10 novembre 2010

Un monde incompréhensible

Dans un passé récent, les scientifiques s’émerveillaient que l’on puisse expliquer le comportement du monde physique. Einstein disait : « Ce qui est le plus incompréhensible est que l’Univers soit compréhensible ». Toutes les sciences avaient une loi commune et incontournable : celle de la vérification. Une théorie, pour être crédible, devait impérativement être vérifiable et falsifiable. Cela veut dire qu’une théorie doit pouvoir permettre de tirer des conséquences qui soient expérimentalement vérifiables et qu’il soit possible de réaliser des expériences permettant de mettre éventuellement cette théorie en défaut. Ainsi, par exemple, la théorie de la Relativité Générale prévoit la courbure de l’espace sous l’influence de la matière. Cette courbure permet de prévoir, comme conséquence, qu’un rayon lumineux doit être courbé par la matière. L’alignement de la Terre, d’une galaxie lointaine et d’une étoile massive a pu permettre, grâce aux télescopes modernes, de vérifier cette assertion en constatant que la masse de la galaxie courbait effectivement les rayons lumineux en provenance de l’étoile, celle-ci restant visible malgré la présence de la galaxie (lentille gravitationnelle). Il en est de même avec l’équivalence entre la matière et l’énergie dont l’éclatante vérification se nomme bombe atomique ! Mais, depuis les succès de la mécanique quantique et le développement de la cosmologie, la physique s’est aventurée dans des terrains mouvants pour essayer d’expliquer l’infiniment petit et l’infiniment grand. Par exemple, la notion de localité a disparu de la mécanique quantique sans pouvoir expliquer pourquoi la réalité globale des particules élémentaires se transforme en réalité locale du monde macroscopique qui nous entoure. C’est ainsi également que sont nées les théories des supercordes, des multivers, des branes, toutes hypothèses invérifiables à jamais. La vérification expérimentale de l’existence des cordes, particules élémentaires ultimes supposées, demanderait des accélérateurs de particules accédant à des niveaux d’énergie inaccessibles et de dimensions équivalentes au système solaire. La théorie des multivers, cherchant à expliquer pourquoi la quinzaine de constantes physiques fondamentales possède les valeurs constatées, stipule l’existence d’Univers multiples et inaccessibles, possédant toutes les valeurs possibles pour ces constantes. La théorie des branes cherche à expliquer l’origine de l’Univers par le « choc » entre deux univers différents, ce qui restera à jamais invérifiable. Qui plus est, pour pouvoir développer ces hypothèses, les physiciens, ne trouvant pas les outils mathématiques nécessaires, ont « inventé » de nouveaux outils, ce qui se produit pour la première fois dans l’histoire des sciences. A-t-on le droit de parler encore de théories scientifiques sous prétexte de les avoir habillées de mathématiques idoines ? Mais la physique n’est pas la seule à chercher dans l’invérifiable l’explication de l’inexplicable. En biologie, par exemple, un des grands mystères est la morphogenèse, c’est-à-dire la capacité d’une cellule à se transformer en cellule spécifique d’un organe et à trouver sa place dans l’organisme vivant. Pour tenter d’expliquer cet extraordinaire phénomène, Jacques Monod a « inventé » la téléonomie, c’est-à-dire la capacité qu’aurait une cellule d’avoir un « projet » qui la guide dans la totalité de son évolution. Bien entendu, cette propriété supposée restera à jamais invérifiable. Elle relève de ce que la systémique appelle « les propriétés émergentes », concept permettant de justifier une propriété possédée par un organisme et qu’il est impossible d’expliquer à partir des propriétés de ses composants. Le cerveau humain comporte cent milliards de neurones (autant que d’étoiles dans la Galaxie) et chaque neurone possède entre mille et dix mille connexions. Dans l’impossibilité de comprendre, et encore moins d’expliquer, le fonctionnement d’un organe aussi complexe, le neurologue « invente » l’existence de mémoires spécialisées par type de problèmes. C’est ainsi que l’on parle de mémoire procédurale, mémoire à court terme, mémoire à long terme, mémoire visuelle, mémoire auditive, etc …. Il est, aujourd’hui, impossible d’expliquer le fonctionnement de ces mémoires et, donc, leur réelle existence. Après la physique et la biologie, voici l’économie. L’économie est cette science où l’on ne sait pas de quoi l’on parle et où l’on ne sait pas non plus si ce qu’on dit est vrai ! Dans cette discipline, qui ne manque pas de théories, il n’en est pas une qui n’ait été mise en défaut. Certes, des explications à posteriori ont été données par les experts en économie pour justifier pourquoi ils s’étaient trompés ou avaient été incapables de prévoir. Dans cette « science », en dehors des évidences, aucune théorie n’est capable de fournir des hypothèses aux conséquences reproductibles. C’est pourquoi l’économie n’est pas une science. Nous vivons dans un mode devenu incompréhensible, le comble de l’incompréhension étant le comportement humain même si, dans ce domaine, il est certain que le pire est toujours sûr. Einstein peut être rassuré.

06 novembre 2010

L’argent et les principes

On a le droit de manifester et celui d’exprimer ses opinions et ses convictions. La venue en France du Président chinois a poussé certains défenseurs des droits de l’homme à demander une protestation officielle et publique du Président de la République Française, c’est-à-dire une humiliation publique du Premier ministre chinois. Pourquoi devrait-on faire subir à ce dernier ce que nous ne supportons pas lorsque la même protestation nous vise ? Rappelons-nous la réaction française indignée après la comparaison douteuse d’une commissaire européenne entre l’évacuation des roms en situation illégale et les comportements nazis envers les juifs. D’autre part, l’attitude de donneur de leçons en matière de droits de l’homme que la France aime tant afficher est-elle compatible avec l’état des prisons françaises, la situation des gens du voyage et des exclus dans le pays ? N’oublions pas, non plus, l’histoire et gardons en mémoire, avant de condamner les autres, l’attitude de certains Français pendant la seconde guerre mondiale qui ont piétiné scandaleusement les droits de certains hommes, au seul prétexte de leur appartenance à une minorité. N’ayons pas, non plus, des indignations sélectives. Donne-t-on des leçons aux USA devant leur comportement envers les populations noire et mexicaine et la persistance de la peine de mort dans ce pays ? La nature de nos relations de toutes nature et particulièrement commerciales nous en empêche et explique notre retenue. Peut-on croire qu’une humiliation publique de la Chine n’aurait pas immédiatement des conséquences ? Autrement dit, le gouvernement peut-il renoncer à commercer avec la Chine au nom des principes ? Ceux qui réclament à grands cris une position de matamore sont ceux qui ne risquent pas de perdre leur métier du fait d’une réaction chinoise violente. Les intellectuels s’indignent, mais qu’en est-il des chômeurs, des précaires, des exclus ? Au nom de quels principes peut-on refuser d’avoir des relations économiques avec la puissance en passe de devenir à court terme la première puissance mondiale ? Déjà aujourd’hui la Chine crée tous les ans plus d’ingénieurs que l’Europe et les USA réunis. La France importe tous les ans 30 milliards de dollars de produits chinois dont beaucoup sont fabriqués par des entreprises européennes implantées sur place. L'énorme dette de la France se nourrit chaque année du déficit budgétaire annuel qui, lui-même s'alimente à la balance commerciale déficitaire. Tout ce qui peut favoriser les exportations est donc indispensable. Encore une fois, le réalisme politique gouvernemental n’empêche pas la liberté d’expression du citoyen mais l’efficacité est, parfois, plus grande dans la discrétion. Entre hétaïre et rodomont, il existe une juste attitude.

02 novembre 2010

Le Port de Marseille se meurt

Les activités de transit portuaire ont subi une double révolution vers les années 1970 dans les ports de fret : l’arrivée du conteneur et l’informatisation de la manutention. Cette révolution a eu évidemment des conséquences sur la gestion des ports par son impact très fort sur le coût du transit. Une réforme était devenue indispensable. Cette réforme, qui a fait l’objet d’une loi en Juillet 2008 seulement, prévoit que les ports abandonnent leurs activités de manutention des marchandises, des conteneurs et du pétrole, à des entreprises privées. Mais, exception à la généralité, les terminaux pétroliers de Marseille ont été classés « activités d’intérêt stratégique » ce qui permet au Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) de créer une filiale, Fluxel, détenue à 60% par GPMM et à 40% par des partenaires privés, où doivent être transférés les 220 salariés des terminaux, avec une garantie de salaire (même en cas de baisse de l’activité de raffinage) et d’emploi à vie, garantie de retour au sein du port en cas où Fluxel connaîtrait des difficultés économiques et financières. Mais la CGT a toujours refusé cette réforme. Comme, contrairement à toutes les règles, la CGT Marseille a un monopôle syndical qui s’impose aux dockers, elle profite de cette position abusive pour imposer ses revendications par tous les moyens. Il s’est installé, dans la population des dockers, une ambiance mafieuse, dont le chef d’orchestre est le représentant local de la CGT, où le métier se transmet par cooptation voire de père en fils et où le docker ne reconnaît aucune autorité autre que celle du syndicat. L’action négative de la CGT Marseille qui perdure depuis des années et déjà conduit la SNCM au bord de la faillite, a donné au port de Marseille une réputation détestable due aux grèves et aux conflits sociaux répétitifs. Une partie de la clientèle est allée chercher ailleurs une meilleure fiabilité de manutention. Ceci a eu un impact très fort sur l’activité du port qui, comparé aux autres ports méditerranéens, a perdu depuis 1980 le tiers de sa part de marché en termes de trafic global et la moitié en termes de trafic de conteneurs. La dernière entreprise Marseillaise de réparation navale a été liquidée en Mars 2009. La dernière grève de 36 dockers a duré 33 jours, obligé 78 navires de fret à attendre en rade de Marseille (combien d’entre eux iront maintenant à Anvers ou Gènes plutôt qu’à Marseille ?) et coûté de 20.000 à 30.000 Euros par jour à chaque affréteur et plus de 600 millions d’Euros au pays. Elle s’est terminée après que la CGT a obtenu le versement d’une « prime de stress » (sic !) de 150 Euros à chaque docker avec, comme d’habitude, un étalement dans le temps des retenues sur salaire pour fait de grève. Comme la mafia en Calabre, la CGT Marseille impose sa loi par la force en faisant fi de l’intérêt général. Il est vrai que rien ne l’arrête, ayant déjà pratiqué la piraterie en 2005 !

