29 avril 2010

On croit rêver !!

Le feu est en train de prendre dans l’ensemble des économies européennes. La Grèce est au bord du dépôt de bilan, qui entraînera dans sa chute le Portugal, l’Espagne, l’Irlande, l’Italie puis la France. L’Euro, et donc l’Europe, est en danger d’éclatement. Pendant ce temps, le Président français est parti inaugurer une exposition en Chine avec quelques détours touristiques qui l’occupera pendant trois jours. Le Parti socialiste, de son côté, concocte son projet de gouvernement centré, nous dit-il, sur le bonheur (sic !). La crise qui s’annonce promet du sang et des larmes, mais Martine Aubry nous parle d’une société française du bonheur ! Elle voudrait nous dire : « Dormez, braves gens », elle ne s’y prendrait pas autrement. En Allemagne, les rodomontades de la Chancelière n’arrivent pas à cacher que ses seules préoccupations sont égoïstes, nationales et électorales. Cerise sur le gâteau, le Conseil de l’Europe s’occupe d’un sujet fondamental au milieu de la tourmente : faut-il oui ou non supprimer la fessée. Il n’y a pas de doute, nous pouvons être rassurés : les politiques qui nous gouvernent s’occupent décidément de choses sérieuses ! Bandes de clowns !!

27 avril 2010

N’ayez pas peur ?

« N’ayez pas peur … Ouvrez les frontières … » s’exclame Jean-Paul II le 22 Octobre 1978 lors de son premier discours pontifical, donnant ainsi aux Polonais de Solidarnosc le courage de résister au pouvoir communiste. Cette phrase a fait le tour du monde. Son acception courante est une exhortation à ne pas craindre ses adversaires ou ses ennemis. Et cela est une erreur. Nous vivons une époque et dans un monde où nous devons avoir peur car la compréhension du fonctionnement de ce dernier nous échappe de plus en plus. L’exhortation papale ne peut être acceptée qu’en la complétant par la condition indispensable « …si vous avez identifié et si vous connaissez votre adversaire ». Sans cette connaissance et cette compréhension indispensables, nous ne pouvons qu’avoir peur. Or, aujourd’hui, la compréhension du monde devient pratiquement impossible. Avant que l’homme ne vienne la perturber, la nature a toujours fonctionné grâce à des processus complexes mais déterministes. Le but unique de ces processus, moteur de l’évolution, est de doter les espèces vivantes des moyens de protection contre leur environnement pour permettre la reproduction. Avant l’apparition et le développement anarchique de l’espèce humaine, seuls ces processus déterministes organisaient le fonctionnement du monde. Par exemple, pour éviter la destruction de leurs œufs par les prédateurs, les mammifères ont « inventé » la gestation « in vivo ». De même, les plantes à fleurs ont multiplié les moyens d’attirer les insectes pollinisateurs par une profusion de couleurs, de formes et de parfums. Les dinosaures ont « inventé » la course aux armements, les herbivores devenant de plus en plus gigantesques pour intimider leurs prédateurs carnassiers, ces derniers répliquant en devenant eux aussi de plus en plus grands. Mais l’apparition des hommes a tout changé. Ces derniers, en sophistiquant de plus en plus leurs processus de fonctionnement et en perturbant ceux de la nature, ont introduit le chaos son sein. La complexité du monde est, non seulement, devenue plus grande mais elle repose maintenant sur des processus chaotiques. Et ceux-là sont caractérisés par le fait qu’il est presque impossible de prévoir le résultat d’une modification ou d’un dysfonctionnement de l’un d’entre eux. De plus, un petit dysfonctionnement peut provoquer un grand désordre. Cette première décennie du XXI ème siècle nous en a apporté plus d’une preuve. Ainsi, la faillite de la banque américaine Lehman Brothers en 2008, que personne n’avait prévue, a failli provoquer l’effondrement du système bancaire de la planète tout entière. L’éruption du volcan islandais Eyjafjöll a entraîné l’arrêt du transport aérien sur la moitié de la planète, provoquant des pertes économiques encore aujourd’hui difficiles à estime, mais dépassant plusieurs milliards de dollars. Le laxisme et le mensonge du gouvernement Grec dans sa gestion économique provoquent de tels remous dans l’économie mondiale que l’Euro et l’Europe elle-même sont en danger d’éclatement. Qui, aujourd’hui, peut dire quelles seraient les conséquences d’une faillite de la Grèce et de sa sortie du système monétaire de l’Euro ? Personne. On voit bien qu’actuellement tout dysfonctionnement surprend par l’ampleur de ses conséquences et que, jamais, nous n’y sommes préparés. Le lent réchauffement atmosphérique produit des effets majeurs sur le continent Antarctique, notamment sur les plateformes de la péninsule qui sont en train de se disloquer sous nos yeux. Nous sommes bien au sein d’un système chaotique qui n’a plus rien de déterministe. Et c’est de cela dont nous devons avoir peur. Si nous voulons éviter de vivre dans la peur, il nous faudra être sérieusement à l’écoute de notre monde pour discerner et interpréter les signaux faibles (il y a longtemps que l’on aurait dû s’apercevoir que la Grèce jouait au poker menteur), annonciateurs avancés de dysfonctionnements, et d’en envisager le plus en amont possible les conséquences. N’ayez pas peur, si vous avez identifié et si vous connaissez votre adversaire. C’est l’unique façon de vivre dans une société qui présenterait une qualité extrêmement précieuse et qu’elle n’a pas aujourd’hui : la capacité d’une adaptation préventive et anticipée. Vous êtes inquiet, mais n’ayez pas peur … le pire est à venir.

24 avril 2010

Care : un tour d’illusionniste

On sait que le marketing politique est devenu incontournable. En ce domaine et à l’approche des prochaines élections présidentielles, l’imagination devient débordante. Après « l’ordre juste », voici le « Care » ! Qu’est-ce ? C’est un nouveau concept proposé à Martine Aubry par des esprits malins et qui l’a aussitôt adopté en le déclinant dans son programme présidentiel en gestation. Pour donner à une vielle idée une apparence de nouveauté, il n’est rien de mieux que d’utiliser un néologisme à l’allure savante. « Care » est un mot anglais, utilisé par les anglo-saxons pour définir leur politique de solidarité et de santé (Health care). Dès lors que l’on donne la traduction du terme, viennent à l’esprit deux réflexions. La première est de se demander pourquoi on ne garde pas le mot français de solidarité (le souci des autres) ? La publicité est riche de concepts fumeux à l’aspect faussement scientifique dont on ne sait s’il s’agit de calembredaines ou de carabistouilles. La pauvreté de la nouveauté se cache derrière un vocabulaire pompeux cherchant à faire illusion. L’invention du mot n’est pas nouvelle. Certains gourous du conseil aux entreprises ont fait fortune avec un mot. Le plus bel exemple est « Le prix de l’Excellence », inventé par T. Peters, pour évoquer ce que doit faire une entreprise pour être plus performante que ses concurrentes. De même, le « reengineering » de Michael Hammer. Il en est manifestement de même en politique, ce qui ne surprendra personne. La seconde réflexion est de se désoler de la pauvreté de l’imagination en politique. Sous le mot, se cache en fait tout un cortège d’évidences.
« Care » veut dire, d’après ses inventeurs (?), le souci de fournir à chacun un salaire minimum, un accès aux soins correct, la possibilité de se loger convenablement, bref tout ce que peut espérer un citoyen pour mener une vie acceptable. On ne saurait être plus général et, donc, moins original. C’est justement le rôle du mot que de cacher ce manque d’originalité. La pêche aux rêveurs est à nouveau ouverte. La réalité est, cependant, tout autre. Rien ne sera possible sans une réindustrialisation de la France avec un développement urgent des exportations, sans une réduction drastique de la dette qui imposera de très gros sacrifices à tous les citoyens. Mais quel candidat aux futures élections présidentielles aura le courage de tenir un tel discours ? Il devient pourtant urgent que les politiques abandonnent la publicité partisane pour faire, enfin, de la stratégie politique, c’est-à-dire qu’ils abandonnent leurs petites vues à court terme pour des analyses et des choix engageant le long terme. Quand en auront-ils enfin le courage ?

