08 novembre 2008

Le nouveau péril jaune

La guerre entre les grandes puissances a changé de protagonistes et de nature. Ce n’est plus à la guerre froide entre les États-Unis et l’URSS à laquelle nous assistons, mais à une confrontation d’une autre nature, tout aussi réelle, entre les mêmes États-Unis et la Chine. Sur le plan politique, ces deux États sont en opposition sur les relations avec le Soudan (le Darfour), l’Iran, la Corée du Nord, autant de pays soutenus par la Chine et combattus par les USA. Certains courants conservateurs américains tentent de mettre en place une stratégie d’endiguement (le containment) de la Chine pour empêcher que celle-ci ne devienne une puissance concurrente des États-Unis menaçant de mettre fin leur l’hégémonie. La confrontation politique est soutendue par une lutte sans merci pour l’accès aux matières premières. La Chine, sans aucun scrupule, alimente et soutient tout pays ou toute dictature susceptible de lui fournir les matières premières dont elle a un besoin vital. Elle devient peu à peu le principal concurrent des Américains en ce qui concerne l’approvisionnement pétrolier. C’est pourquoi chacun des deux pays est en train de mettre en place une stratégie destinée à lui permettre de sécuriser et diversifier ses sources d’approvisionnement pétrolier. Ainsi l’Afrique est devenue le champs-clos d’un affrontement sino-américain dont on parle peu mais qui est sans pitié. La Chine est, en effet, en train de prendre pieds au Soudan, en Angola ou au Gabon. On assiste également à un spectaculaire rapprochement avec les pays d’Amérique latine, sphère d’influence privilégiée et historique des États-Unis.
Chaque pays cherche à développer ses atouts concurrentiels. Celui de la Chine est essentiellement les bas coûts de fabrication. Tout est bon pour maintenir ces coûts au niveau le plus faible possible afin d’envahir les marchés occidentaux et notamment américains (pour compenser les engagements de rachat de la dette extravagante des USA que la crise économique actuelle ne fera qu’aggraver), d’où des manipulations monétaires, des pratiques frauduleuses et dangereuses, comme l’a démontré l’affaire du lait contaminé (et d’autres produits alimentaires) et des faux médicaments qui inondent l’Afrique. Mais, comme des frères ennemis, ces deux pays sont indissociables, chacun d’eux ayant un besoin vital de l’autre. Les USA ont besoin de la Chine pour faire perdurer leur formidable déficit et racheter leur dette colossale en lui vendant des bons du Trésor. La Chine a besoin du marché américain pour obtenir les devises nécessaires à ce rachat et à son développement. Sur le plan économique, on peut dire que les relations Chine/ États-Unis sont tellement imbriquées les unes dans les autres qu’on peut aujourd’hui parler d’interdépendance. Nous allons assister, durant les prochaines années, à un rattrapage économique de la Chine qui va profiter du déclin relatif, mais déjà en cours, des USA. C’est, en effet, la première fois depuis la crise de 1929 que les USA entrent en récession économique. Compte tenu de l’interdépendance objective des deux pays, il faut s’attendre à ce que la Chine connaisse également de fortes difficultés économiques et sociales dans le court et moyen terme. Le monde entier en sera fragilisé.

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