31 octobre 2010

N’oublions pas l’Histoire

« L’incompréhension du présent naît de l’ignorance du passé » disait Marc Bloch. Cette citation prend aujourd’hui tout son sens lorsque l’on écoute les revendications des manifestants et des syndicats depuis plusieurs semaines. La vie des Français devient difficile, ces derniers protestent pour préserver leur niveau de vie et leurs avantages acquis. La question qui se pose est de savoir si cette revendication, aussi naturelle soit-elle, est raisonnable voire légitime. Il faudrait rappeler aux citoyens français que ces avantages et leur niveau de vie ont été rendus possibles parce que les états développés ont construit depuis longtemps leur richesse en exploitant le reste du monde. N’oublions pas que la traite des noirs a fourni depuis le XVème siècle une main d’œuvre corvéable à merci. N’oublions pas que l’abolition de l’esclavage n’a été promulguée en France qu’en 1817, en Angleterre en 1807, aux USA en 1808, au Brésil en 1850 et n’a définitivement disparu qu’en 1867. L’empire colonial français qui a perduré de 1546 à 1962 a permis au pays d’approvisionner à bon compte les ressources nécessaires à son développement (personnel, pétrole, minerais divers, ressources alimentaires). L’industrialisation de la France date du début du XIXème siècle comme dans beaucoup d’autres pays développés. Mais, aujourd’hui, les pays dont les ressources ont permis le développement des sociétés industrielles occidentales se font une place de plus en plus grande dans le monde. Ils consomment eux-mêmes leurs ressources et deviennent des compétiteurs des pays développés pour celles qu’ils ne possèdent pas. Le transfert de richesses est inéluctable et les pays développés ne devraient pas oublier qu’ils doivent leur niveau de vie actuel à l’exploitation de pays qui, aujourd’hui, revendiquent leur place dans le monde moderne. Le Monde étant un système fermé à ressources limitées, ce transfert se fait obligatoirement au détriment de ces pays développés. La France n’y échappe pas. La désindustrialisation du pays en est un signe évident. Entre 1980 et 2007, la France a perdu 36% de ses emplois industriels et la part de l’industrie dans le PIB est passée de 24% à 14% durant la même période. Certes, la désindustrialisation a plusieurs causes et les délocalisations sont, quant à elles, dues le plus souvent à la recherche d’une proximité avec de nouveaux marchés. Il n’en reste pas moins vrai que la concurrence des pays émergents est une cause importante de cette désindustrialisation. Le pays s’appauvrit et l’activité financière et spéculative ne peut que cacher un temps cette vérité en nous conduisant de crise en désastre. La seule façon de résister à ce tsunami est d’innover et d’augmenter notre quantité de travail. Courage et imagination sont nos seules armes. Depuis un demi-siècle, nous vivons au-dessus de nos moyens en empruntant et en laissant aux générations futures le soin de régler une dette qui s’élève actuellement à 1900 milliards de dollars (les lycéens et étudiants qui manifestent feraient bien de ne pas l’oublier). Nos systèmes sociaux dont nous sommes si fiers ne fonctionnent que grâce à l’emprunt. Ne pas accepter cette évidence relève du suicide collectif. « L’obligation de subir donne le droit de savoir » a dit Jean Rostand. La pédagogie semble manquer en France.

26 octobre 2010

Le retour de manivelle


Rappelez-vous Dunkerque ! C’est une raffinerie que Total voulait fermer. Les syndicats, dans leur rôle, ont réussi à obtenir une décision judiciaire qui a exigé la reprise du fonctionnement de la raffinerie. En Mars 2010, Total a réaffirmé sa volonté de fermer la raffinerie, la France important de plus en plus de pétrole raffiné. Et puis, les mouvements de grèves sont arrivés et certains leaders syndicaux locaux ont organisé le blocage des raffineries. La conséquence est double : la France a augmenté ses importations de pétrole raffiné et Total profite de ce mouvement pour fermer définitivement quelques unes de ses raffineries, en confirmant celle de Dunkerque et en annonçant celle de Reichstett. Quel retour de manivelle ! Au bout du compte, les grévistes ont scié leur branche ! La culture économique est décidément ce qui manque le plus aux Français. Pendant ce temps, 36 dockers à Marseille bloquent le port qui meurt à petit feu depuis des dizaines d’années, ce qui coûte 36 millions d’Euros par jour à la Ville. Qui va payer ? Le conflit a déjà coûté à la ville 600 millions d’Euros. Le combat des travailleurs pour leurs conditions de travail est légitime et le droit de grève est constitutionnel. Mais le recours systématique à ce dernier le rend inopérant. En France, contrairement à bien des pays européens, le mot « consensus », qui veut dire réelle négociation, est une injure et est traduit comme étant une « compromission » inadmissible. Ceci mesure le chemin à parcourir pour obtenir une gestion du pays où existe une réelle volonté de négociation entre les acteurs économiques.

20 octobre 2010

Indigne ou ridicule ?

L’indignité des comportements se répand comme une traînée de poudre.
Entendre des (ir)responsables syndicaux « jusqu’au-boutistes » appeler au blocage de l’activité économique du pays par des salariés protégés, sachant pertinemment que cela provoquera la fermeture d’entreprises petites et moyennes et donc du chômage pour des salariés non protégés, est absolument stupéfiant et révoltant.
Faire descendre les lycéens dans la rue pour pouvoir claironner que le nombre de manifestants est en augmentation, tout en sachant pertinemment que c’est un appel d’air pour les casseurs et les voyous, est indigne.
Avoir refusé de signer le décret d’application de la loi sur le CPE rend J. Chirac responsable de cette propension des politiques de l’opposition et des syndicats d’en appeler au dictat de la rue, piétinant ainsi sans vergogne la démocratie représentative.
Quoi de plus indigne que d’incendier un établissement scolaire ?
Quoi de plus ridicule que de voir l’agitation déclenchée par ceux qui ne sont pas concernés par la réforme des retraites ?
Quoi de plus indigne que de voir des leaders syndicaux irresponsables avoir fait de Marseille un port de seconde zone pour longtemps, alors que cette ville a été pendant longtemps le second port européen ?
Quoi de plus ridicule que d’entendre tous les syndicats de branches faire de la surenchère et courir après la notion de pénibilité pour leur métier, afin de se mettre à l’abri d’une modification de l’âge du départ en retraite ? N’entend-on pas les salariés du secteur bancaire, toute honte bue, parler de la pénibilité « morale » de leur métier !!!
Quoi de plus ridicule que de voir des lycéens, à l’inculture économique abyssale, reprendre, sans comprendre, des slogans qui portent en eux une contradiction complète avec leurs propres intérêts ?
Quoi de plus indigne que d’entendre les lycéens reprendre les mêmes slogans utilisés contre l’extrême droite lors de la dernière élection de J. Chirac !
Quoi de plus ridicule que cette référence à Mai 1968 ?
Quoi de plus ridicule que cette guerre picrocholine des chiffres entre les syndicats et le ministère de l’Intérieur !
Quoi de plus attristant que de voir un peuple regarder le travail comme un asservissement ?
Quoi de plus consternant que de voir les acteurs responsables de cette situation dangereuse pour tous n’avoir plus qu’une seule préoccupation : comment sortit de là sans « perdre la face » !!
Quoi de plus indigne pour des responsables que le déni de réalité ?
Dans un moment d’accablement, Einstein s’est écrié : « Il n’y a que deux infinis : l’Univers et la bêtise humaine … Et encore, pour l’Univers, je n’en suis pas sûr » !!!

19 octobre 2010

Une société malade

La société industrielle traditionnelle est remplacée peu à peu par une société qui se « tertiarise » dans la production de biens immatériels (recherche, communication, aides à la personne, coaching plus ou moins fantaisistes, expertises plus ou moins sérieuse, etc…). Le résultat de cette transformation est double : une prédominance des activités financières des entreprises permises par la dérégulation et la liberté de circulation des capitaux, une répartition nouvelle des activités de production par leur délocalisation dans des zones à moindres coûts. Une société capitaliste classique se caractérise par une activité industrielle qui transforme les ressources disponibles et qui se gère par les conflits attachés à la distribution de ces ressources générés par des acteurs sociaux partageant la même vision du monde économique. Dans une telle société, le travail conserve sa valeur positive. Aujourd’hui, depuis quelques années, s’est développé un capitalisme purement financier qui ne produit aucun bien matériel et dans lequel la recherche frénétique des acteurs de ce capitalisme (spéculateurs et managers financiers internationaux) met à mal les économies réelles avec la complicité active des agences de notation, ce qui nous a conduit à la crise profonde que nous connaissons. Dans cette société naissante, les riches sont devenus plus riches et les pauvres plus pauvres, la crise ayant accentué la différenciation des situations sociales et économiques. On assiste, impuissant (impuissance partagée par l’État), à une séparation croissante entre l’économie financière et l’économie réelle guidée par la volonté d’enrichissement personnel des dirigeants et de leurs affidés. Ce qui conduit à une rupture entre le monde économique globalisé et le monde social, rupture dont la conséquence est la volonté grandissante des salariés de diminuer la part du travail dans leur vie (d’où les révoltes contre le recul des dates de départ à la retraite), écœurés par leur incapacité d’assurer le moindre contrôle sur le monde économique globalisé et financiarisé et par l’incapacité de l’État de s’opposer à cette dérive. On assiste aux effets nuisibles de l’économie financière dans le monde des salariés (suicides, maladies, stress, violences…). Tout se passe comme si le monde social, désorienté et angoissé, ne trouvait plus la force de réagir et de se défendre. Il est surprenant que l’opinion, malgré le nombre impressionnant des victimes, ne se soit pas mobilisée pour éradiquer les ressorts de la crise, que se soit aux USA ou en Europe. La crise n’a pas suscité de réactions massives de la part des victimes (le silence des victimes), qui ont abandonné leur plainte devant l’intervention massive des États dont ils attendaient une contrepartie permettant de réprimer les excès de la spéculation, ce qui ne s’est pas produit. Ces effets sont amplifiés par le fait que, dans un monde en évolution rapide, les avantages acquis sont perdus d’avance. Désorientés, les individus recherchent leur défense dans un égoïsme et un communautarisme grandissants qui mettent à mal la société tout entière et l’Europe dans son ensemble.