21 avril 2010

Coupables et irresponsables

La grève de certains conducteurs et contrôleurs de la SNCF perdure maintenant depuis dix jours. Les citoyens, privés des moyens de transport aériens pour cause d’éruption volcanique, sont également privés, pour certains d’entre eux, de trains et se retrouvent ainsi dans des conditions de plus en plus difficiles à gérer. Car, si la cause de la grève à la SNCF est le projet de réorganisation de l’activité Fret, c’est bien l’activité Voyageurs qui est la plus perturbée par ce mouvement. Cela démontre clairement la volonté de nuire des syndicats qui portent leur action non pas sur l’activité concernée mais sur celle où le maximum de dommages sera obtenu. Le Fret est une activité en perte constante depuis plus de quinze ans. Chaque fois que le management de l’entreprise a voulu réformer l’organisation de cette activité, les syndicats s’y sont violemment opposés, supprimant ainsi toute chance au Fret d’être une activité viable face à la concurrence du transport routier. L’activité « wagons isolés » du Fret ne pourra jamais être concurrentiel en face des camions, plus souples, plus rapides, plus fiables, moins chers. Le transport routier fait du porte-à-porte en flux tendus, alors que les wagons dit isolés errent de façon erratique de gare de triage en gare de triage où ils dorment pendant un temps indéterminé pendant que leur destinataire se perd en conjecture sur leur date d’arrivée. C’est donc une évidence que cette activité doit disparaître et que le Fret doit recentrer son métier sur les transports de masse par trains entiers dans des couloirs ferroviaires dédiés, développer le transport des poids lourds et des containeurs. Aujourd’hui, une seule autoroute ferroviaire existe en France, reliant le Luxembourg à Perpignan. C’est donc à une transformation complète de son activité Fret que la SNCF est confrontée. Et c’est à cette transformation incontournable que s’opposent les syndicats, entraînés de plus dans une rivalité interne jusqu’au-boutiste et complètement absurde motivée par l’approche des prochaines élections syndicales. Ils portent ainsi la responsabilité du déficit chronique du Fret qui pèse lourdement sur la SNCF tout entière et font preuve d’une irresponsabilité majeure dans leur acharnement à poursuivre une grève complètement injustifiable. Aucune révolte de Canuts n’a jamais pu empêcher le développement du métier à tisser…

20 avril 2010

Nous sommes tous dangereux

Il y a quelque temps, j’évoquais certaines idées et réflexions sur les notions de pénibilité et de dangerosité du travail, montrant combien ces concepts étaient difficilement opératoires (titre de l’article : Un impossible concept – 31/03/2008). Or, aujourd’hui, la notion de dangerosité fait son apparition dans le monde de la justice à qui l’on demande de la prendre en compte avant de décider de la libération, anticipée ou non, d’un détenu. Apporter la preuve que quelqu’un est coupable est, en principe, totalement objectif puisque s’appuyant sur la possibilité de la preuve. Mais comment prouver qu’un individu est dangereux ? L’avis d’un expert psychiatrique peut-il être considéré comme une preuve ? Un juge ne peut que très difficilement réfuter une preuve objective, mais il lui est tout-à-fait possible de refuser l’avis d’un expert dont l’infaillibilité est utopique. Possible, mais sur quels critères ? Les jugements sur lesquels s’appuie un expert pour formuler son avis ne peuvent évidemment faire partie d’une liste exhaustive incorporée à la loi. Ce qui veut dire que la
« science » (?) qui s’appelle la criminologie se substitue à la loi et que le juge devra s’en remettre à elle. Est-ce raisonnable ? Ne sommes-nous pas tous suspectés d’être dangereux ? L’extension de la vidéosurveillance dans tout l’espace public ne montre-t-elle pas que tout individu mérite d’être contrôlé parce qu’intrinsèquement dangereux ? Significatif est, d’ailleurs, le glissement sémantique du vocabulaire puisque la vidéosurveillance est devenue la vidéo protection. Il ne s’agit pas de surveiller mais de protéger contre le danger que représente tout individu. Déjà, la possible et actuelle localisation de tout propriétaire de téléphone portable permet de suivre ce dernier presque pas à pas. Bientôt, chacun sera suivi en permanence, rendant ainsi possible la
« traçabilité » du citoyen comme n’importe quelle marchandise. Dans ce mécanisme, il est visible que le Ministère de l’Intérieur prend le pas sur celui de la Justice, que le policier devient plus important que le juge, que le droit cède le pas au soupçon. Dans une enquête, le juge d’instruction honnête (est-ce un pléonasme ?) se doit de mener son enquête à charge et à décharge en toute objectivité. Le projet de suppression du juge d’instruction prévoit de donner l’enquête à charge au Procureur de la République, laissant à l’avocat de la Défense le soin de mener l’enquête à décharge. On voit immédiatement le danger. Tous les prévenus n’auront pas les moyens de recourir aux services d’un avocat autre que commis d’office, instituant ainsi une « justice à deux vitesse ». D’autre part, puisque le Parquet dépend hiérarchiquement du Ministre de la Justice, donc du Gouvernement, l’impartialité du procureur n’est pas garantie lors d’affaires impliquant des personnalités gouvernementales ou proches de celles-ci. Ce risque s’accompagne d’ailleurs de la tendance à la dépénalisation des affaires avec l’introduction de la déclaration de culpabilité qui supprimerait le passage devant le Tribunal pénal. La suppression du juge d’instruction, si elle a lieu, doit nécessairement s’accompagner de l’indépendance du Parquet vis-à-vis du Gouvernement. La nomination du Procureur ne doit pas être le fait du Ministère de la Justice, mais doit relever de la responsabilité du peuple c’est-à-dire de ses représentants au Parlement.

02 avril 2010

Grèves illicites

Les syndicats ont déclenché une grève à la SNCF dont le motif est le refus des projets de réorganisation de l’entreprise. Ils ont également déclenché une grève à la SNCM dont le motif est le refus de la concurrence italienne sur les lignes maritimes vers la Corse. Deux exemples qui démontrent une dérive du comportement syndical français qui, au nom de la défense des intérêts des salariés, s’oppose de manière illégitime au rôle fondamental du management dans le premier cas, à la liberté d’entreprendre en Europe dans le second cas. Ce que l’on attend du management d’une entreprise est d’analyser, pratiquement chaque jour, l’évolution de son environnement concurrentiel pour adapter son fonctionnement afin d’être plus efficace que ses concurrents et pour, au bout du compte, préserver ses emplois. C’est ce que fait le management de la SNCF depuis toujours. C’est, en effet, en examinant le marché aérien métropolitain qu’elle a lancé un vaste programme d’études et de mise en œuvre de trains à grande vitesse avec le succès que l’on connaît. Le Fret est, peu à peu, devenu incapable de répondre aux besoins des clients industriels de la SNCF parce que manquant de fiabilité, de rapidité, de souplesse. Les syndicats se sont toujours farouchement opposés aux réorganisations nécessaires du Fret, ce qui a pour conséquence de faire perdre, depuis des années, des parts de marché à ce dernier, aujourd’hui au profit des transporteurs routiers, bientôt au profit de concurrents directs européens. Aujourd’hui, les syndicats s’opposent, une fois de plus, aux projets organisationnels de la SNCF et déclenche une grève parfaitement illégitime. La grève de la SNCM est encore plus révoltante car elle veut s’opposer au droit fondamental d’entreprise. L’Europe des affaires et des entreprises est une réalité. Tout entrepreneur a le droit d’exercer ses activités n’importe où, dans l’espace européen. Il est donc naturel, légitime et légal qu’un entrepreneur maritime italien cherche à exercer son activité en méditerranée en général et entre la France et la Corse en particulier. Refuser cette concurrence est parfaitement contradictoire avec la liberté d’entreprendre et s’appelle du protectionnisme. La grève de la SNCM, dont l’objet est de protester contre la concurrence italienne, est donc une stupidité parfaitement réactionnaire. Il est vrai que la CGT-Marseille n’en est pas à son premier forfait, s’étant opposé à la concurrence de Corsica Ferries en utilisant la piraterie maritime en 2005. Décidément, il serait temps que les syndicats français fassent leur révolution culturelle. Bien entendu, ces deux grèves n’ont rien à voir avec celles des salariés qui protestent à juste titre contre des délocalisations sauvages qui sacrifient sans vergogne leur emploi et leur vie comme s’ils étaient de vulgaires marchandises.

