22 janvier 2011

La VI ?

L’anniversaire de la disparition de F.Mitterrand a donné lieu à une bousculade quelque peu burlesque des principaux caciques du Parti Socialiste. Ils sont tous (ou presque) venus se bousculer autour de la tombe présidentielle pour rendre un hommage appuyé au président défunt et se livrer au petit jeu de « plus Mitterrandiste que moi, tu meurs » en revendiquant l’héritage, oubliant volontairement « le droit d’inventaire » ou le « lui c’est lui et moi c’est moi » ! Les oubliettes de l’Histoire ont ainsi accueilli les critiques anciennes adressées à F. Mitterrand par ceux qui sont devenus ses plus ardents thuriféraires. La perspective des futures élections présidentielles est passée par là, F.Mitterrand devenant la référence incontournable de tous les nombreux candidats socialistes qui ont fait semblant d’oublier que ce dernier a pronostiqué, à juste titre semble-t-il, être « le dernier des grands présidents de la Ve République » ! La perte de mémoire sélective n’est d’ailleurs pas l’apanage des socialistes actuels. Le premier atteint fut F.Mitterrand lui-même. En effet, rappelons-nous ce qu’il écrivait dans son ouvrage « Le coup d’État permanent » en 1964. Faisant référence aux institutions de la Ve République, ne parlait-il pas de « l’effritement progressif des institutions, de la disparition du contrôle parlementaire, du retour en force de la justice d’exception » ? N’ajoutait-il pas que «toutes les issues sont déjà bouchées par où la liberté voudrait un jour passer » ? Ne s’insurgeait-il pas devant « le pouvoir d’un seul (qui) insulte le peuple de citoyens » ? Et pourtant, avec quel plaisir il s’est installé dans le costume de Président de la Ve République, oubliant tous ses griefs et utilisant avec jouissance les pouvoirs que lui donnait la Constitution. Il ne lui est pas venu à l’esprit de la modifier pour faire naître la VIe République. Il a exercé pleinement le pouvoir, malgré l’insulte au peuple de citoyens ! C’est pourquoi il ne faut pas prendre au sérieux l’annonce de certains candidats à la candidature socialiste qui, poussés par la nécessité de se démarquer pour être visible, croit bienvenue de s’engager à faire naître une nouvelle République. Cette annonce se veut le seul moyen pour donner davantage de pouvoir au Parlement. Cette revendication est avancée par les partis d’opposition qui rêvent de conquérir le pouvoir et, en particulier, celui de défaire les gouvernements … comme pendant la IVe. Ceci fait craindre que, si VIe République il y a, la « guéguerre » des partis ne reprenne comme au temps de la IVe et que l’instabilité gouvernementale mortelle pour la France ne renaisse de ses cendres. Mais rassurons-nous et faisons un pari. Si un socialiste atteint la magistrature suprême, il se sentira soudainement, comme son illustre prédécesseur, confortablement installé dans les habits de la Constitution actuelle et ne la changera pas ! En 1976, avant le règne de F.Mitterrand et dans « La vérité guide leurs pas », Pierre Mendès France faisait les prédictions suivantes : « On peut se demander ce que va devenir un système conçu et modelé pour et par un homme… Les assemblées chercheront inévitablement à retrouver plus de droits … Aucun précédent historique ne permet de croire que le régime fonctionnera dans l’avenir sans de très larges modifications ». Trente-cinq ans plus tard, la Constitution est toujours là, l’alternance s’est produite, la cohabitation a fonctionné, le régime a fonctionné sans changement. Malgré l’espoir de certains socialistes, le régime des partis ne reviendra pas pour la raison simple que le futur Président, quel qu’il soit, jugera que la Constitution actuelle est la meilleure garante de son appétit de pouvoir !

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