12 octobre 2010

Les lycéens et la retraite


Les lycéens et les étudiants sont « descendus » (de quoi, au fait ?) dans la rue pour manifester contre le projet de réforme des retraites. Caressés dans le sens du poil par les organisations syndicales traditionnelles, ils pensent renouveler l’aventure du CPE. Ce mouvement est consternant. Il montre un manque de réflexion objective et un amateurisme atterrant. Et ceci, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, ces lycéens se sont laissé entraîner par les sirènes syndicales, préoccupées par le succès de la participation aux défilés. Afin d’augmenter le nombre des manifestants, un bon moyen a été de débaucher des jeunes qui demandaient que ça.
Puis ce mouvement montre un amateurisme et une méconnaissance du dossier préoccupant. Le slogan adopté sans réflexion par ces « jeunes » est de combattre une réforme qui, disent-ils en reprenant sans réfléchir un slogan syndical, prolongent des seniors au travail alors que les jeunes sont au chômage. Or, il suffit de regarder un peu plus loin que son nombril pour s’apercevoir que, dans tous les pays occidentaux où le taux d’emploi des seniors est meilleur qu’en France, le taux de chômage des jeunes est aussi plus faible. Ce n’est pas au système de retraite de pallier à un mauvais fonctionnement de l’économie au taux de croissance trop faible et aux comportements condamnables des managers d’entreprises.
Ensuite, il est navrant d’entendre des citoyens d’une vingtaine d’années, encore accaparés par leurs études (ou qui devraient l’être), se dire préoccupés par leur retraite qui aura lieu dans quarante ans. Il est d’une évidence aveuglante que le système des retraites subira bien d’autres modifications d’ici là. Qui peut dire aujourd’hui ce que sera le monde et la place du pays dans ce monde, dans quarante ans ?
Enfin, nous avons l’énorme privilège de vivre dans un pays démocratique. C’est-à-dire un pays dans lequel une majorité de citoyens a confié à des parlementaires le soin d’organiser la vie sociale pendant la durée de leur mandat. Tous les cinq ans, chacun a le droit de remettre en question cette gestion en envoyant au Parlement une majorité différente. Or, le Parti Socialiste a explicitement dit qu’il remettrait sur le tapis des négociations le système des retraites en prenant le pouvoir dans deux ans. Donc, dans deux ans, chacun aura la possibilité de remettre en question ce qui a été aujourd’hui voté par le Parlement. Les jeunes devraient comprendre cela. Mais il faut bien dire que le mauvais exemple vient d’en haut. En effet, les syndicats de la SNCF, des transports urbains, des dockers et autres professions protégées, appellent à cette manifestation pour obtenir le retrait d’un projet gouvernemental démocratiquement voté, alors que la remise en question des systèmes spéciaux de retraite ne sera abordée qu’en 2017, c’est-à-dire après l’échéance électorale majeure de 2012. Il est donc difficile de reprocher aux lycéens la mauvaise action des syndicats.
À quand des syndicats se battant pour l’amélioration de la situation économique ? A-t-on vu un seul syndicat s’indigner des pratiques bancaires et financières avant et pendant la crise qui a plongé le pays dans une crise économique sans précédent ?
Un pays dont les jeunes de vingt ans rêvent de leur retraite est un pays malade.

10 octobre 2010

Pénibilité


Les jeux sont (pratiquement) faits, la date légale de départ à la retraite est repoussée de 60 à 62 ans. Rien ne pourra changer ce fait. Tout le monde en est convaincu, malgré les discours rodomonts des syndicats ou des hommes politiques de l’opposition. Les acteurs jouent donc le dernier acte d’une pièce bien connue : comment faire pour ne pas perdre la face ? Comment peut-on imaginer un seul instant que le gouvernement puisse abandonner son projet comme le demandent ces acteurs sans perdre totalement sa crédibilité ? Bien entendu, les syndicats s’engagent dans la seule voie qui leur est ouverte aujourd’hui, celle de la grève, qu’elle soit ponctuelle, reconductible ou générale. La situation économique du pays est grave. Donc, conscients de la gravité de ce choix, ils s’empressent, sans vergogne ni pudeur, de clamer que le gouvernement est le seul responsable, étant eux-mêmes ni coupables ni responsables ! Nous sommes spectateurs d’une pièce jouée maintes fois : trouver un prétexte pour crier victoire malgré tout. Les salariés sont parfaitement conscients que les jeux sont faits et ils s’agrippent à la seule opportunité qu’il leur reste : l’exception pour les travaux pénibles. On assiste ainsi à une course effrénée de chaque salarié aux arguments, plus ou moins fallacieux, pour convaincre que son travail est objectivement pénible. La chaleur, la répétitivité, la pression du management, les intempéries, les charges, les horaires, le stress, le risque d’agression, la pression des objectifs, la dangerosité, les conditions de travail (un vrai fourre-tout) tout est bon pour démontrer la pénibilité de son activité (si son travail est pénible, pourquoi pas le mien ?). On en arrive à se demander s’il existe un emploi quelconque qui ne puisse être qualifié de pénible. Sur ce chapitre également, tout le monde sait parfaitement ce qui va se passer. Il est impossible que le gouvernement enclenche une mécanique infernale en classant les métiers en catégories pénibles ou supportables. Il ne peut que renvoyer aux conventions collectives ou proposer des critères individuels, ce qui veut dire qu’il y aura nécessairement des frustrés. Pour sortir du blocage, il n’y a qu’un seul scénario, dans lequel le gouvernement fait une exception du report de 65 à 67 ans pour une retraite à taux plein pour les femmes ayant eu des interruptions de carrière et pour les salariés entrés dans le monde du travail très tôt. Cela permettra aux syndicats de crier victoire, au gouvernement d’affirmer qu’il n’a pas céder sur l’essentiel … et tout le monde sera content.

06 octobre 2010

Dérive

La France n’a pas le Président qu’elle mérite. De ceci, la grande majorité des Français est convaincue. Les sondages, les uns après les autres, le confirment à l’envi.
« Surfant » sur cette vague contestataire, les médias, courant après l’audience et utilisant toutes les ficelles du populisme, sombrent aujourd’hui dans la vulgarité. Faisant appel à des « amuseurs » qui s’intitulent humoristes, on entend sur les ondes, on voit à la télévision, on lit dans les journaux des propos dont la provocation tombe dans l’obscénité. C’est ainsi que l’on entend, sur une radio du Service Public, un humoriste (?) répéter plusieurs fois « j’encule Sarkozy », c’est ainsi qu’on laisse sur une chaîne de télévision du Service Public une chroniqueuse (?) s’exclamer « je souhaite voir crever Sarkozy », c’est ainsi que l’on voit des couvertures de périodiques afficher en gros titre « Sarkozy, un voyou ? », c’est ainsi que les journalistes et hommes politiques font assaut de formules affublant N. Sarkozy de tous les défauts du monde et capable de toutes les vilenies. Les analyses politiques se limitent le plus souvent à la critique systématique se résumant souvent à la « petite phrase » qui caresse l’auditoire dans le sens du poil et s’attirant ainsi l’approbation des contempteurs rigolards. Tout cela ressemble à des signaux faibles d’une société à la dérive où la violence se banalise et se répand et où chacun trouve dans le rejet de l’autre les raisons de sa violence. Violence professionnelle où le salarié devient une variable d’ajustement de l’entreprise ; violence économique où la rapacité au gain pousse les financiers à précipiter la ruine de leurs propres clients, violence judiciaire qui disculpe le banquier Société Générale pour condamner le lampiste Kerviel, c’est-à-dire qui punit la conséquence et absout la cause, qui relâche le récidiviste qui, bien entendu, récidive ; violence terroriste, la plus abjecte, aveugle, monstrueuse, animale, exercée par des individus qui ne méritent pas le nom d’hommes. Cette société de la communication isole plus qu’elle ne rapproche, laissant chacun seul en face de ses angoisses dont certains nourrissent leur violence. La société tout entière, civile, politique, médiatique, a un besoin urgent d’une véritable sédation.

04 octobre 2010

Homicide et spectacle

Tous les deux à trois jours une femme succombe sous les coups d’un homme en France (157 en 2009). Toujours en France, près de 2 millions de femmes subissent des violences, des humiliations, des oppressions imposées par des hommes. Les conséquences sont à chaque fois dramatiques. Les femmes victimes souffrent de troubles émotionnels (dépression, boulimie, anorexie …), certaines se suicident. Et une partie meurt carrément sous les coups de leur conjoint. Parmi les victimes, environ 30 % ont été poignardées, 30 % ont été abattues par arme à feu, 20 % ont été étranglées et 10 % ont été rouées de coups jusqu'à la mort. Pour le pays qui s’entête à se dire « Patrie des Droits de l’homme » il s’agit non seulement d’un scandale, mais d’un crime national. Et pourtant, le silence des politiques de tous bords continue de rester assourdissant. Il existe bien, depuis Février 2010, une loi de plus sur le sujet dont le décret d’application est enfin sorti depuis quelques semaines. Mais cette loi ne porte que sur des mesures d’éloignement du conjoint violent et il est à craindre qu’elle ne soit pas plus efficace que ses précédentes. Bertrand Cantat a tué sa femme en 2003 à coups de poings. Il vient de sortir de prison au bout de quatre ans en bénéficiant d’une remise de peine, comme le prévoit la législation. Il a donc « payé sa dette », comme dit le discours populaire. Des hommes politiques sans conscience, comme Arnaud Montebourg (qui préfère réserver ses indignations à TF1) ou Noël Mamère (qui n'en est pas à une provocation près), trouvent d’ailleurs naturel que cet homme, qui a commis un homicide, puisse à nouveau se donner publiquement en spectacle. Bien qu’ayant effectivement « payé » sa dette, avec réduction, il n’en reste pas moins que cet homme a commis un homicide et que la discrétion était ce que l’on aurait pu attendre de lui. Mais il faut croire que c’est un sentiment qui n’existe pas chez ce genre d’individu qui ne comprend pas que sa présence sur scène est une injure à toutes les femmes victimes de violences masculines.