31 mars 2010

Paroles, paroles

« Le ton de l’orateur […], dès que le sujet est grand, doit toujours être sublime » (Buffon).
Voilà un adage que N. Sarkozy ne doit pas connaître. En présence de la future élite américaine au mois de Mars 2010, au sein de l’Université de Columbia, et évoquant le succès de l’obstination du Président américain sur la protection sociale des plus démunis, le Président français a, en effet, tenu un long discours dont voici un court extrait :
« L’idée que ça fasse un débat d’une telle violence que de vouloir que les plus pauvres d’entre vous ne soient pas dans la rue sans un seul centime face à la maladie, excusez-moi, mais nous, ça fait jamais que cinquante ans qu’on a résolu le problème ».
Fasse le ciel qu'aucun auditeur ne comprenne le Français ! Le sabir du Président Français devant l’élite de la jeunesse américaine et les futurs managers des USA laisse sidéré et presque honteux. On attendrait une certaine hauteur et un peu d’élégance dans la langue utilisée par le premier des Français. Peut-on accepter que le Président parle comme un tenancier de bistrot sans se sentir honteux d’être français ? Ajoutons que cette gouaille consistant à évoquer les échanges avec le Président américain en utilisant sans retenue le tutoiement est le signe d’un « m’as-tu vu » insupportable et vulgaire. Décidément, le costume est beaucoup trop grand pour le personnage. Lorsque le général De Gaulle lançait son appel radiophonique du 18 Juin 1940, voilà ce qu’il disait :
« Cette guerre n’est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre n’est pas tranchée par la bataille de France. Toutes les fautes, tous les retards , toutes les souffrances n’empêchent pas qu’il y a, dans l’univers, tous les moyens pour écraser un jour nos ennemis ».
Si l’on croit que Rivarol avait raison en disant que « La parole est la physique expérimentale de l’esprit », alors il y a un « bug » dans celui de N. Sarkozy.

23 mars 2010

Quel avenir ?


Prenons un peu de recul. Les élections régionales sont à peine terminées que le discours politique joue de sa langue de bois préférée. Pour la « majorité » défaite, « nous avons entendu le message des Français », mais on ne sait pas lequel. Pour l’opposition, « les Français ont demandé de changer de politique » mais on ne sait pas pour laquelle. Voilà pour l’analyse. La situation est, pourtant, simple. La France régionale était entièrement rose avant, elle l’est après. Il n’y a, en pratique, aucun changement. Il ne peut donc y avoir de surprise ou de découverte ! Il n’y a que les politiques pour découvrir un nouveau « message ». Aucun d’entre eux ne parlent du vrai problème de la France : celle de son appauvrissement. Depuis deux décennies, la France dépense plus qu’elle ne gagne. La balance commerciale du pays, qui mesure cet appauvrissement, est déficitaire aujourd’hui de près de 5 milliards d’Euros. Depuis plus de 30 ans, les budgets sont déficitaires pour atteindre cette année près de 8% du PIB (adieu les critères de Maastricht !). La dette, qui accumule ces déficits, s'envole vers un sommet depassant 1.500 milliards d’Euros, soit plus de 20.000 € par Français. Les caisses de retraites sont en danger de faillite avec un rapport actifs/retraités qui ne cesse de diminuer, la Sécurité Sociale est en déficit chronique mettant en danger le « modèle social français ». Le pays a une dépense publique qui atteint 53% du PIB. La France compte près de 8 millions de fonctionnaires, soit le quart de la population active alors que la moyenne européenne est de 15%. Depuis 15 ans, les effectifs de fonctionnaires ont augmenté de 35%. Le diagnostic est donc simplissime : la France vit au-dessus de ses moyens. L’ordonnance n’est donc pas compliquée : la France doit dépenser moins et travailler plus et mieux. Et le message que les Français ont envoyé lors de ces dernières élections, caressés dans le sens du poil par les syndicats, est le refus de toute politique d’austérité. Ne pas toucher aux retraites, ne pas augmenter les impôts, refuser toute diminution de fonctionnaires, continuer de réclamer « plus de moyens », tel est le sens de l’opposition au gouvernement qui s’est manifesté dans les bulletins de vote. La solution préconisée ? Il n’y a qu’à « piocher » dans la poche des plus riches, scandaleusement privilégiés. Discours en trompe-l’œil car, en supposant que l’on confisque le salaire et les stock-options de tous les patrons du CAC 40, cela permettrait de distribuer 350 € au 4 millions de Français les plus pauvres. Pas de quoi bouleverser leur niveau de vie ! Ceci veut dire que la suppression du bouclier fiscal peut être un symbole mais sûrement pas une thérapie.
L’indispensable politique de rigueur nécessiterait un minimum de consensus politique pour avoir une chance de réussite. Hélas, nous ne sommes encore qu’à mi-chemin du quinquennat que déjà tout le microcosme politique a le regard tourné (et fasciné !) par les élections présidentielles qui auront lieu dans deux ans. Il est malheureusement prévisible qu’une fois de plus l’intérêt général va succomber sous les assauts des ambitions personnelles qui ne vont pas tarder à se manifester (5 à gauche et 4 à droite). Le récent remaniement ministériel, essentiellement manœuvre politique, n’annonce aucun changement important dans la politique menée jusqu’à aujourd’hui. Il n’y aura pas de rigueur accrue et des réformes partielles qui ne seront pas menées au bout. Les nuages s’accumulent et le ciel s’assombrit.

20 mars 2010

Le monde de l’inutile

Plus que dans une société de consommation, nous vivons dans un monde de l’inutile. À vouloir forcer le citoyen à consommer, à vouloir susciter des besoins artificiels à tout prix, la société est parasitée par une invasion d’inutilités : associations inutiles, recherches inutiles, produits inutiles, compléments alimentaires parfaitement inutiles, livres inutiles, productions soi-disant artistiques inutiles, guerres inutiles, discours inutiles, grèves inutiles, lois inutiles, métiers inutiles, médicaments inutiles, etc …
Cette production effrénée de l’inutile crée un brouillard qui dissimule l’essentiel et détourne les esprits du fondamental. Cela conduit à privilégier la forme sur le fond, comme le démontrent les contestations de tous bords sur tous les sujets aussi futiles soient-ils, le discours électoral qui sombre dans les profondeurs de la médiocrité et de l’absence sidérale d’idées. Les revendications syndicales sont devenues purement catégorielles, sacrifiant toujours l’intérêt général à l’intérêt particulier et corporatiste, et se réduisant à la simplissime exigence de l’augmentation des moyens. Les soi-disant débats d’idées se réduisent à l’anecdotique, à la recherche de la petite phrase à la limite de l’injure, quand ils ne sombrent pas dans une confusion inaudible. Les réunions électorales sont le théâtre de discours qui n’ouvrent aucune réflexion, déroulant un florilège de mots creux que n’importe qui pourrait s’attribuer, se réduisant le plus souvent à la seule critique acerbe de l’adversaire. Là est la source de l’abstention qui ruine le fonctionnement démocratique. La télévision est inondée de séries qui se ressemblent toutes, d’émissions de soi-disant « télé-réalité » totalement artificielles et arrangées par avance, sans aucun intérêt autre que de flatter le peuple dans ce qu’il a de plus médiocre, de séries bâclées, décervelantes et jouées par des gens sans talent aucun. Les librairies sont envahies par d’innombrables ouvrages éphémères de non-écrivains, tout aussi éphémères, qui n’ont d’autres sujets qu’eux-mêmes et qui racontent leur vie dénuée de tout intérêt, mais qui leur permettent de distiller à longueur d’interviews le sacro-saint « Dans mon livre … ». La production musicale propose en permanence des « œuvres » d’une médiocrité confondante et prétentieuse et qui ne durent que le temps, pour la maison d’édition, de faire grossir quelque peu son chiffre d’affaires en jouant des effets de mode qu’elle crée elle-même. La parapharmacie met sur le marché une quantité considérable de crèmes soi-disant miracle et totalement inefficaces, mais profitant de la crédulité imbécile du chaland. Sur les rayons de supermarchés s’alignent des quantités de produits qui sont fondamentalement identiques, parfois en provenance du même producteur, et qui ne diffèrent que par leur présentation, leur prix et leur emplacement dans les rayons. Des salaires faramineux sont distribués aux footballeurs et aux traders, c’est-à-dire à des individus totalement inutiles, quand ils ne sont pas nuisibles, à la société. Nous sommes passés progressivement de la société d’abondance à la société de consommation puis à celle de l’inutile. Il est difficile de dire qu’il s’agit là d’une évolution positive. Dans le même temps, 4 milliards d’êtres humains vivent avec moins de 2$ par jour. Pour ceux-là, même ce qui est indispensable vient à manquer.
Critiquer la société de l’inutile, apanage des pays développés, ne justifie pas pour autant une politique de la décroissance. Comment peut-on souhaiter la décroissance alors que l’humanité comptera bientôt 3 milliards d’êtres humains supplémentaires ? Ceux qui prônent la décroissance font preuve d’un égoïsme démesuré en acceptant que les plus pauvres et les hommes à venir n’aient rien à eux. Pour pouvoir partager, quelle que soit la forme économique que peut prendre ce partage, il faut nécessairement avoir quelque chose à offrir. Les tenants de la décroissance oublient que tout système, social et économique, n’est pas isolé du reste du monde et que ce qui se passe chez nous a obligatoirement des conséquences ailleurs. Vivre dans l’inutile et l’égoïsme serait-il le propre de l’homo-économicus développé ?

