25 janvier 2010

Désobéissance

La peur du changement est le propre de l’espèce humaine. Toute modification exogène de l’organisation socio-économique provoque une crainte qui génère automatiquement des résistances. Cette constatation se révèle vraie dans toutes les corporations qu’elles soient publiques ou privées. Les médias sont riches des évocations de conflits au sein des entreprises ou de l’administration, nés d’une volonté managériale de modification de l’organisation. L’Éducation Nationale est exemplaire en la matière. Les enseignants se sont toujours élevés contre toute tentative de changement pédagogique ou organisationnel de l’Éducation Nationale. Pratiquement tous leurs ministres ont dû abandonner leur projet, voire démissionner de leur fonction. Le projet actuel d’évolution de l’enseignement primaire n’échappe pas à cette malédiction. Actuellement, environ 17% des enfants entrant dans l’enseignement secondaire ne maîtrisent ni l’écriture ni la lecture. Devant ce grave constat d’échec, le Ministère de l’Éducation Nationale a proposé des orientations pédagogiques pour l’école maternelle et pour le cycle primaire. Ces propositions ont immédiatement suscité des réactions nombreuses et négatives du corps enseignant. Et, au sein de cette corporation, a vu le jour une catégorie plus radicale que les autres et qui s’est nommée par le néologisme des « désobéisseurs », mot inexistant dans la langue française, ce qui est un comble pour des enseignants. Ils auraient pu choisir bien d’autres mots : les insoumis, les mutins, les rebelles, les résistants, les révoltés, les opposants, etc … Mais là n’est pas le centre du problème. Ces enseignants refusent d’appliquer les directives du ministère dont ils dépendent et prétendent entrer « en résistance pédagogique ». Ce sont pourtant des fonctionnaires d’État. Dans toute entreprise, un salarié qui refuse d’appliquer les consignes de ses managers commet une faute grave qui débouche sur le licenciement. Ce risque n’existe pas pour un fonctionnaire d’État. Cette insoumission est donc sans risque. Elle est donc sans courage, sauf à ce que le fonctionnaire démissionne. Mais aucun d’entre eux n’a fait ce choix malgré les sanctions financières justifiées dont il a fait l’objet. On peut être réservé quant à l’application de ces sanctions, mais lorsque l’on entend les justifications données par les porte-parole de ces enseignants, on ne peut qu’approuver l’existence de ces sanctions. En effet, on reste confondu lorsque l’on entend qu’un des reproches faits par ces professeurs en parlant des enfants est « d’en avoir fait des élèves et non des enfants » ! Il y a là une grave confusion entre le rôle de l’école et de la famille, entre la transmission du savoir et l’éducation. Laisser les règles s’établir peu à peu par les enfants eux-mêmes est également la doctrine mise en œuvre par ces
« désobéisseurs ». L’enseignant n’enseigne plus, il n’est plus qu’un simple animateur ! On est bien loin de ce que la société demande à l’Education Nationale et on frémit du risque que ces hommes et femmes font courir aux enfants. La liberté pédagogique est une nécessité, mais celle-ci ne peut aller jusqu’à la négation du rôle de l’enseignant. La justification ultime avancée par les « désobéisseurs » est qu’il est justifié qu’un enseignant ne respecte pas les directives de son ministère pour ne pas être « rabaissé » au rang d’automate. Lorsque l’on sait que, par bonheur, ces « désobéisseurs » ne représentent que 1% du corps enseignant public (ce qui fait quand même près de 7000 personnes), il est alors insultant pour les 99% restant d’être traités « d’automates » par leurs confrères, c’est-à-dire d’individus sans conscience ni intelligence. Cette « résistance » pédagogique n’est-elle pas uniquement l’expression d’un rejet compulsif d’un gouvernement de droite ? La politique n’a-t-elle pas abusivement remplacé le devoir pédagogique ? Alors, messieurs les « désobéisseurs », ayez le courage de démissionner ! C’est la seule façon de donner une certaine crédibilité à vos discours.

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