30 septembre 2010

Un monde dérisoire

La société dans laquelle nous vivons – de plus en plus mal pour de plus en plus d’individus – est marquée par la perte de sens des mots, des actes et des idées. Nous sommes entrés dans un monde du dérisoire. Les exemples de cette dérive sont nombreux. Pour en évoquer quelques-uns, du plus caricatural au plus grave :
• Le marketing et la publicité nous abreuvent de discours qui se teintent artificiellement d’un vernis scientifique en affichant des pourcentages s’appliquant à n’importe quoi, qui ne veulent absolument rien dire et qui, de toute façon, sont invérifiables mais qui permettent d’échapper à la publicité mensongère en affirmant que les résultats ventés sont « scientifiquement prouvés ». L’apparente neutralité du chiffre renvoie à une fausse autorité scientifique faite, non pas pour démontrer mais pour endormir et tromper. Les messages portant sur les soi-disant effets bénéfiques sur la santé du consommateur sont tout aussi ridicules, car accompagnés de phrases sibyllines, comme « … dans le cadre d’un régime adapté », qui protègent sournoisement leurs auteurs de toute poursuite judiciaire en cas de contestation. Le marketing fonctionne sur le slogan « arnaquer plus pour gagner plus ».
• Le monde du show-biz est envahi par de soi-disant artistes éphémères, encombrant les ondes et la télévision de prestations vocales construites sur des paroles débiles, voire une diarrhée verbale, accompagnées d’un semblant de mélodie construite sur deux notes et un accord. Le paradigme en la matière est le rap, dont la production délirante inonde le marché du disque d’une logorrhée insupportable
• La production télévisuelle est, de plus en plus, encombrée de séries débiles faisant intervenir de jeunes acteurs (?) totalement inconnus et lamentables qui disparaissent de la scène aussi rapidement qu’ils y sont venus. La télé-réalité, qui est tout ce qu’on veut sauf la réalité, est la vulgarité même offerte en pâture aux téléspectateurs voyeuristes.
• Qu’est-ce qu’un monde où la radio diffuse 4 à 5 fois par jour les cours de la Bourse, comme si l’information était d’une importance capitale aux oreilles des millions de chômeurs, des travailleurs précaires et des sans-logis ?
• Il n’y a pas que la production audio-visuelle qui s’étouffe lentement dans le dérisoire. La production littéraire (?) n’est pas à l’abri du phénomène. Les rayons des libraires sont envahis de livres (mal) écrits (ou commandés) par des individus qui n’ont strictement rien à dire, sinon de raconter leur vie qui n’intéresse personne.
• La société est gangrenée par les experts, les gourous, les coachs, les consultants qui assènent dans un jargon abscons leurs vérités du genre « si vous êtes malade, c’est que vous êtes en mauvaise santé » !
• La crise, les guerres, le terrorisme, les catastrophes font fleurir les « experts » de tout poil dans les médias qui viennent étaler leur incompétence et leur ignorance avec aplomb et suffisance. Les champions en la matière sont les experts économistes (ou qui se disent tels) qui assènent avec assurance leurs prévisions associées immédiatement de l’hypothèse contraire (les poules font des œufs ou, peut-être, l’inverse !). Ils utilisent avec dextérité des statistiques leur permettant de prouver tout et son contraire. Ils auront ainsi toujours raison, mais ils ne servent à rien. N’a-t-on pas vu un « spécialiste » des cours de Bourse faire appel à un « voyant » (sic !) pour crédibiliser ses prévisions !! Les aruspices boursiers ont remplacé la lecture des entrailles par l’interprétation des cours de Bourse. Disraeli disait, à juste titre : « Il y a trois sortes de mensonges : le mensonge, le sacré mensonge et les statistiques ». C’est toujours après une crise que pullulent les experts qui disent l’avoir prévue, alors qu’ils sont restés totalement aveugles, allant même jusqu’à assurer qu’elle ne se produirait pas. Le discours des experts varie sans vergogne (et sans excuse) au gré des fluctuations du monde et penche toujours dans le sens de la tautologie. Les experts se comportent comme un banc de sardines dont les individus changent de cap dans un parfait ensemble. Ils se parent des plumes du paon. Ne voit-on pas un ancien présentateur de jeux télévisés se présenter aujourd’hui comme un expert météorologique et contester les travaux du GIEC à la télévision ?! Pourquoi la télévision offre-t-elle une telle audience au dérisoire si ce n’est que parce qu’elle vit du dérisoire ?
• La langue de bois des politiques se pare, elle aussi, d’une apparence de sérieux en utilisant les statistiques et les pourcentages. Il est plus facile de parler d’un taux de chômage que de la souffrance des chômeurs, de l’angoisse de tous ceux qui craignent de perdre leur emploi et de tomber dans la précarité. Qui peut vérifier le chiffre ? … alors que la souffrance se voit jusque dans la rue ! C’est ainsi que le chiffre montre que la richesse du monde s’accroît alors qu’il y a toujours plus de pauvres, de morts de faim et de soif, de pauvres de plus en plus pauvres. Le chiffre permet le « politiquement correct ». Quel homme (ou femme) politique parle de la France ? Aucun. Ils sont tous plus préoccupés de leur destinée que du destin du pays.
• Dans un monde aussi dérisoire, dans un monde où il devient impossible de croire ou d’espérer, la vie sociale se structure par le refus, ce qui fabrique une société où les antagonismes, voire la violence, font flores et prospèrent sur le terreau du mensonge. Cette société du refus est conduite par des meneurs (les riches, les patrons, les financiers, les dictateurs,…) qui perdent tout sens de la moralité et renforcent ainsi le rejet des autres et leur révolte. Le nationalisme et l’égoïsme sont devenus des vertus nationales dans le monde entier. Chaque pays se préserve, coûte que coûte, des autres nations et, dans chaque pays, chaque citoyen se préserve de ses compatriotes.

25 septembre 2010

Le modèle suédois

Les hommes politiques vivent un véritable cauchemar. En effet, depuis toujours, la référence au modèle suédois fait flores dans les discours politiques de tous bords. Dès qu’il s’agit de démontrer qu’il fait meilleur ailleurs, la Suède est citée en exemple. Ce pays est toujours présenté comme le parangon de l’État providence et de l’intégration réussie, un pays où les négociations syndicales sont toujours conclues dans le consensus, où le prélèvement fiscal élevé (55% du PIB) est accepté en échange d’une protection sociale importante. Et voilà que les dernières élections font entrer au Parlement une vingtaine de députés néo-nazis (sous le nom de Parti Démocrate !). Tout d’un coup, le voile tombe et l’on s’aperçoit que, comme tout le monde, la Suède est confrontée à la mondialisation qui pousse le citoyen à détester le plombier polonais. Les hommes politiques français décontenancés sont, soudainement, privés de leur alibi préféré. Comment porter aux nues un des rares pays européens où l’extrême droite siège au Parlement ? Au-delà de l’embarras de nos politiciens, il ne faut pas se cacher le fait que c’est le signe qu’il se passe quelque chose de grave en Europe, parce que cette consécration de l’extrême droite se produit aujourd’hui dans un pays de bonne gouvernance qui a su faire notablement reculer les injustices sociales. La Suède a toujours été un pays où l’immigration s’est déroulée dans les meilleures conditions pour les immigrants. Elle a accepté, par exemple, plus de réfugiés irakiens que les USA et le Canada réunis. Malgré cela, l’intégration des immigrants, tant vantée, n’a pas empêché l’exaspération du citoyen suédois. La peste brune, après avoir conquis l’Autriche, la Hongrie, le Danemark, la Hollande, la Norvège, (faut-il ajouter à cette liste la France et l’Italie ?) investit aujourd’hui la Suède. C’est cette pandémie qui est grave et qui s’épanouit sur le terreau de la peur et de la xénophobie. C’est pourquoi la campagne sécuritaire dans laquelle est entrée la France est dangereuse, voire menaçante. Gardons-nous de nous laisser entraîner par ces réflexes xénophobes qui ont vite fait de virer au racisme. La période de la Seconde Guerre Mondiale a montré qu’il sommeillait au fond de beaucoup de Français une xénophobie capable de mener certains d’entre eux aux pires exactions. Dans une situation faite de difficultés, voire de peur, il est tellement facile de rechercher dans un bouc émissaire la cause de nos angoisses.