18 mars 2010

Les grandes menaces

Les dangers qui menacent les hommes sont nombreux et variés. L’imagination des hommes et leur « hubris » débridé multiplient à l’envi les risques encourus. Mais parmi tous ceux-ci, il en est quatre principaux : la modification climatique, le terrorisme, le monde des nanotechnologies, l’endettement des pays riches et la financiarisation de l’économie.
Tout d’abord, le réchauffement dû à l’effet de serre. Il ne s’agit plus d’un hypothétique danger, les conséquences de l’élévation des températures se manifestant déjà. Les calottes glaciaires disparaissent, monde fragile s’il en est et tellement vital pour la diversité biologique de la planète. Au rythme actuel, les glaces polaires auront totalement disparu entre 2050 et 2080. La disparition de la glace de mer aura de terribles répercussions sur la faune, la fonte de la glace d’eau douce (les glaciers) alimentera la montée du niveau des océans et perturbera la circulation des grands courants marins. D’autres lieux seront affectés par ce réchauffement, en particulier tous les pergélisols, en Alaska et en Russie. Ce milieu contient du CO2 et du méthane dissous qui seront libérés avec le réchauffement du milieu. Le méthane est un gaz à effet de serre dix fois plus nocif que le dioxyde de carbone. Les fonds marins comportent d’immenses quantités d’hydrate de méthane qui deviendra instable avec l’élévation de la température des océans, libérant le méthane. Ces émissions ne feront qu’augmenter l’effet de serre et le réchauffement, ce qui accentuera celui des océans. Ce réchauffement important aura alors une double conséquence : l’élévation du niveau des eaux et la disparition des algues sous-glacières dans les zones polaires. Or, ces algues sont à la base de l’alimentation du plancton, nourriture du krill, lui-même nourriture des grands mammifères qui vont donc disparaître. La disparition des baleines, dont les cadavres servent de nourriture à toute la faune des abysses, entraînera la disparition de cette dernière. Quant à l’élévation du niveau des océans, elle va provoquer des migrations géantes depuis toutes les zones côtières menacées. Déjà Tuvalu et certaines îles du Pacifique sont sur le point de disparaître, chaque phénomène cyclonique inonde de plus en plus les terres du Bengladesh. À cette migration des peuples inondés s’ajoutera celle des populations soumises à une sécheresse de plus en plus grave. Au total, on peut envisager entre 100 et 200 millions de migrants climatiques. Un tel déplacement de population ne pourra avoir lieu sans avoir de terribles conséquences humaines.
Il y a ensuite le terrorisme. Le terrorisme idéologique se développe aujourd’hui sur un terreau confessionnel et civilisationnel. Le prosélytisme dont il fait preuve, basé sur la frustration et la haine, permet d’envisager, à juste titre, une expansion de son implantation et une radicalisation de son action. De nouveaux 11 Novembre sont à craindre. Le terrorisme mafieux, cherchant généralement une justification hypocrite dans le nationalisme, confond, avec moins d’envergure, ses actions avec celles du terrorisme politique. C’est ce que pratiquent les FARC en Colombie, certains indépendantistes corses, l’ETA en Espagne. Enfin, la raréfaction des matières premières non renouvelables va pousser certains pays propriétaires des gisements à exercer un chantage de plus en plus important sur le reste de la planète, chantage relevant du terrorisme d’Etat.
Il existe aune autre menace, celle que constitue la convergence des NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, techniques de l’information, sciences cognitives). Les nanotechnologies forment actuellement trois domaines principaux d’application : la nanobiologie, les nanomatériaux et la nanoélectronique. Ces nanotechnologies vont permettre de fabriquer et de marquer des éléments de plus en plus petits, de la taille de la cellule, permettant à tout moment de communiquer et de traiter des informations sur l’individu. Déjà, un laboratoire américain privé vient d’annoncer la fabrication d’un génome complet d’une bactérie. Cette possibilité ouvre la voie à la création en laboratoire de virus et de bactéries dont il n’est absolument pas certain que l’on soit capable de maîtriser les effets. La fabrication de machines à traiter l’information, de plus en plus rapides et utilisant la physique quantique et ses lois étranges (intrication, non-localité, …) va permettre le traitement d’un volume de plus en plus grand d’informations facilitant le « suivi » d’une population entière et entraînant la disparition progressive de « l’aire privée ». Ces machines seront capables d’utiliser les derniers progrès des sciences cognitives et, de ce fait, de gérer le comportement des humains qui vont y perdre leur libre-arbitre…sans même s’en apercevoir !
Enfin, il reste l’endettement des pays riches. Ces pays accumulent une dette qui prend des proportions effrayantes. Les USA empruntent 800 milliards de dollars par an et leur dette publique atteint les 8000 milliards de dollars. La dette allemande est de 1500 milliards d’Euros, la dette française dépasse les 1200 milliards d’Euros, la dette italienne avoisine les 106% de son PIB , la dette belge atteint 102% du PIB et la dette française représente 77% du PIB. En Europe, la moyenne de l’endettement atteint environ 80% du PIB européen. Comment les actifs futurs pourront-ils payer le service de la dette ? Beaucoup de pays dits développés ont appliqué une politique keynésienne, consistant à emprunter pour relancer la consommation, donc l’activité et la création de richesses. Mais ce processus ne fonctionne que si l’accroissement de richesses est plus grand que l’emprunt additionné des intérêts. Dans le cas contraire, la dette augmente. C’est ce qui s’est passé à cause du laxisme des pays dits développés. Les pays pauvres sont également, et par définition, endettés. Or, ils sont, pour beaucoup, incapables de payer les intérêts de leur dette.
Aggravant encore ce risque de faillite généralisée, l’activité financière est, depuis longtemps, beaucoup plus importante que l’activité industrielle, ce qui veut dire qu’une grande partie de la création de richesses est totalement artificielle. La financiarisation outrancière de l’activité se trouve à la merci d’une baisse du dollar, d’un crash immobilier, d’une baisse boursière (trois évènements qui sont en train de se produire), d’une défiance des banques envers les Etats entrainant un effondrement de la valeur des obligations. Voulant alimenter coûte que coûte (c’est bien le mot !) le marché financier et la spéculation, les organismes bancaires ont mis sur le marché des produits de plus en plus sophistiqués et risqués, sans que ne s’exerce le moindre contrôle ; ce qui a conduit à la crise récente des « subprimes » qui a plongé l’ensemble des économies occidentales dans la tourmente et menace leur population de difficultés importantes. Le monde occidental (des privilégiés) est plongé dans une frénésie de l’argent « à tout prix » qui le pousse à délaisser l’économie réelle pour un jeu qui ressemble de plus en plus à une économie casino. Et, dans un tel jeu, on sait bien que les joueurs sont toujours perdants.
Il est classique de dire que l’avenir est incertain. Il est aussi dangereux. Nous avons connu la crise financière, puis la crise économique, bientôt la crise sociale (la Grèce) et sociétale.

