opération politicienne ne relevant d’aucune stratégie nationale, à l’inverse des nationalisations réalisées par de Gaulle (stratégie de redressement économique), par Mitterrand (stratégie de politique nationale aux relents dogmatiques), par Sarkozy (stratégie de développement du rail en France), ou encore par Obama (stratégie de soutien à une industrie vitale pour les USA en phase d’effondrement). La lutte actuelle et désespérée des syndicats locaux rappelle étrangement celle des mêmes syndicats lors de la fermeture des charbonnages, qui n’a pu empêcher l’inévitable. Les hauts fourneaux de Florange ne redémarreront jamais et le projet Uclos (captation du CO2), qui est encore dans les limbes, ne saura éviter cet aboutissement logique.

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