22 septembre 2010

Neuroéconomie

J’ai souvent écrit, dans ces lignes, que l’Économie n’était pas une science, incapable qu’elle est de faire des prédictions (et non pas des hypothèses) vérifiables et falsifiables. Forte d’explications sur le passé, l’Économie n’a jamais su anticiper les évolutions économiques de la société et du monde. Bien entendu, les formulations « scientifiques » des économistes s’appuient sur des hypothèses, comme les mathématiques s’articulent sur des axiomes. Or, parmi ces hypothèses, l’une d’entre elles est l’existence d’un consommateur ou d’un producteur type agissant rationnellement dans ses choix. Tout le monde sait bien que l’acteur type est un fantasme et que la rationalité du choix est un leurre. Conscients de cette défaillance dans la théorie, les économistes se lancent aujourd’hui dans une nouvelle voie, celle qui s’intitule neuroéconomie. La neuroéconomie se veut au croisement de l’économie et des sciences cognitives, en voulant prendre en compte les facteurs cognitifs et émotionnels dans les mécanismes de prises de décision concernant les choix d’investissements, de placements et d’emprunts, d’achat, de production, de stratégie d’entreprise. Cette neuroéconomie a la prétention de prendre en compte les réactions et le fonctionnement du cerveau, en utilisant les résultats de l’imagerie médicale qui permet de repérer les zones cérébrales activées au moment des prises de décision (sic !!). L’objectif est d’obtenir un hypothétique modèle du comportement des acteurs. C’est-à-dire que les économistes, conscients de la faiblesse du principe de rationalité de comportement d’un acteur type, cherchent à le remplacer par un modèle de comportement d’un cerveau type ! Peut-on parler d’un progrès ? Ne passe-t-on pas d’une utopie à un mirage ? Il y a une explication à ce subit intérêt des économistes pour les neurosciences. Nous ne sommes pas prêts d’oublier les conséquences des comportements inqualifiables des acteurs financiers qui ont conduit le monde dans une crise dont nous n’avons pas fini de payer les conséquences. Or, parmi ces acteurs, il y a les traders, dont Jérôme Kerviel est devenu l’emblématique représentant. Les économistes focalisent leurs recherches en essayant de créer un trader type, en s’interrogeant sur les motivations conduisant aux choix réalisés par cet acteur. Lorsqu'on mesure l'activité cérébrale d'un individu qui doit décider de vendre ou d'acheter un titre en Bourse, on observe la mise en jeu de différentes zones du cerveau actives également lors d'autres circonstances émotionnelles de la vie. Ce sont ces observations que les économistes veulent utiliser pour, une fois de plus, expliquer le passé ! Je parie, sans risque, que cette entreprise est vouée à l’échec. Et cela pour une raison simple. Remplacer 6 milliards d’individus par un individu type était déjà une gageure. Remplacer 100 milliards de neurones par individu par un cerveau type est une utopie sans issue. À la simplification outrancière des processus économiques va s’ajouter une schématisation grossière du fonctionnement cérébral.

11 septembre 2010

Le théâtre et la retraite

La politique consiste à présenter aux citoyens une pièce de théâtre parfaitement organisée tout en lui faisant croire que les acteurs improvisent leurs rôles face aux évènements. Le débat sur les retraites qui secoue la société depuis des mois en est un parfait exemple. Tous les acteurs connaissent leur rôle sur le bout des doigts et le jouent avec maîtrise. Les syndicats jouent les révoltés en face « d’un recul social » et « d’une absence de concertation », les parlementaires de l’opposition jouent l’indignation devant « une injustice insupportable », les parlementaires de la majorité s’enthousiasment devant « le courage » du gouvernement, ce dernier prend la posture de la résolution courageuse, distillant les amendements à son projet, prévus de longue date, au fur et à mesure des manifestations pour montrer son « écoute du peuple ». Et tous connaissent depuis longtemps l’aboutissement de ce mélodrame : l’âge légal de la retraite passera de 60 à 62 ans et l’âge d’une retraite à taux plein de 65 à 67 ans. Les manifestants eux-mêmes savent pertinemment que, malgré leurs slogans protestataires, cela ne changera pas. Toutes les amodiations distillées à mesure des évènements font partie d’une partition jouée d’un commun accord par l’ensemble des acteurs. Malgré le fait que nous connaissons tous le final de ce mélodrame, il est néanmoins possible de se poser quelques questions.

• Avant que la durée légale ne passe, sous le « règne » de F. Mitterrand, de 65 à 60 ans, les syndicats ne parlaient pas de pénibilité. Si ce qui ne posait pas de problème à 65 ans, pourquoi cela en pose-t-il soudain et avec une telle acuité à 62 ans ?
• La plus grande injustice du système n’est-elle pas la réforme Balladur qui a porté à 25 ans la durée de calcul du montant de la retraite des salariés du privé en laissant à 6 mois cette durée pour les fonctionnaires, alors que le déficit des systèmes de retraite du public est financé par le privé ? On remarquera le silence complice des syndicats et de l’opposition sur cette véritable injustice. Le silence des syndicats n’est pas étonnant puisqu’ils représentent essentiellement, pour ne pas dire uniquement, les fonctionnaires.
• Le projet prévoit que les femmes fonctionnaires ayant eu 3 enfants garderont le bénéfice des 60 ans. Pourquoi cet avantage n’est-il pas offert aux femmes travaillant dans le privé ? Une caissière de supermarché est-elle moins méritante qu’une guichetière des Postes ?
• La gauche met en avant l’injustice faite aux femmes par un âge d’obtention d’une retraite à taux plein porté à 67 ans alors que, pour la plupart d’entre elles, la durée de cotisation minimale est inaccessible du fait des maternités et des emplois à temps partiel. C’est ignorer volontairement (attitude politicienne) que ce problème n’est pas un problème de retraite mais un problème d’iniquité de la vie salariale et sociale et qu’il n’appartient pas au régime de retraite de pallier une injustice économique mais aux entreprises de respecter l’égalité de traitement entre hommes et femmes.
• Crier au loup en disant que le report de 60 à 62 ans de l’âge légal est un véritable séisme ne peut faire oublier le séisme que ce fut pour les entreprises que le report de 65 à 60 ans !

Voilà quelques questions légitimes qui sont étrangement passées sous silence par les différents protagonistes qui font semblant de s’étriper sur des sujets que tout le monde sait réglés.

05 septembre 2010

Le zéro et l’infini

Les mathématiques conduisent parfois à des situations indéterminées. En particulier, la manipulation des infinis peut déboucher sur de telles situations. Par exemple, la multiplication de zéro par l’infini (0*∞) débouche sur une incertitude sur le résultat de l’opération qui peut être zéro, l’infini ou un nombre fini. Lorsque l’on se pose la question de la possibilité de la vie dans l’Univers, on se trouve dans une telle situation. En effet, l’existence d’une vie intelligente sur Terre relève d’une série de probabilités infimes dont le produit fournit un résultat tellement faible que l’on peut considérer cette existence comme un véritable miracle de la nature (Cf. « L’Homme, un accident de l’Histoire » : 4/6/2008). D’autre part, le nombre d’étoiles dans l’Univers est infiniment grand, puisque l’on estime qu’il existe une à deux centaines de milliards de galaxies avec, dans chacune d’elles, une centaine de milliards d’étoiles. Autour de chacune d’elles, peuvent orbiter des planètes susceptibles de recevoir la vie. On est donc en présence d’une probabilité infiniment grande pour qu’existe une planète où la vie ait pu se développer. Le produit de cette probabilité avec celle qui est attachée aux processus conduisant effectivement à la vie est donc semblable à l’indétermination évoquée ci-dessus. Il est donc impossible de prouver la possibilité ou l’impossibilité d’une vie extra-terrestre. Cette question restera toujours indécidable. Le théorème de Gödel est peut-être à généraliser ?

18 août 2010

OGM et obscurantisme

Une fois encore, les « faucheurs volontaires » ont manifesté leur obscurantisme illégal en détruisant une parcelle de vigne génétiquement modifiée appartenant à l’INRA. Cette action est, en effet, tout d’abord illégale. La plantation de cette vigne a été réalisée parce que la loi l’autorise. S’opposer à une loi par tout autre voie que celle qui consiste à modifier la loi par l’élu est illégale et relève du terrorisme. Que dirait-on si les « accros » du vélo s’en prenaient aux automobiles en les brûlant comme le font les voyous ? Que dirait-on si les fanatiques du « bio » passaient leur temps à détruire les récoltes traditionnelles ? Une société, dans laquelle des citoyens se permettent de braver la loi, devient rapidement invivable. Nous vivons dans une démocratie où le seul choix acceptable est celui que fait la majorité des citoyens. Une minorité qui impose par la violence, quelle qu’elle soit, son point de vue, verse dans l’anarchisme. C’est, ensuite, obscurantiste. Les recherches entreprises sur les OGM permettent, non seulement de lutter contre certaines maladies ou parasites des produits agricoles, mais aussi d’obtenir des molécules permettant la recherche de nouveaux médicaments. Qui peut dire que ce type de recherche ne va pas dans le sens du progrès pour le bienfait du plus grand nombre ? S’opposer à ces recherches relève de l’obscurantisme le plus grave, dont l’histoire est malheureusement féconde. Bien entendu, cela ne veut pas dire que tout peut être fait sans précautions. La plus indispensable d’entre elles étant d’éradiquer tout risque de porter atteinte à la biodiversité. Rien ne serait plus désastreux qu’un monde où l’uniformité régnerait partout. Si la loi n’est pas assez restrictive sur ce point, alors il faut changer la loi. C’est la seule voie démocratique.