15 mars 2010

La vérité est ailleurs

Les élections régionales qui viennent d’avoir lieu ont désigné un incontestable vainqueur : l’abstention. Certes, la Gauche française clame son succès à grands cris et dépeint la France comme un peuple de gauche. La France, un peuple de gauche ? La vérité est ailleurs. Il faut tout d’abord constater que la majorité des abstentionnistes est droitière, ce qui nuance déjà fortement le cri de victoire de l’opposition. Ensuite, le Français est le parangon du citoyen qui brûle aujourd’hui ce qu’il a adoré hier, voire il y a juste une heure. Le Français est contestataire par construction. Le succès des soi-disant humoristes qui sévissent dans les médias en faisant fortune grâce à leurs ricanements à la limite de l’insulte faite aux politiques est un excellent indicateur du penchant français vers la critique systématique sans nuance. Ainsi, tout vote est l’occasion donnée au citoyen d’exprimer à bon compte son ire vis-à-vis de ceux qui le gouvernent. Les Français ne votent pratiquement jamais « pour » mais, le plus souvent, « contre ». Le regain du Front National s’explique ainsi. Il faut dire que c’est beaucoup plus confortable et sans risque. Lorsque l’on compare l’attitude abstentioniste des Français et la participation importante des Afghans aux dernières élections malgré le risque énorme encouru à cause du terrorisme, on reste confondu. Les Afghans considèrent le vote comme une exigence de leur démocratie naissante, les Français comme une corvée inutile de leur démocratie vieillissante. Comme d'habitude, pour l'opposition "la droite n'a rien compris", pour la majorité (?), "la gauche se trompe". Comme d’habitude, tous les politiques crient victoire ou démontrent, en utilisant une langue de bois parfaitement au point, que la défaite n’en est pas une mais l’occasion de « recevoir le message des Français », même s’il n’y a aucun message envoyé, hormis celui qui consiste à contester le pouvoir.

08 mars 2010

La crise pour les nuls !

Alors voilà, Mme. Colette a une buvette à Curette en Tarn & Saône. Tout d’abord, en bonne gestionnaire, elle accroche au-dessus de son comptoir l’affichette « Ici, on ne fait pas de crédit » pour se mettre à l’abri des mauvais payeurs, d’autant que la grande majorité de ses clients sont alcooliques et chômeurs. Mais, au bout de quelques mois, elle trouve que son chiffre d’affaires est insuffisant pour lui permettre de s’offrir un certain nombre d’extras dont elle a envie depuis longtemps. Elle décide donc d’augmenter le nombre de ses clients. Pour augmenter ses ventes et attirer le chaland, elle décide de faire crédit. Vu qu'elle vend à crédit, Mme Colette voit augmenter le volume des consommations et la fréquentation de sa buvette. Elle en profite pour augmenter un peu les prix de base du "calva", du ballon de rouge et de la Suze-Casse.
De son côté, le jeune et dynamique directeur de l’agence bancaire locale, lui aussi soucieux d’améliorer ses performances en termes de prêts consentis, pense que les "ardoises" du troquet constituent, après tout, des actifs recouvrables puisque les clients de la buvette augmentent, et donc il commence à faire crédit à Mme Colette, en prenant les dettes des ivrognes comme garantie, ce qui suppose évidemment que ces dettes seront remboursées un jour. Au siège de la banque, des traders avisés et experts en mathématiques sophistiquées, « titrisent » alors ces actifs recouvrables en XYZ, CQFD, SAMU, OVNI, SOS, TLDLBB, et autres sigles financiers ésotériques que nul n’est capable de comprendre. Ces produits sont alors vendus sur le marché financier et conduisent, au NYSE (New York Stock Exchange), à la City de Londres, aux Bourses de Tokyo, de Francfort et de Paris, etc…, à des opérations dites de dérivés dont les garanties et les risques sont totalement inconnus de tous (c.à.d., en définitive, la capacité des ivrognes de Mme Colette en Tarn & Saône à payer leur ardoise !). Ces "dérivés" sont alors négociés pendant des années comme s'il s'agissait de titres solides et sérieux sur les marchés financiers de 80 pays. Comme leur valeur boursière a tendance à augmenter, la demande de ses produits augmente aussi et donc … leur valeur en bourse est en hausse ! Pendant ce temps, Mme Colette, en proie à des difficultés de trésorerie du fait des impayés grandissants, emprunte de plus en plus auprès de son agence bancaire qui utilise les dépôts de ses clients pour fournir les crédits demandés. Jusqu'au jour où quelqu'un se rend compte que les alcoolos du troquet de Curette n'ont pas un rond pour payer leurs dettes et que la buvette de Mme. Colette va faire faillite … ce qui se produit. Et le monde entier est grugé et se retrouve en crise.
Le directeur d’agence est, en réalité, le patron de Goldman Sachs, les alcooliques sont les ménages américains qui se sont endettés pour acheter leur logement, les actifs recouvrables s’appellent les subprimes, la faillite de la mère Colette est celle du monde en crise financière, puis économique, puis sociale et, finalement, politique, pendant que le grand banquier pense « Après moi, le déluge ! ». Vous voyez comme les choses sont simples !

07 mars 2010

Le système chinois

Le développement de la Chine laisse le monde interrogatif et inquiet. Interrogatif car on se demande sur quoi repose cette expansion. Inquiet car elle pourrait conduire à un nouvel impérialisme. La cause est simple à comprendre. La Chine tire le meilleur parti de son principal atout concurrentiel, à savoir une main d’œuvre pléthorique à coût minime qui lui permet des coûts de fabrication extrêmement bas, rendant l’industrie chinoise très compétitive sur les marchés occidentaux, cible de ses exportations, la demande intérieure restant insuffisante pour cause de revenus trop faibles. C’est pourquoi, afin de faire accepter des conditions de travail extrêmement difficiles, la Chine maintient une dictature politique qui muselle les oppositions et les contestations. Mais, pour faire fonctionner ses usines, la Chine a également besoin des techniques industrielles occidentales, c’est-à-dire qu’elle a besoin d’attirer rapidement les investissements étrangers. D’où le développement d’une libéralisation économique, indispensable pour rassurer les investisseurs occidentaux. Dictature politique, libéralisme économique, tel est le système chinois qui permet la production de produits compétitifs inondant les marchés des pays développés. À cela s’ajoute une sous-évaluation du Yuan qui renforce encore cette compétitivité. Cette stratégie a permis à la Chine de devenir l’atelier industriel du monde développé. Son marché principal est le marché américain qui absorbe une très grande partie de ses exportations. Il est donc essentiel que ce marché reste solvable, et ceci malgré la dette abyssale des USA (près de 80% de leur PIB) qui représente une menace pour la pérennité des exportations chinoises. C’est la raison pour laquelle la Chine rachète la dette américaine en achetant une quantité considérable de bons du Trésor américain, fournissant ainsi aux États-Unis les dollars dont ils ont besoin pour acheter ses produits. La boucle est bouclée, créant une intrication étroite entre les deux économies. La stabilité économique du monde étant subordonnée à celle de l’économie américaine, l’inquiétude des pays occidentaux porte sur la pérennité de cette dépendance réciproque. Mais le développement industriel explosif de la Chine entraîne, pour ce pays, un énorme besoin en matières premières qui vient s’ajouter aux besoins alimentaires colossaux d’une population de presque 1,5 milliards d’habitants. La Chine écume donc le monde pour mettre la main sur les matières premières, industrielles et alimentaires, dont elle a un besoin vital et se trouve ainsi en concurrence frontale avec les pays occidentaux. Elle transforme peu à peu l’Afrique en fournisseur quasi-exclusif et fait peser à long terme sur les marchés une très forte tendance à la hausse. Cette mainmise chinoise sur les ressources de la planète est ressentie confusément comme un impérialisme nouveau et inquiétant.
Bien entendu, cette expansion et ce développement chinois ne sont pas sans risques pour la Chine elle-même car ils ne profitent actuellement qu’à une petite partie de la population, essentiellement à une nomenklatura directement ou indirectement liée au Parti Communiste Chinois. Il se crée ainsi une société à deux vitesse qui ne peut qu’accroître les tensions sociales, aujourd’hui contenues par la dictature politique. Les prochains enjeux de la Chine sont donc les suivants :
Tout d’abord, développer, à côté des exportations, un marché intérieur qui dépasse la classe des favorisés afin de soutenir la demande ce qui provoquera une pression accrue sur les matières premières. Ensuite, acquérir la maîtrise des techniques et de l’innovation par le développement rapide de l’enseignement, des universités et de la recherche. Les universités chinoises, multipliant les coopérations internationales, comptent 23 millions d’étudiants. Les trois meilleures universités du pays, l’Université de Pékin, l’Université Qing hua à Pékin et l’Université Fudan à Shanghai sont capables de rivaliser avec les grandes universités américaines et européennes. Il n’est pas un domaine technique de pointe où la Chine n’investisse pas.
Pendant que la Chine s’éveille, l’Europe s’assoupit. Le réveil sera douloureux.

