29 janvier 2009

Une manifestation de l’angoisse

Deux millions et demi ou un million ? Jamais l’écart entre les appréciations du nombre de participants aux manifestations n’a été aussi grand. C’est le signe évident d’une forte politisation de ces manifestations. Les raisons annoncées de la participation à ces manifestations n’ont jamais, non plus, été aussi diverses. Pourtant, au-delà du discours souvent sommaire, il est aisé de distinguer un fond commun à ces revendications : une indignation compréhensible mais injustifiée, une inquiétude compréhensible et parfaitement justifiée. L’indignation trouve son terreau sur le fait « qu’on a donné des milliards aux banques alors que le pouvoir d’achat se détériore et que le risque de chômage augmente ». On peut comprendre que le salarié ne soit sensible qu’à l’apparence provocatrice des faits. Pourtant, la vérité est ailleurs. Ce n’est pas parce que le pompier pyromane a mis le feu qu’il ne faut pas tenter d’essayer d’éteindre l’incendie ! Les banques, les organismes financiers, les spéculateurs ont mis le feu à l’économie et, jamais, les responsables ne paieront assez cher leur forfaiture. La recherche d’une rentabilité du capital hors de toute raison, la mise sur le marché financier de produits tellement complexes et risqués que plus personne n’y comprenait rien, ajouté à une dilution du risque qui relève de comportements mafieux, sont les raisons de la faillite du système financier mondial et de la faillite de grands organismes financiers. Mais l’économie réelle ne peut pas fonctionner sans ces organismes. Il était donc vital d’éviter une faillite systémique généralisée de ces organismes. Le pompier a mis le feu, mais il faut éteindre l’incendie à tout prix. Le prêt aux entreprises, c’est-à-dire à l’économie réelle, est le nerf de la guerre. Mais les banques ne peuvent prêter que si, elles-mêmes, peuvent emprunter. Pour obtenir des prêts, ces organismes doivent avoir des fonds propres suffisamment importants. Or la capitalisation boursière des banques a été divisée par plus de deux depuis Septembre 2008. La nécessité d’augmenter les fonds propres de ces banques est donc une nécessité vitale, puisque c’est la condition incontournable pour qu’elles-mêmes puissent prêter aux entreprises. Voilà pour l’indignation.
L’inquiétude se manifeste quant à elle par le fait « qu’on continue de distribuer des dividendes aux actionnaires alors qu’on risque de perdre son travail ». Certes, les actionnaires des entreprises du CAC 40 ont perdu plus de 50% de leur capital avec la chute de la bourse. Il n’en reste pas moins vrai que leurs exigences démesurées portant sur des taux de rentabilité à deux chiffres depuis des décennies sont une des principales causes de l’expansion de cette économie-casino qui vient de s’effondrer. Ces responsables de la crise actuelle sont aussi coupables. L’économie-casino entraîne dans son effondrement la véritable économie, c’est-à-dire celle qui fait vivre le plus grand nombre. L’activité des industries automobiles a chuté de plus de 16% en France et de 50% aux USA depuis Septembre 2008. Quant aux équipementiers, certains ont vu leur activité s’arrêtait purement et simplement. On attend une augmentation du nombre de chômeurs de l’ordre de 300.000 durant 2009. Les spéculateurs sont vraiment coupables… et restent impunis. Là est le vrai scandale.
Un dernier mot concernant le programme alternatif de relance proposé par les socialistes. Ce programme diffère de celui du gouvernement essentiellement par son volet de relance de la consommation. Or, l’inquiétude ressentie par la population et qui s’est manifestée dans les défilés d’aujourd’hui est telle qu’elle va inévitablement pousser le salarié à épargner plutôt qu’à consommer. Il n’y aura donc pas de relance. Le Parti Socialiste, enfourchant une proposition démagogique, se trompe une fois de plus. Est-ce vraiment surprenant ?

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