14 août 2010

Le travail

Depuis des mois et sans aboutir, les partenaires sociaux discutent et tentent de rendre objective la notion de pénibilité du travail, dans la recherche d’une difficile équité. Cette notion est tellement vague et tellement sujette à interprétation subjective que cette discussion ne peut que s’enliser et risque de perturber fortement la « concertation » sur l’allongement de l’âge légal de la retraite et de la durée de cotisation, prévue en Septembre. Les syndicats veulent, à tout prix, imposer la prise en compte de ce concept de pénibilité pour obtenir une réduction de la durée de cotisation et éviter le recul de l’âge légal de départ en retraite pour certaines catégories de travailleurs. Il est à craindre que, les syndicats étant foncièrement opposés à l’allongement de cette durée, ils tentent d’étendre de manière extensive cette notion de pénibilité. Nous allons assister à un déluge de démonstrations venant de toutes les corporations, tentant de prouver la pénibilité de leur travail spécifique. Or le concept de pénibilité est complexe car il s’agit de savoir, en premier lieu s’il est individuel ou collectif, en second lieu s’il est attaché à la notion de travail ou à celle d’emploi. Il n’est ainsi pas facile d’aborder ce concept de manière objective. Un premier critère d’objectivité est la possibilité de la mesure qui écarte toute interprétation tendancieuse et subjective. Peut-on mesurer la pénibilité d’un travail ? Poser cette question revient à identifier les conséquences d’un travail dit pénible afin de les mesurer, ne serait-ce que par leur nombre et leur fréquence. On peut, par exemple, mesurer le nombre et la fréquence d’accidents ou d’altérations physiques dus à un travail. C’est la voie individuelle prise par le gouvernement qui associe pénibilité et handicap physique constaté. Les syndicats ont une approche davantage attachée à la notion collective d’espérance de vie, notion purement statistique. Il est beaucoup plus difficile de faire les mêmes mesures sur le « stress ». Une fracture osseuse possède une réalité objective, indépendante de toute interprétation. L’anxiété n’est pas de même nature. Elle dépend de l’individu de façon importante. Si le stress devient un élément de pénibilité, alors un même travail peut être pénible pour un individu et ne pas l’être pour un autre. Cette situation est extrêmement fréquente. Enfin, il faut éviter le piège, ou la tentation, consistant à confondre prise de responsabilité et pénibilité si l’on veut éviter de classer pratiquement tous les métiers comme étant pénibles !
Par contre, il convient de distinguer la pénibilité de la « dangerosité ». Le dictionnaire n’apporte aucune aide dans cette distinction. En effet, on trouve que « danger » est une situation où l’on a à redouter un mal quelconque. « Mal » est défini comme ce qui est pénible. La définition de « pénible » est une situation où l’on éprouve de la fatigue. Ainsi donc, si l’on en croit le dictionnaire, est dangereux ce qui fatigue, ce qui, sans être totalement faux, est manifestement excessif ! Un travail dangereux n’est pas forcément pénible. Il est dangereux de sécuriser les pistes de ski, ce qui n’est pas nécessairement pénible. Inversement, il est pénible de réaliser un travail répétitif sur une chaîne d’emballage, sans que ce soit obligatoirement dangereux. Il n’y a pas de bijection entre ces deux concepts. La dangerosité se mesure à la nature des risques encourus par les individus. Ainsi, le métier de pompier est assurément dangereux (et sûrement pénible) alors que celui de conducteur de TGV ne l’est pas. Il doit être possible de dresser une carte des métiers en fonction de ces deux critères à la fois et de déterminer des zones dans lesquelles le nombre d’années de cotisation pourrait être réduit d’un certain nombre d’années. Par exemple, un métier classé à la fois très dangereux et très pénible (pêcheur en mer, mineur) se verrait alloué une réduction de 5 années alors qu’aucune réduction ne serait possible pour un métier ni dangereux ni pénible. De manière intermédiaire, un métier relativement dangereux et modérément pénible (grutier) bénéficierait d’une réduction de 2 ans. Un métier dangereux mais sans pénibilité particulière (entretien sur autoroutes) ou un métier pénible mais sans danger (caissière de supermarché qui n’encoure que le danger de se faire licencier !) bénéficierait également d’une réduction de un ou deux ans.
Il n’en reste pas moins que l’exercice reste difficile car les conditions de travail et de management influent de façon considérable sur la dangerosité et la pénibilité d’une tâche. Selon la nature des outils utilisés (robots par exemple) une tâche peut être plus ou moins pénible. Selon les mesures de sécurité prises, une tâche peut être plus ou moins dangereuse. Or, les conditions de travail sont variables d’une entreprise à l’autre, même si la loi impose un minimum de règles. Comme il est impossible d’envisager qu’un salarié se voie attribué une réduction d’années de cotisation et que cette réduction soit refusée à un salarié exerçant le même métier mais dans une entreprise différente au prétexte que les conditions de travail sont meilleures, comment, dans ce cas, prendre une mesure collective ? À vrai dire, il est à craindre que, lors de la discussion qui s’annonce entre le gouvernement et les syndicats, l’objectivité de l’analyse ne soit pas invitée ! Il reste deux vérités incontournables. Tout d’abord, avec une population vieillissante de plus en plus nombreuse (l’espérance de vie augmente d’un trimestre tous les ans !), le temps de la vie consacré au travail ne peut qu’augmenter puisque ce sont les actifs qui cotisent pour les retraités. Ensuite, ces discussions byzantines sur l’âge de la retraite font croire que le travail est une calamité dont il faut se débarrasser le plus tôt possible. Or, le travail est un élément essentiel de la dignité humaine et il est faux d’affirmer qu’il est nécessairement source de souffrance, comme on peut l’entendre dans la bouche de certains syndicalistes. Il est, bien souvent, cause de satisfaction et de justification d’une existence, ce qui n’est pas rien. D’ailleurs, cette attitude consistant à assimiler travail et souffrance est une insulte insupportable envers tous les chercheurs d’emplois qui perdent confiance en eux faute d’un travail. La posture, prise par certains, consistant à affirmer que la durée du travail est mortifère et que le travail lui-même est une aliénation parce que le contrat de travail est un contrat de subordination est une attitude caricaturale qui relève d’avantage de l’esprit de la lutte des classes du XIX ème siècle que d’une réflexion intelligente. Il est parfaitement populiste de faire la confusion volontaire entre travail et effort. Il n’y a pas de travail sans effort, ce dernier devant être compensé par l’intérêt et la reconnaissance sociale. À tous ceux qui seraient tentés d’écouter le chant des contempteurs du travail et de l’entreprise, rappelons cette pensée d’A. Einstein : « Il faut éviter de frétiller de façon bouffonne dans le filet des concepts admis ».

09 août 2010

Révolte et cataclysmes

La Terre se révolte. La Russie, accablée par une canicule inédite, brûle avec un nombre incalculable d’incendies non maîtrisés asphyxiant la population moscovite et désorganisant son industrie et son agriculture, la tourbe prend feu spontanément. Avec 12.000 disparus, le Pakistan plie sous le poids de 15 millions de sinistrés dus aux monstrueuses inondations et aux gigantesques glissements de terrain. La Chine n’est pas mieux lotie avec près de 10 millions de sinistrés, plus de 10.000 disparus et tremble en regardant le barrage des Trois Gorges qui peine à retenir un flot grossissant et inquiétant. Le Portugal et la Californie luttent avec difficulté contre leurs incendies estivaux. L’Allemagne, la Pologne, l’Autriche, la Tchéquie sont noyées sous les inondations. Le Golfe du Mexique est noyé sous une marée noire pétrolière inédite dans son étendue et dans ses conséquences écologiques, économiques et sociales. Le désert africain avance avec son cortège de famines. Haïti a été ravagée par un séisme et attendra des décennies avant de pouvoir retrouver une vie à peu près normale. La banquise arctique disparaît et le pôle antarctique perd ses plaques glaciaires, les glaciers du monde entier reculent de façon dramatique. Bien sûr, il existe comme toujours de beaux esprits pour chercher à déculpabiliser l’humanité en recherchant d’hypothétiques causes dans les soubresauts solaires. Pourtant, comment peut-on nier que les activités humaines qui se caractérisent par des émissions de gaz à effets de serre industrielles et domestiques, la déforestation massive des forêts primaires, l’utilisation massive des produits chimiques agricoles, la surpèche et la détérioration de la biologie marine, la perforation des gisements pétroliers sous-marins, les marées noires officielles et cachées, ne peuvent sûrement pas améliorer la situation ! La Terre est gravement malade et nous le fait savoir. Quand les politiques prendront-ils la situation au sérieux et oublieront leurs priorités électorales égoïstement nationales et de court terme ?

27 juillet 2010

À quoi sert la Bourse ?

Une entreprise a toujours besoins de capitaux. Une entreprise publique trouve ceux-ci auprès de l’État, c’est-à-dire du contribuable. Une entreprise privée fait appel à des investisseurs. Ces derniers prêtent leur argent à l’entreprise qui reconnaît avoir une dette envers eux. Cette reconnaissance de dette s’appelle une (ou plusieurs) action(s). Une action est donc un avoir sur les capitaux de l’entreprise. Bien entendu, personne ne prête son argent sans demander un intérêt. Pour le prêteur, devenu actionnaire, cet intérêt est représenté par la valeur de l’action le jour où cet actionnaire décidera de la revendre. Ce titre financier qu’est l’action est donc une promesse de revenus futurs. Avec le temps, la valeur de l’action varie en fonction de ce que la majorité des acteurs peut prévoir de l’avenir de l’entreprise. Celle-ci a, en principe, un objectif unique : croître et prospérer. Cet avenir supposé donne une vision positive de l’avenir qui se concrétise généralement par une augmentation de la valeur des actions. Mais pour qu’effectivement l’avenir de l’entreprise se présente positivement, celle-ci doit, bien entendu, investir dans de nombreux domaines pour résister à la concurrence. Pour investir, elle a besoin de capitaux. C’est pourquoi elle fait appel à des investisseurs en leur proposant d’acheter ses actions. Pour qu’un investissement produise un effet visible sur l’activité de l’entreprise, il faut évidemment un certain temps. Par exemple, l’achat d’un nouveau matériel de production demande quelques mois avant que son efficacité améliorée ait un effet sur le chiffre d’affaires de l’entreprise. L’innovation demande généralement beaucoup de temps avant qu’elle ne produise un effet. C’est-à-dire que l’actionnaire investit dans le moyen terme, voire dans le long terme. C’est un contrat qu’il passe avec l’entreprise. Le lieu où s’achètent et se vendent les actions d’entreprises s’appelle La Bourse. Le rôle essentiel de La Bourse est donc de permettre aux entreprises de trouver les capitaux dont elles ont besoin pour investir dans le moyen terme. Puisqu’en Bourse s’achète et se vend un « produit » appelé action, il s’agit bien d’un marché. Cette levée de capitaux destinés à l’investissement s’appelle le marché primaire de La Bourse. Mais la cupidité des hommes étant sans limites, un certain nombre d’acteurs ont vu dans ce marché des actions un moyen de générer des profits rapidement en achetant et revendant les actions dans l’unique objectif de réaliser un profit maximal à court terme. C’est ainsi que s’est créé un marché secondaire que l’on peut appeler la spéculation. Les acteurs qui sévissent sur ce marché secondaire n’agissent pas pour permettre aux entreprises de se moderniser mais uniquement pour s’enrichir le plus rapidement possible. Si le marché primaire est directement relié à l’activité réelle du pays par la création de nouvelles richesses matérielles, le marché secondaire en est totalement déconnecté. Sur ce marché, l’argent n’est plus un moyen, mais est devenu un produit comme un autre dont on attend une rentabilité maximale. Les organismes spécialisés dans la spéculation recherchent un profit de plus en plus important de plus en plus rapidement. Pour cela, ils exercent une pression considérable sur les entreprises pour que celles-ci prennent toutes les mesures possibles pour augmenter la valeur de leurs actions et l’importance des dividendes versés aux actionnaires. D’où la compression acharnée des coûts de production (licenciements, délocalisations). Comme ce qui est rare est cher, certaines entreprises diminuent le nombre de leurs actions sur ce marché secondaire en rachetant leurs propres actions, ce qui se fait nécessairement au détriment de leurs investissements. Enfin, pour enrichir l’offre de ce marché secondaire, certains organismes financiers (dont les banques) ont inventé de nouveaux produits financiers pour élargir la spéculation à autre chose que les seules actions d’entreprise, ce qui a plongé le monde dans la crise que nous connaissons aujourd’hui et dont nous ne sommes pas certains de sortir. Pendant l’expansion économique des « trente glorieuses », la rentabilité des actions était de quelques pourcents. Aujourd’hui, les fonds spéculatifs exigent des rentabilités de l’ordre de 15% et les économies sont en récession. On peut légitimement se poser la question de savoir quelle est la cause et quel est l’effet. La Bourse qui devait être un outil de développement est devenu un véritable danger. Elle est devenue le bras armé de ce que le Capitalisme a de plus néfaste.