23 février 2010

Au nom du père et du fils

Le complexe d’Œdipe, vedette incontestable de la psychologie de la relation mère-fils, a son complément moins célèbre dans la relation père-fils. Celle-ci participe à la complexité générale de la relation parent-enfant. Cette complexité ne s’atténue aucunement avec le temps et perdure tout au long de la vie (de l’un et de l’autre). En ramenant l’analyse à l’essentiel, on peut dire que le type de relation entre un fils et son père est fondamentalement binaire. Elle relève soit de l’admiration soit de la déception, ce qui n’exclue nullement l’affection. L’admiration du fils pour le père peut s’accompagner chez l’enfant d’un sentiment d’infériorité, qui naît de la crainte d’être incapable de pouvoir égaler l’adulte, l’enfermant dans une impression d’échec permanent pouvant aller jusqu’à des tentations suicidaires. La déception, quant à elle, se traduit généralement par une opposition plus ou moins violente pouvant conduire au rejet de l’autorité. Œdipe n’a pas seulement épousé sa mère, il a aussi tué son père. Cette période d’opposition est répandue et bien connue des parents. Son aspect positif est qu’elle pousse l’enfant à trouver une voie personnelle qui peut être le ferment d’un esprit d’initiative bénéfique atténuant, avec le temps mais sans la supprimer totalement, cette attitude antagoniste. Ainsi, le triste destin du père est d’accepter d’être un objet de déception pour son fils s’il ne veut pas prendre le risque qu’un sentiment d’admiration ne conduise ce dernier à une frustration destructrice. Décevoir, c’est finalement donner à son enfant une chance supplémentaire de s’affirmer et de réussir. Ce qui n’enlève rien aux sentiments d’un père pour son fils ou d’un grand-père pour son petit-fils.

19 février 2010

L’effet papillon industriel

Le paradigme de la fiabilité et de la qualité s’appelait Toyota. Cette entreprise s’est construit sur plusieurs décennies une image prestigieuse ancrée sur le zéro-défaut de ses produits. Toyota est ainsi devenu le symbole japonais de la réussite construite sur l’excellence. Son image est tellement forte que le nationalisme japonais s’en nourrit. Cette entreprise mondialisée est devenue le premier constructeur automobile mondial. Cela signifie une extraordinaire complexité de son organisation. Une organisation qui a fonctionné à merveille jusqu’à ce que Toyota soit obligé d’opérer soudainement un rappel de 8 millions de véhicules à travers le monde. La complexité d’un système augmente factoriellement en fonction du nombre de ses composants. Or, l’automobile est devenue un produit extrêmement complexe par la multiplicité de ses composants et de leurs interactions électroniques et informatiques. À cette complexité intrinsèque du produit s’ajoute celle de l’organisation industrielle, le propriétaire de la marque devenant un simple assembleur de composants en provenance de multiples sous-traitants, répartis dans le monde. La complexité résultante de cette superposition est difficile, sinon impossible, à estimer, mais il est certain qu’elle est extrêmement élevée. Il est alors concevable qu’un petit dysfonctionnement d’un seul composant, qu’il soit industriel ou organisationnel, ait un effet considérable sur le produit fini. On peut même se poser la question de savoir si, au-delà d’un certain niveau de complexité, le système n’adopte pas un comportement chaotique, c’est-à-dire imprévisible. C’est vraisemblablement ce qui s’est passé chez Toyota qui doit, soudainement, faire face à une multitude de dysfonctionnements de ses produits sans qu’il ait été possible d’anticiper le phénomène. Tous les constructeurs automobiles sont soumis à ce risque. Il est alors logique de se demander si l’automobile ne devient pas un produit de plus en plus dangereux au fur et à mesure que les constructeurs multiplient les systèmes intégrés de contrôle et de rétroaction automatiques. Il est déjà symptomatique que les garagistes ne savent plus réparer une automobile, se contentant, dans la majorité des cas, de remplacer les composants. La multiplication des assistants à la conduite permet de pallier les défaillances des conducteurs qui se permettent ainsi des imprudences qu’ils n’auraient sans doute pas commises sans ces composants. De même qu’un nombre de plus en plus important d’élèves ne savent plus exécuter un calcul mental à force d’utilisation de calculettes électroniques, un nombre de plus en plus grand de mauvais conducteurs ne savent plus conduire correctement et se sentent protégés par ces assistants. Ainsi le dysfonctionnement de l’un d’entre eux a nécessairement des conséquences graves car il ne protège plus d’une imprudence de conduite. Au bout du compte, une puissante berline de luxe peut être potentiellement plus dangereuse qu’une vieille 2CV !!

16 février 2010

Ça chauffe ?