25 juillet 2010

Paradoxes

Jusque vers les années 1900, les théories scientifiques ont évolué guidées par un même principe : la généralisation de théories antérieures. Ainsi, la mécanique des milieux continus généralise la Résistance des Matériaux, la Relativité Générale est une extension de la mécanique newtonienne. Ce principe préserve la continuité des constatations dans le champ de l’expérience en supprimant les contradictions ou les paradoxes. Une rupture est survenue lorsque, en 1900, Planck a donné naissance à la théorie des quanta qui portait en elle-même les sources d’une discontinuité. Dès Démocrite, la continuité de la matière avait déjà vécu avec la théorie atomiste. Beaucoup plus tard, la continuité de l’énergie a volé en éclats avec la théorie des quanta. Il s’est alors produit un phénomène plus préoccupant. En effet, la continuité dans le comportement de la matière entre les mondes microscopique et macroscopique a succombé sous les coups de la mécanique quantique. Le comportement étrange du monde microscopique ne se constate pas dans le monde macroscopique qui nous entoure. Et cette rupture est à la base de la plus grande énigme de la science actuelle. En effet, cette étrange mécanique quantique, dont les succès prédictifs et explicatifs sont indéniables, dont les applications industrielles sont nombreuses, est incompatible avec la Relativité Générale, dont la validité n’a plus à être prouvée – du moins en apparence. En effet, ces deux théories divergent quant à l’utilisation qu’elles font des notions de base que sont l’espace et le temps. La Relativité Générale repose sur le principe de la localisation de la matière, c’est-à-dire qu’une particule – quelle qu’elle soit – est située localement et précisément dans l’espace. Par contre, le temps est une notion qui perd la généralité qu’elle avait en mécanique classique, puisque chaque objet a son temps propre qui n’est pas celui d’un autre objet en déplacement relatif. Par contre, en mécanique quantique, le temps est absolu, comme en théorie newtonienne. Toutes les particules partagent le même temps. Mais la notion de localisation perd son sens. Il est impossible de localiser de façon unique une particule dans l’espace, non pas parce qu’il est impossible de l’observer, mais parce que la particule se trouve potentiellement partout en même temps. Ainsi, les deux grandes théories physiques du moment ont une vision du monde radicalement différente. Pour l’une la localisation est un principe de base et le temps relatif, pour l’autre le temps est absolu et la localisation probabiliste. Depuis le début du siècle dernier, les physiciens s’acharnent à résoudre ce paradoxe, de moult façons plus ou moins heureuses : gravité quantique, supersymétrie, théories des cordes, théories des supercordes, théorie des twisters, géométrie non commutative, etc … Actuellement, aucune de ces théories n’est satisfaisante et leur contradiction reste, à ce jour, infrangible. Elles vivent, chacune de leur côté, parce qu’à l’échelle du quotidien observable, la force de gravitation reste négligeable devant les forces du monde microscopique (électromagnétique, nucléaires faible et forte). Il n’en est plus de même à l’instant de la création de l’Univers où le confinement extrême des particules initiales est tel que la gravité a la même importance que les autres forces. La science ne sait donc pas expliquer ce qui s’est passé. À cette discordance entre deux des plus grandes théories scientifiques modernes, s’ajoute un paradoxe complémentaire qui se concrétise dans une contradiction avec le second principe de la Thermodynamique. En effet, ce dernier décrit le fonctionnement des processus irréversibles grâce à la fonction Entropie qui signifie, entre autres choses, que le temps ne peut s’écouler que du passé vers l’avenir. Or tant la Relativité Générale que la Mécanique Quantique sont basées sur des équations dans lesquelles le temps est réversible, c’est-à-dire qu’un phénomène s’écoulant du présent vers l’avenir peut tout aussi bien se produire du présent vers le passé. D’ailleurs, certains tenants de la mécanique quantique suggèrent que l’anti-matière n’est autre que de la matière subissant des processus remontant vers le passé (un anti-proton se déplaçant dans le temps n’est autre qu’un proton remontant le temps). Le Graal de la « Théorie du Tout » reste donc encore inaccessible. Cela a au moins un mérite : on n’entendra plus jamais dire que la science est aboutie.

17 juillet 2010

Utopie ?

Sous l’impulsion courageuse de leur Président, les États-Unis viennent d’établir un corpus de règles destinées à encadrer les pratiques des organismes financiers afin d’éviter que leurs comportements irresponsables et immoraux entraînent à nouveau le pays, et le Monde, dans une crise extrêmement grave. La plus grande banque mondiale, Goldman Sachs, vient d’être lourdement sanctionnée pour avoir trompé ses clients. Pendant ce temps, les pays européens, derrière des rodomontades ridicules, continuent de tergiverser, soumis qu’ils sont à leurs égoïsmes nationaux et aux lobbys financiers. Tous les G2, G7, G20 n’ont encore abouti à rien de concret et les pratiques spéculatives ont repris de plus belle. L’économie américaine recouvre peu à peu la santé, les économies européennes continuent de stagner, voire de se dégrader. Et, pendant ce temps-là, la Chine s’amuse et continue de vampiriser le monde. L’Europe est décidément malade de sa gouvernance inefficace et empêtrée dans le court terme. Les compromis, qui sont davantage des demi-mesures, ne permettent aux responsables politiques que de préserver les demandes populistes de leur électorat et leur réélection. Pendant que les Américains prennent des mesures courageuses, les Français continuent de ratiociner sur l’usage du mot « rigueur ». Peut-être faut-il se rendre à l’évidence et admettre que l’Europe puissance est une utopie. La raison principale en est peut-être que les peuples européens, fatigués par plus de deux milles ans d’histoire faits de guerres, de révolutions, de massacres, sont sur la voie de l’assoupissement et, à terme, de la disparition ?

15 juillet 2010

Le plus beau tableau du monde

C’est le petit matin. La pluie, lourde et froide, vient juste de s’arrêter. L’air est transparent, nettoyé des poussières de la ville, soulevées par les chevaux du chemin de halage. Traversant les gros nuages, vestiges de l’averse, un rayon de soleil vient frapper la tour de la nouvelle église et les maisons voisines ainsi que le petit pan de mur jaune qui a tant frappé Marcel Proust, laissant dans l’ombre celles qui s’alignent le long du quai de Lange Geer. Le vent est tombé et l’eau du canal a retrouvé son calme, précisant les reflets bleutés de la ville et de ses remparts. La transparence de l’air donne au dessin des toits et des pignons crénelés une netteté surprenante. Rien n’arrête le regard qui traverse sans obstacle le vide du clocher de la nouvelle église. Les villageois, un moment calfeutrés pendant l’averse, sortent à nouveau et viennent, au gré des rencontres, discuter sur les bords du canal. Le chant des oiseaux matinaux, un moment interrompu, a repris et souligne le calme et la lenteur de l’instant. Le grincement des accastillages des lourds bateaux en partance pour Rotterdam et accostés sur l’autre rive du canal rebondit sur le miroir de l’eau. La journée commence…
C’est le plus beau tableau du monde.

13 juillet 2010

Mouvement perpétuel

Le libéralisme économique a un credo : tout peut faire l’objet d’un marché. L’argent peut donc faire aussi l’objet d’un marché. Sur un marché, un produit est acheté à un certain prix, il est transformé et revendu à un autre prix. C’est la même chose avec l’argent (ou avec le stockage des matières premières), à ceci près qu’il n’y a aucune transformation : c’est la marque de la spéculation. Les banques ont développé la spéculation financière avec les fonds spéculatifs anglo-saxons et se sont enrichies. Pour augmenter leurs gains, elles ont inventé des produits financiers « pourris » mais à fort rendement (par exemple, la spéculation à la baisse) que les agences de notation ont approuvé sans réserve pour avoir participé à leur création. Elles ont aussi inventé la titrisation qui leur a masqué à elles-mêmes le risque qu’elles encouraient. Finalement, les banques ont fini par être rattrapées par les résultats d’une spéculation frénétique et ont frôler la faillite.
Les banques ayant aussi un rôle majeur dans les transactions commerciales et économiques normales (ce pour quoi elles ont été créées), les États ont été dans l’obligation d’empêcher leur faillite. Les contribuables les ont donc renflouées au détriment de la dette nationale et, donc, du niveau de vie de leurs enfants. Comme des pompiers pyromanes, les agences de notation ont alors montré du doigt les états endettés (la Grèce pour commencer, puis le Portugal et l’Espagne).
Ayant été renflouées, les banques ont aussitôt recommencé à spéculer mais, cette fois, contre les États en difficulté financière et, toujours, avec la complicité des agences de notation moutonnières qui condamnent sans vergogne et avec précipitation. C’est-à-dire que les banques spéculent contre ceux-là même qui les ont sauvées. Les agences de notation dégradent la Grèce, le Portugal, l’Espagne, qui, obligés d’emprunter auprès des banques, voient immédiatement les taux d’intérêt demandés par celles-ci s’envoler, ce qui met les pays endettés dans l’impossibilité d’emprunter et donc de rembourser. Les pays de la zone euro n’ayant pas encore été dégradés par les agences de notation, ils empruntent auprès des banques pour pouvoir prêter eux-mêmes aux pays en difficulté.
Les banques gagnent encore. Les organismes financiers ont inventé le mouvement perpétuel !

12 juillet 2010

A-t-on besoin de Mediapart ?

En 1972, deux journalistes du Washington Post, Carl Bernstein et Bob Woodward, débutent une enquête journalistique qui devait aboutir, deux ans plus tard, à la démission du Président des États-Unis. Depuis, de façon récurrente, des journalistes rêvent d’obtenir une notoriété équivalente de la même façon. C’est ainsi que l’objectif de la chute d’un homme politique ou connu est devenu une sorte de TOC journalistique. Malheureusement, cette pratique crée des dégâts collatéraux insoutenables. Que l’on se rappelle les « affaires » P. Bérégovoy, DSK, J. Dray, D. Baudis, les « accusés » d’Outreau, et d’autres. Toutes affaires dans lesquelles la réputation, l’avenir, la vie d’un homme ont été mis en danger sans aucun scrupule. Et, lorsque des critiques s’élèvent sur de telles pratiques, immédiatement la corporation journalistique, unanime, s’indigne que l’on ose telles critiques au nom de la liberté d’expression de la presse et des médias et déploie le drapeau de l’atteinte à la démocratie. La presse se présente comme un contre-pouvoir au pouvoir politique, mais qui ne supporte aucun contre-pouvoir à son propre pouvoir. Ce faisant, elle se substitue à la Justice, seul contre-pouvoir légitime au pouvoir politique. Il y a plus grave. En effet, un certain nombre de médias, présents sur Internet, se servent des informations qui remontent de leurs lecteurs de terrain. Certes, nous disent-ils, toutes précautions sont prises pour ne pas construire une information sur des rumeurs. Mais, lorsque l’on examine les commentaires qui accompagnent les articles en lignes de ces médias, on ne peut qu’être consterné par l’absolue médiocrité, vulgarité, violence, qui suinte de ces écrits où le « tous pourris » est l’ingrédient de base. Et l’on est, à juste titre, très inquiets devant le risque que les « informations de terrain » dont se servent ces médias soient de la même eau. Lorsque le discours journalistique utilise des expressions telles que « tout le monde sait » ou « tout le monde connaît », on est déjà dans le domaine de la rumeur. Lorsque l’on est animé d’une aversion quasi-physique pour un homme politique, il est à craindre que l’on se laisse aller à accepter et à diffuser des approximations hâtives. Cela ne s’appelle plus du journalisme. Une démocratie a besoin d’une presse libre avec de véritables journalistes d’investigation. Malheureusement, cette race de journalistes est en voie d’extinction. La remplacer par les ragots qui remontent par Internet permet peut-être de trouver une solution rapide de remplacement, mais cette façon de faire est contraire à toute déontologie. Une démocratie a besoin d’une presse libre. C’est pourquoi on ne peut pas se passer de Médiapart, mais on peut se passer de Mr. Edwy Plenel.

09 juillet 2010

MMS

« J’admettrais volontiers que les femmes nous sont supérieures si elles ne voulaient être nos égales en tout » disait Sacha Guitry. Qu’il se rassure, l’égalité homme-femme restera à jamais une utopie. Tout du moins dans un domaine qui tient une place majeure dans la vie humaine, le domaine des relations sexuelles. L’homme doit supporter une énorme injustice, celle de savoir que ses possibilités en la matière, malgré le soutien de l’industrie pharmaceutique, sont inexorablement appelées à disparaître. En complément de l’énigme du Sphinx d’Œdipe, on pourrait ajouter la parabole du MMS (qui ne veut pas dire Multimedia Messaging Service). À l’aube de la vie, MMS signifie Matin, Midi et Soir. Vers 17 heures, Mardi, Mercredi, Samedi. À 20 heures : Mars, Mai, Septembre. Enfin, à 22 heures : Mon Meilleur Souvenir ! Heureusement, je n’ai pas de montre et je ne sais pas l’heure qu’il est…

06 juillet 2010

Tous pourris !

La nature a horreur du vide et les hommes ne supportent pas l’incertitude. Devant une crise qui s’aggrave et dont les signes de mauvaise augure se multiplient, l’angoisse de l’avenir grandit chez les citoyens. L’avenir devient incertain et chacun a peur pour lui-même et pour ses enfants. Les explications entendues, ou attendues, ne satisfont personnes car elles sont contradictoires ou construites dans une langue de bois qui ne trompe personne. Les difficultés à venir s’amoncellent et l’inquiétude grandit. Or l’homme est ainsi fait qu’il lui faut toujours trouver un responsable à ses propres difficultés, même si cette recherche est irréfléchie et purement instinctive. De toutes les sortes d’échecs, chacun cherche celui qui compromet le moins son orgueil. D’où le si facile « tous pourris » concernant les élus et, plus largement, les responsables et dirigeants. « Si les difficultés existent, cela provient non seulement du fait que ceux qui nous gouvernent sont des incapables mais, de plus, des exploiteurs qui profitent de leur situation pour se mettre eux-mêmes à l’abri du péril ». Voilà grand ouvert le portail du populisme qui offre une voie royale au Front National et à l’extrême droite. Le discours de l’opposition qui reste exclusivement centré sur la critique systématique, parfois violente, du gouvernement participe fortement à la croissance dangereuse de ce populisme. Et la place inconsidérée que certains médias donnent à la « chasse aux affaires » concourre à ce danger. Lorsque l’on en est à reprocher à François Fillon de faire le trajet Le Mans – Paris en avion plutôt qu’en train, c’est bien le signe que la vie politique française est tombée bien bas. La médiocrité a, partout, pris le pouvoir. Alors que le bateau France menace de couler, l’équipage et les passagers tirent sur le capitaine !

04 juillet 2010

Faillite ?

Commençons par un état des lieux. L’entreprise France a une production annuelle dont la valeur est de l’ordre de 2100 milliards d’Euros. Pour fonctionner, cette entreprise dépense annuellement 1100 milliards d’Euros et « gagne » (impôts et contribution sociales) environ 910 milliards d’Euros. Cette entreprise perd donc, chaque année, près de 200 milliards d’Euros, soit près de 10% de son chiffre d’affaires ! Et ceci depuis près de cinquante ans. Le résultat en est que les déficits cumulés ont été compensés par des emprunts qui représentent aujourd’hui une dette de 1700 milliards d’Euros, soit environ 83% du PIB. Bien évidemment, l’entreprise France se doit de rembourser ses emprunts, ce qu’elle fait (capital + intérêts) pour un montant de près de 45 milliards d’Euros annuels, soit 5% de ses recettes totales. Voilà une situation qui alarmerait n’importe quel dirigeant d’entreprise. D’autant plus qu’il s’agit d’une situation qui s’aggrave chaque année. L’avenir le plus probable d’une telle entreprise, si elle ne prend pas immédiatement des mesures drastiques pour redresser la situation, est la faillite. C’est la situation de la France. Elle est donc en grand danger. C’est-à-dire que l’horizon probable, si rien de sérieux n’est fait, est l’effondrement de son système social (cessation des redistributions sociales, cessation de paiement des retraites), précarisation extrême des salariés, chômage en hausse rapide. Il faut donc impérativement et rapidement prendre des mesures difficiles, voire douloureuses, qui réduisent fortement les dépenses (réduction des prestations sociales, réduction drastique du budget de fonctionnement) et qui augmentent les recettes (augmentation des impôts, soutien aux exportations). Et que constatons-nous ? Que tous les responsables, en particuliers les syndicalistes et les élus locaux, continuent imperturbablement, de réclamer des augmentations de moyens dans tous les domaines alors que la France n’en a pas les moyens. Que ceux qui nous gouvernent, plutôt que de rechercher un consensus urgent sur des mesures nécessairement impopulaires à prendre, restent les yeux fixés sur l’horizon des prochaines élections présidentielles et se complaisent dans des petits combats dérisoires. Les médias s’en font le reflet, avec ses incessantes « révélations » sur « l’affaire Bettencourt ». Les parlementaires ne parlent plus que de cela, pas un journal télévisé ou radiodiffusé qui n’évoque cette affaire. Cela donne l’impression angoissante que le bateau, non seulement n’a plus de capitaine, mais qu’il n’a pas d’équipage non plus. Nous sommes embarqués sur le Titanic avec un sentiment grandissant de déréliction.

02 juillet 2010

Pouvoir et contre-pouvoir

A-t-on le droit de confondre impunément irrévérence et grossièreté, humour et injures ? Surtout lorsque l’on s’exprime sur un média de masse ? Le « statut » d’humoriste permettrait-il de dire n’importe quoi au nom de la liberté d’expression ? Le pouvoir de s’exprimer ne comporterait-il aucun contre-pouvoir ? Peut-on admettre qu’il n’existe aucune limite à la liberté d’expression pour ceux qui s’attribuent le titre d’humoriste ? Qui a la légitimité de décider s’il existe des limites et ce qu’elles sont ? Dans toute entreprise, un salarié qui se permet d’injurier un actionnaire ou son manager est immédiatement sanctionné. Pourquoi les soi-disant humoristes seraient-ils à l’abri d’une telle sanction au prétexte que leurs propos sont humoristiques ? Qui a la légitimité pour dire qu’un discours est humoriste ou injurieux ? Le statut auto-proclamé de l’auteur est-il suffisant ? Comment se fait-il qu’il existe des humoristes que l’on ne peut suspecter de connivences avec les pouvoirs et qui ont su exercer leur talent reconnu unanimement sans jamais verser dans l’injure et tout en exprimant leurs convictions ? Voilà un certain nombre de questions qu’il aurait été bon de se poser avant d’aller manifester devant la maison de Radio France en réclamant la démission de ses managers. On regrette la disparition de Pierre Desproges !