Le changement climatique est une certitude pour la très grande majorité des scientifiques. Le grand public reste pourtant assez indifférent à ce phénomène pour la seule raison que ses conséquences sont, en principe, à long terme et que la réflexion cède le pas à l’égoïsme. Comme toujours, l’avenir des générations futures ne préoccupe pas beaucoup la génération actuelle. Pour établir leurs conclusions, les scientifiques n’utilisent pas les prédictions de Nostradamus mais des modèles mathématiques et informatiques qui leur permettent de simuler l’évolution d’un certain nombre de paramètres décrivant le monde qui nous entoure. Ils n’ont pas d’autres moyens que d’utiliser « les lois de la Nature » pour établir leurs modèles, lois que les physiciens traquent depuis des siècles. Deux questions se posent alors. La première est l’exhaustivité des paramètres pris en compte. La nature est un système d’une complexité considérable. Le cycle de carbone, le cycle de l’eau, les échanges entre l’atmosphère et les océans, la dynamique des vents, les lois de la chimie et de la diffusion des gaz, la thermodynamique, la rhéologie et le comportement des glaciers et des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique, l’effet albédo, la dynamique des fluides, l’effet de la couverture nuageuse et de la présence de particules de suie dans l’atmosphère, la précession de l’orbite terrestre, l’inclinaison de l’axe de rotation de la Terre, l’activité solaire, la circulation thermoaline, etc …, font partie des lois et phénomènes dont il faut tenir compte. À ceux-ci s’ajoutent les conséquences des comportements humains, comme l’activité industrielle, la déforestation, les transports, la déprédation de la diversité biologique, etc … Il n’est, hélas, pas douteux que ces comportements perdurent dans l’avenir car les hommes se plaignent toujours des conséquences des événements dont ils chérissent les causes. La seconde question qui se pose tient dans le fait que les modèles sont de plus en plus sophistiqués et que leur complexité oblige à des simplifications de représentation. Parmi ces simplifications, la plus importante est, peut-être, l’hypothèse de la progressivité régulière des phénomènes dans le temps, sans rupture brutale, qui conduit à décrire une évolution lente de l’état du monde. Là est le talon d’Achille de ces prévisions. En effet, depuis la fin du XIXème siècle et les travaux d’Henri Poincaré sur les systèmes dynamiques à N corps et leur sensibilité aux conditions initiales, on sait que les systèmes complexes peuvent présenter de brusques changements de comportement imprévisibles. En 1961, les travaux de Lorenz sur la météo et en 1963 sur les attracteurs étranges, les études de Mitchell Feigenbaum en 1974, ont mis en évidence que certains systèmes dynamiques pouvaient basculer de façon aléatoire entre des comportements différents et que l’horizon de leur prévisibilité est très court. Le terme de « chaos », utilisé pour décrire ces phénomènes, a été introduit en 1975 par les deux mathématiciens Tien-Yien Li et James A. Yorke. Ces études ont été popularisées sous le nom évocateur et trompeur d’« effet papillon ». Ce n’est pourtant que depuis peu de temps que le comportement chaotique des phénomènes naturels est envisagé et pris en compte par les scientifiques, que ce soit les climatologues ou les glaciologues. Aujourd’hui, les méthodes de simulation prennent en compte la théorie du chaos pour tenter de prévoir ce qui risque d’arriver aux calottes glaciaires. Et la surprise est grande et assez effrayante. En effet, des phénomènes, impensables jusqu’à des temps récents, se produisent en ce moment au sein de ces calottes groenlandaise et antarctique qui produisent une accélération soudaine de la déstabilisation des grands glaciers, rendant possible, sinon probable, le déversement dans l’océan de quantités phénoménales d’eau douce. Cela conduit à une augmentation du niveau des mers, non pas de quelques centimètres par siècle, mais de plusieurs mètres dans un horizon de temps d’une dizaine d’années ! Il n’est pas certain que ces phénomènes chaotiques se produisent, mais cela reste possible. Comme un avertissement, on a vu en Mars 2002 la plateforme Larsen B de l’Antarctique s’effondrer en quelques jours, structure de 200 mètres d’épaisseur et plus vaste que le Luxembourg qui était restée attachée à la péninsule pendant plusieurs milliers d’années. Le fait que le GIEC reconnaisse aujourd’hui que ses premières prévisions sur le recul des glaciers de l’Himalaya étaient erronées et trop pessimistes ne fait que démontrer la grande incertitude régnant sur la représentativité des modèles utilisés et sur la rapidité des changements à venir. Les systèmes chaotiques se caractérisent par un basculement imprévisible entre deux comportements, ou davantage, complètement différents et une sensibilité extrême à des variations infimes de certains paramètres caractéristiques. C’est ainsi que le réchauffement climatique peut, très rapidement, transformer les puits de carbone que représentent les forêts tropicales, les zones marécageuses et le permafrost en sources de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone et méthane), aggravant l’effet de serre et provoquant un emballement du réchauffement. Il en est de même pour les océans, dans lesquels le gaz carbonique et l’eau produisent de l’acide carbonique dont la décomposition acidifie le milieu et qui, par un processus complexe mettant en jeu les sels de calcium et de silicium apportés par les sédiments continentaux, diminue la capacité de l’océan à absorber le gaz carbonique et le pousse, au contraire, à le rejeter. Le puits de carbone le plus important de la planète, outre le fait que l’acidification détruit la vie halieutique, peut ainsi devenir une source de gaz à effet de serre. Le plus grave est que les nations sont gouvernées par des politiques qui ne sont préoccupés que par le très court terme de leur maintien au pouvoir, ce qui les rend réfractaires à toute action engageant le moyen et long terme. Copenhague en est le meilleur exemple. Nous avons donc une chance non négligeable d’aller, les yeux fermés, vers des ruptures climatiques puis sociétales extrêmement graves.

13 février 2010

L’Europe malade de la mondialisation

La Grèce a menti. Elle a contourné les critères européens de gestion. Certes, ce n’est pas le seul pays à avoir joyeusement piétiné les critères de Maastricht. Mais c’est le seul pays à avoir dissimulé ce fait en présentant des comptes truqués. Comme la vérité finit toujours par être connue et que la réalité des faits s’impose, ce pays est, aujourd’hui, menacé de faillite. De la même façon qu’une entreprise en difficulté attire les rapaces, les « hedge funds » se précipitent en spéculant sur la faillite de la Grèce. Si ces rapaces de la finance gagnent la partie, ils joueront alors contre les autres pays les plus exposés, c’est-à-dire (dans l’ordre) l’Espagne, le Portugal, l’Irlande, la France. Or, si la Grèce ne pèse pas beaucoup dans l’économie européenne, il n’en est pas de même pour l’Espagne. Et si ce pays se trouve menacé à son tour par la spéculation mondiale, alors, c’est l’Europe tout entière, et plus particulièrement la zone Euro, qui se trouvera menacée d’éclatement. La situation est donc grave. Et pourtant, les dirigeants européens, réunis soi-disant pour trouver les moyens de stopper ce danger, n’ont pas eu le courage d’annoncer des mesures concrètes propres à décourager les spéculateurs. Il eut été pourtant suffisant qu’ils se portent garants des emprunts que la Grèce va devoir lever pour faire face à ses obligations. Ce qu’ils ont fait, chacun de leur côté, pour les banques de leur pays, ils n’ont pas osé le faire ensemble pour un pays européen. Une fois de plus, les égoïsmes nationaux et les préoccupations locales ont été prédominants. Le « gouvernement économique » de l’Europe est renvoyé aux calendes grecques (c’est le cas de le dire !). L’Europe reste sans moyens devant la mondialisation qui s’impose à elle sans qu’elle ne puisse en maîtriser les effets. Avec des gouvernements nationaux aveuglés par leurs préoccupations électorales, une Commission européenne qui se préoccupe des OGM au lieu de s’occuper de la crise la plus grave que l’Europe ait connu depuis qu’elle existe, un soi-disant Président de l’Europe qui brille par son absence, l’avenir est sombre. L’égoïsme n’est certes pas une spécificité européenne. Copenhague ou le simulacre de G20 ont bien montré que « le chacun pour soi » reste la règle de tous les pays. Cela laisse le champ libre et un bel avenir à tous les fieffés coquins, les trafiquants, les mafias, les spéculateurs du monde entier.
On a cru Obama thaumaturge, il n’est qu’un Président américain. Oui, l’avenir est sombre.

08 février 2010

Le niqab

Il n’y a pas de burka en France. Il n’y a que des femmes entièrement voilées par le niqab qui ne laisse apercevoir que le regard. Ce phénomène, nouveau et encore rare, sème un mélange de gêne et de confusion dans les esprits. Cette confusion vient du fait que l’on ne sait trop si cette pratique est à condamner au nom de la dignité de la femme ou à accepter au nom de la liberté et du rejet d’une soi-disant xénophobie. Or, il n’y a que deux cas possibles : ou bien ce voile est imposé à la femme qui le porte ou bien il s’agit d’une décision et d’un choix personnels. Si le niqab est une contrainte imposée par un tiers, que se soit un imam ou un conjoint, alors il y a nécessairement une atteinte insupportable à la liberté de l’individu et à la dignité féminine. Si le voile est porté volontairement, quelle que soit la raison invoquée, il transforme la femme en voyeur qui regarde par le trou de la serrure afin de voir sans être vu. Au nom d’une volonté de s’effacer du monde, la femme devient ostensiblement visible. Cette ostentation est une provocation. Le niqab est un véritable signal, attirant tous les regards et toutes les interrogations. Il n’est, en aucune façon, une obligation du Coran, mais une contrainte inventée par des hommes pour des motifs que l’on peut soupçonner emprunts de machisme primaire (« cache ce visage que je ne saurais voir, car il est un vrai scandale »). Quelle qu’en soit la raison, se cacher pour regarder le monde est une injure à tous ceux à qui s’adresse la femme voilée du niqab. On entend parfois l’argument évoquant l’abbé Pierre, revêtu de son habit de prêtre au sein du Parlement, pour essayer de justifier le port du voile intégral en tout lieu. Ce fût une erreur de ne pas imposer l’habit civil à l’abbé Pierre au sein du Parlement et cette erreur ne permet pas de justifier l’acceptation du niqab. Les politiques ont le devoir de rechercher une réponse, le citoyen a le droit de se détourner de ces femmes en refusant tout échange.

05 février 2010

L’intelligence artificielle, une utopie ?

Définir l’intelligence humaine n’est pas facile. En effet, l’intelligence n’est pas seulement l'ensemble des facultés mentales permettant de comprendre les choses et les faits, c’est aussi la capacité de découvrir les relations entre ces faits et d'agir de manière adaptée grâce à la compréhension des situations. L'intelligence est l'ensemble des fonctions mentales mobilisées pour l'analyse, la compréhension, et l'organisation du réel en concepts, nécessaires à l'homme pour mémoriser (apprendre), analyser (comprendre) et communiquer (partager). On peut aussi définir l'intelligence comme étant la capacité à utiliser le raisonnement causal, l'imagination, la prospection et la flexibilité et qui serait ainsi à la base de la faculté d'adaptation.
Depuis plusieurs décennies et avec le développement rapide de l’informatique, l’homme, se prenant pour un démiurge, a cherché à reproduire artificiellement le fonctionnement de l’intelligence. L’intelligence artificielle a été définie par l’un de ses créateurs, Marvin Lee Minsky, comme la construction de programmes informatiques qui exécutent des tâches qui sont habituellement accomplies par des êtres humains car elles demandent des processus mentaux de haut niveau tels que : l’apprentissage perceptuel, l’organisation de la mémoire et le raisonnement critique. On relève donc, dans cette définition, l’aspect « artificiel » dû à l'usage des ordinateurs ou de processus électroniques élaborés et l’aspect « intelligence » associé à l’imitation du comportement humain. Cette imitation trouve son application dans le raisonnement, par exemple dans les jeux ou la pratique de mathématiques, dans la compréhension des langues naturelles, dans la perception : visuelle (interprétation des images et des scènes), auditive (compréhension du langage parlé) ou par d'autres capteurs comme ceux qui sont utilisés dans la commande des robots.
En physique fondamentale, on distingue les principes anthropiques fort et faible pour expliquer pourquoi le monde est comme il est. De même, on fait la différence entre l’IA forte et l’IA faible. Actuellement, le concept d’intelligence artificielle forte fait référence à une machine capable non seulement de produire un comportement intelligent, mais de simuler une conscience de soi ainsi qu’une compréhension de ses propres raisonnements (boucle de feed-back) et, donc, dotée d’une capacité d’apprentissage autonome. En se fondant sur le constat que la conscience a un support biologique et donc matériel, certains scientifiques ne voient pas d’obstacle de principe à créer un jour une intelligence consciente sur un support matériel autre que biologique. Selon les tenants de l'IA forte, si à l'heure actuelle il n'y a pas d'ordinateurs ou de robots aussi intelligents que l'être humain, ce n'est qu’un problème de conception. Un ordinateur typique de 1970 effectuait 10 puissance 7 opérations logiques par seconde, c’est-à-dire une sorte d’intermédiaire entre une balance de Roberval (1 opération logique par seconde) et le cerveau humain (environ 2 x 10 puissance 14 opérations logiques par seconde). En 2009, un microprocesseur type traite 64 bits en parallèle (128 dans le cas de machines à double cœur) à une vitesse de 2 GHz, ce qui lui permet en principe d’effectuer 10 puissance 11 opérations logiques par seconde. Il n’existe plus qu’un facteur 3 pour atteindre les performances du cerveau humain. Les ordinateurs quantiques permettront peut-être de franchir cette différence. C’est la position défendue notamment par Roger Penrose. Des algorithmes quantiques sont théoriquement capables de mener à bien des calculs hors de l'atteinte pratique des calculateurs conventionnels. Au-delà de la rapidité, le fait que l'on puisse envisager des systèmes quantiques en mesure de calculer des fonctions dites non calculables (au sens donné par Turing) ouvre des possibilités qui sont fondamentalement interdites aux machines actuelles. La notion d’intelligence artificielle faible, quant à elle, constitue une approche pragmatique d’ingénieur qui cherche à construire des systèmes de plus en plus autonomes (pour réduire le coût de leur supervision), des algorithmes capables de résoudre des problèmes d’une certaine classe, comme ceux rencontrés en cybernétique. Ces algorithmes sont souvent construits à partir de moteurs d’inférences tournant sur une base de faits et une base de règles. Ces bases mémorisent, sous des formes diverses, le savoir des experts, ce qui nécessite la participation volontaire de ceux-ci pour formaliser et livrer leurs connaissances et leur expertise. Ce partage ne va pas de soi et soulève souvent des difficultés, non seulement de modélisation mais également de résistance, l’expert ayant la sensation d’une dépossession et d’une perte de pouvoir. De plus, lorsque l’intelligence artificielle s’attache à décrire le fonctionnement de systèmes complexes à toutes les échelles, cette description impose une transversalité du savoir, ce qui est encore aujourd’hui assez contradictoire avec la parcellisation et la « ghettoïsation » des disciplines scientifiques. Internet pourrait peut-être devenir le catalyseur de la mise en commun des savoirs scientifiques, aboutissant à cette transversalité nécessaire dans la modélisation des systèmes ouverts et complexes.
Malgré tout, il reste extrêmement douteux que l’IA soit capable de reproduire un jour totalement le fonctionnement de l’intelligence, car celle-ci possède des qualités qui semblent hors de portée de tout artéfact, l’intuition et les émotions par exemple. Jamais une machine ne sera capable de renoncer à une décision parce qu’elle la ressent comme immorale. Jamais une machine ne prendra une décision par vengeance. HAL 9000 reste une utopie. Je crois qu’il ne faut pas s’en plaindre.

02 février 2010

Misère

Il y a trois types de mensonges : le mensonge, le sacré mensonge (ou le mensonge sacré) et les statistiques (Disraeli). Dans une société qui se délite, les statistiques sont devenues l’arme qui permet aux politiques de cacher la vérité ou de l’ignorer. Aujourd’hui, la France compte huit millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. C’est ce que disent les statistiques. Ce dont elles ne parlent pas, ce sont les 600.000 enfants qui vivent dans des conditions révoltantes, obligés de dormir à tour de rôle dans un logement qui s’apparente davantage à un placard et dans lequel s’entassent 5 ou 6 personnes, ne trouvant pour travailler que le couvercle de la machine à laver ou le carrelage de la cuisine. Pour ces enfants, le concept d’égalité des chances est vide de sens. Les statistiques ne nous disent pas qu’il y a environ 800.000 personnes, dont 160.000 enfants et adolescents, qui campent sous les ponts, dans une tente voire sous une simple toile tendue entre deux arbres ou qui s’entassent dans les quelques structures d’accueil trop peu nombreuses et où la violence n’est pas absente. 100.000 d’entre eux vivent en permanence dans un camping. Allez vous promener dans le Bois de Vincennes et vous aurez l’impression de traverser un véritable village de toile. À ces sans-abri, s’ajoutent les 100.000 personnes qui vivent dans leur véhicule, voiture ou camion, tout en ayant un travail sous-payé qui leur interdit de trouver un logement à louer par ostracisme des loueurs. Aujourd’hui, la société se débarrasse des pauvres en les effaçant, non seulement des chiffres, mais en les rendant transparents en passant à côté d’eux sans les voir. Elle se débarrasse également des vieux en les parquant dans les maisons spécialisées. Ne rien voir, ne rien entendre, n’en pas parler. Cette soi-disant sagesse n’est qu’un monstrueux égoïsme et la démonstration que la société perd, non seulement ses moyens, mais également ses valeurs.